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études-coloniales
27 décembre 2010

l'opération Oiseau bleu en Kabylie, 1956

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Mise au point de 2001, non publiée par ailleurs, répondant au livre de Camille Lacoste-Dujardin, Opération Oiseau bleu, éd. la Découverte, 1997. Par ailleurs dans Guerres d'Afrique (Université de Rennes, 2009, p.285), Vincent Joly confirme que "les documents fournis par le général Faivre infirment la thèse"  de Camille Lacoste-Dujardin.

 

Le montage de l'affaire K, dite Oiseau Bleu

général Maurice FAIVRE

 

De nombreux ouvrages et articles  (1) ont évoqué l'affaire K (K comme Kabyle, à ne pas confondre avec l'affaire Kobus), que l'on a pris l'habitude d'appeler l'Oiseau bleu. Le but de cette mise au point historique est de préciser qui a lancé l'affaire, qui l'a organisée et suivie, et quelles en ont été les conséquences à court et moyen terme. Tout autre peut être l'intérêt de l'ethnologue qui s'intéresse aux réactions de la population locale, et qui garde toute sa pertinence à condition de ne pas éluder les données de l'histoire.

La recherche dans les archives ouvertes, et dans les ouvrages écrits avant l'ouverture des archives (1992), ne permet pas d'atteindre le résultat recherché, à savoir l'information sur les conditions du montage. Il faut recourir en effet aux archives des Services spéciaux, obtenues par dérogation, et aux documents de 1956, conservés par les acteurs principaux (notamment Jean Servier, à condition qu'il ait bien voulu les communiquer), pour comprendre le montage de cette affaire. Dans les Annales de janvier 2000, Jacques Frémeaux confirme cette analyse. Voici le résumé de l'affaire :

«Il y a quelque chose à faire sur le plan du berbérisme», aurait dit le Gouverneur Soustelle dans le courant de 1955. Henry Paul Eydoux, conseiller technique au cabinet du gouverneur, a alors l'idée de créer un "maquis kabyle" qui serait opposé au FLN. Il charge Gaston Pontal, Directeur de la DST, de monter l'affaire, qui est habilement manipulée par l'inspecteur Ousmer, proche des terroristes d'Alger (il fut condamné pour trahison en juillet 1957 et révoqué sans pension).

300 armes de guerre sont distribuées dans une dizaine de douars autour des Iflissen, en Kabylie maritime (2) à de faux maquisards qui sont pris en main par le FLN. La DST se désintéresse alors de l'organisation K, qui est transférée en mai 1956 au Service de documentation de la 10ème Région militaire, Service de renseignement opérationnel (SRO) en cours de mise sur pied par le colonel Parisot. Ce dernier charge le capitaine Hentic, assisté du lieutenant Camous, et disposant de deux sticks du 11ème Choc, de suivre l'affaire et de règler la solde des maquisards (9 millions anciens par mois).

grave échec psychologique

Arrivant à Alger en juin, l'ethnologue Jean Servier est mis au courant par le capitaine Benedetti du SRO. Deux amis kabyles lui signalent le noyautage du faux maquis par un commissaire politique nommé Babou Lounès. De leur côté, Hentic et Camous émettent de fortes réserves et suspendent le paiement des soldes. Servier met en garde les généraux Olié et Gouraud à Tizi Ouzou, et les autorités civiles et militaires d'Alger (le 12 août et le 6 septembre). Mais on ne le croit pas.

Le 1er octobre, la 2ème compagnie du 15ème BCA, stationnée dans les Iflissen, et dont le capitaine entretient des relations (jugées suspectes par Servier) avec quelques membres de l'organisation K, est attirée dans une embuscade (2 tués, 6 blessés). On constate alors que 200 faux maquisards au moins ont rejoint la rébellion. L'oiseau bleu s'est envolé (3), s'écrie Hentic (d'où le nom attribué à tort à l'affaire K). L'opération Djenad, montée par la 27ème DIA du 9 au 12 octobre dans la forêt d'Adrar, permet au 3ème RPC de Bigeard de mettre hors de combat 130 rebelles.

Le dénouement de l'affaire K constitue un grave échec pour les services de renseignement et pour l'armée française, moins grave sur le plan militaire, que sur le plan psychologique. L'opération Jumelles en 1959 neutralisera les katibas de la wilaya 3, jusqu'à ce qu'elles renaissent en mai 1962. Dix ans plus tard, Madame Lacoste rapporte le souvenir douloureux qu'en a conservé la population des Iflissen.

Maurice Faivre
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1) Jean Servier, dans Adieu Djebels, décrit en 1958 cette affaire en baptisant Hentic et Camous Béret rouge et Béret bleu.
2) Région "conquise" mais non ralliée en 1844, et où les administrateurs, et après eux les officiers SAS, observent des oppositions, parfois violentes, entre notables de la colonisation, nationalistes et berbéristes.
3) Sans doute en référence à une chanson popularisée par Eddie Constantine en 1956.

 

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9782707126665Au début de la guerre d'Algérie, à l'automne 1956, fut tentée, par les services secrets français, en Kabylie, chez les Iflissen Lebhar, l'opération "Oiseau bleu". Elle consistait dans la création de "contre-maquis" clandestins destinés à discréditer le FLN. Or, c'est à l'avantage de ce dernier qu'a tourné cette affaire, les hommes recrutés et armés par les services français s'étant révélés être des "rebelles".
Ce drame, longtemps tenu secret et encore largement ignoré des historiens, est le point de départ de ce livre d'ethnologie original à plus d'un titre. Comment les services secrets ont-ils pu se tromper ainsi, bien qu'un ethnologue, supposé bon connaisseur de la région, ait joué un rôle important dans ce plan ?
En réalité, l'opération "Oiseau bleu" est un révélateur des illusions de l'administration coloniale et de certains ethnologues, mais aussi de l'évolution profonde de la société kabyle. De longues enquêtes auprès des Iflissen, et la consultation des archives de l'armée française (1954-1962), ont permis à l'auteur, elle-même ethnologue, spécialiste de l'Algérie, non seulement d'élucider cette étrange affaire, mais d'en analyser les raisons profondes.
Grâce à une conception renouvelée de l'ethnologie, qui prend en compte l'histoire, celle d'un certain nombre de villages, avant même la conquête coloniale jusqu'au temps présent, en passant par la guerre d'indépendance, sont étudiés les multiples changements qui ont affecté la vie des habitants de cette région. Cette étude permet de mieux comprendre ce qui fait encore la spécificité kabyle dans la crise que connaît aujourd'hui l'Algérie.

Présentation du livre de Camille Lacoste-Dujardin aux éd. La Découverte, 1997.
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Table des matières

Introduction
- I. Les débuts de la guerre - 1. Chasseurs alpins et rebelles, 1955-1958 - La Kabylie, "zone clé" stratégique - L'occupation par les chasseurs alpins : octobre 1955-septembre 1956 - L'aggravation de la "rébellion" - 2. L' "action kabyle" aux Iflissen - De la pacification aux ralliements - De l' "Action kabyle" à l'opération Oiseau bleu - 3. Le glas de la pacification - En représailles, l'opération Djenad : La guerre - De la pacification à la guerre : les conséquences - Comment Oiseau bleu et ses suites ont renforcé l'ALN.
- II. Après 1956 aux Iflissen - 4. L'armée française dans la guerre - Les formes de l'action politique après Oiseau bleu - La guerre aux Iflissen après 1956 - L'activité du 15e BCA - Les "rebelles" vus par les chasseurs - 5. La guerre vécue par les Iflissen - Les abus des administratifs locaux - La version Iflissen d'Oiseau bleu : Iguer n'Salem et Agouni-Zidoud - Le prix de la guerre.
- III. Connaissance des Iflissen - 6. Premières approches - Les sources de l'histoire - Une farouche réputation - Question de nom - Avant le colonisation - Les Iflissen contre la conquête coloniale - 7. De l'armurerie à l'émigration - Connaissance des Iflissen en 1844 - Vingt-sept années de résistance à la colonisation - L'installation coloniale - 8. Différentes pratiques de l'ethnologie - Une pratique de l'ethnologie marquée par la guerre et l'histoire - Une pratique liée à la pacification : les illusions.
- Conclusion - Des Iflissen et des ethnologues aujourd'hui - Annexes - Bibliographie.

 

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Omar el Toumi (1914-1956 ?)




Chronologie de cette recherche historique

- Camille Lacoste-Dujardin (CLD) publie en 1997 Opération Oiseau bleu aux éditions de la Découverte.

- M.Faivre fait une recherche approfondie dans les archives militaires, en particulier celles des Services secrets.

En contact avec Jean Servier depuis les Assises de la désinformation à Nice en novembre 1989, il lui demande son avis sur le livre de CLD. J.Servier lui adresse son rapport de 1956 et son livre Adieu djebels.

M.F. consulte les écrits de Yves Courrière, Alistair Horne, Mohamed Teguia, capitaine Hentic, Ousssedik Mahiéddinne, Eric Huitric (alias Erwan Bergot), Michel Roux, le colonel Godard, El Moudjahid d'octobre 1956. Il rencontre - les anciens du service Action et du 11ème Choc : gal Decorse, colonel Parisot, cdt Muelle, cap.Hentic et Camous, la DST à Paris, - les officiers SAS concernés par l'affaire K, le chef du 2ème Bureau de Tizi Ouzou, le chef de cabinet du gal Olié et le préfet Pontal ancien DST Alger.

M.Faivre publie son article "L'affaire K comme kabyle" dans Guerres mondiales et conflits contemporains en octobre 1998. J.Servier en approuve le texte. Il est surpris que CLD ait choisi le seul village des Ifflissen dont l'instituteur était communiste. Il souligne que le capitaine M. impliqué dans les contacts avec les militants K était un ancien FTP. - en janvier 2000.

Frémeaux publie dans les Annales une critique du livre Oiseau bleu. Il note que CLD a fait des enquêtes sur le terrain en 1969 seulement, et n'a consacré que peu de pages à l'opération K. Elle accorde trop de confiance aux JMO ; elle fait un procès d'ethnologie  à J.Servier, lequel aurait inspiré l'opération. Elle ignore l'ouvrage Adieu djebels, ce qui nuit à la portée de sa démonstration.

- le 25 novembre 2000, lors du colloque en l'honneur de CR Ageron à la Sorbonne, CLD fait une critique virulente de l'article de M.Faivre, qui selon elle manque de rigueur, du fait d'une sélectivité des sources,, d'une échelle d'observation cantonnée aux instances françaises...etc. Dix pages de critiques sont reprises dans les Actes du colloque, publiés en fin d'année par la Société française d'histoire de l'outre-mer.
Il est exact que MF n'a pas rencontré les témoins algériens de cette affaire, Madame Lacoste s'étant acquittée de cette recherche.
Le but de MF étant de relater le montage de l'affaire K (que n'a pas compris CLD), les témoignages utiles étaient ceux des autorités des Services français.
MF a reproduit une carte de CLD, mais l'imprimeur a oublié d'en indiquer  la référence.

- le 30 décembre 2000, MF adresse un droit de réponse au Président de la Société française d'histoire d'outre-mer.

- le 17 janvier 2001, Jacques Frémeaux répond qu'il n'est pas possible de publier ce droit de réponse, mais il conseille à MF de rédiger une mise au point historique qui sera publiée dans la revue de la Section. En fait, cette mise au point n'est mise en ligne qu'en décembre 2010 par le site Etudes coloniales.

- le 26 juin et le 23 octobre 2001, Nicole Martinez, épouse Servier, écrit à MF que J. Servier ne pratiquait pas
une ethnologie passéiste, mais au contraire prospective, qu'il avait retourné deux fois son ouvrage à CLD, à qui il reprochait de ne pas comprendre la culture berbère, et d'avoir choisi des témoins pro-FLN. Mais il a refusé d'ouvrir une polémique avec CLD.

- MF a rédigé : - un chapitre sur Jean Servier, un ethnologue de terrain face à la rébellion algérienne, dans son ouvrage Conflits d'autorités pendant la guerre d'Algérie (L'Harmattan, 2004, p. 215).

- Un article sur Jean Servier, ethnologue recruteur (?) dans Historia d'octobre 2010.

- L'historien Vincent Joly écrit dans "Guerres d'Afrique" (Université de Rennes, 2009, p. 285) : "Les documents fournis par le général Faivre infirment la thèse" de Camille Lacoste-Dujardin.

- L'historien Manceron reprend les critique de CLD sur J.Servier et M. Faivre dans : Les harkis, Histoire, Mémoire et Transmission, Ed. de l'Atelier, 2010, p. 92 et 97. Il ne répond pas à l'offre de débat que lui propose M.Faivre.

- Les lettres et documents cités ci-dessus sont disponibles.

général Maurice Faivre

 

 

 
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12 février 2011

un documentaire sur Maurice Audin

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Maurice Audin - la disparition

général Maurice FAIVRE

 

Ce documentaire de François Demerliac produit par «Chaya films et virtuel» a été diffusé une dizaine de fois entre le 19 juillet 2010 et le 13 février 2011 par la chaîne politique Public Sénat. Un débat enregistré le 4 février par Benoît Duquesne et Elise Lucet, intitulé Guerre d’Algérie : l’éternelle déchirure est diffusé le 12 février à 23.00, puis le 13 février à 19.00 et le 20 février à 10.00. Il réunit François Demerliac, Maurice Faivre, François Pouillot, Malika Rahal, Charles Sylvestre (Sylvie Thénault  non citée ?) .

Le documentaire a provoqué des protestations horrifiées de la part des anciens combattants, des rapatriés, harkis  et EMSI qui l’ont vu. C’est en effet un film anti-colonialiste, anti-miltariste, pro-FLN et pour tout dire anti-français. A défaut d’une  recension,  voici un aperçu sur les protagonistes du documentaire :

- Josette Audin, dont le mari a disparu le 21 juin 1957 après avoir été arrêté par les parachutistes le 11 juin, exprime une douleur que l’on comprend. Son mari n’était pas un terroriste, mais un universitaire, propagandiste et militant communiste. La bavure policière (attribuable sans doute à Aussaresses) est évidente, mais l’enquête a été totalement négative. 1 700 Français d’Algérie ont également disparu pendant ce conflit, dont seulement 72 corps ont été retrouvés ; la douleur des familles est comparable, mais n’a fait l’objet d’aucun documentaire (1). Cela explique peut-être que le chef de l’État ne réponde pas aux lettres de madame Audin demandant la condamnation du gouvernement de 1957

- historien de la Grèce et militant contre la guerre d’Algérie, Vidal-Naquet a proposé une thèse (2) sur la mort d’Audin. Il imagine qu’une évasion simulée a été montée par le lieutenant Charbonnier pour camoufler la mort d’Audin sous la torture ; ce n’est qu’une hypothèse pour laquelle il n’apporte aucune preuve. Demerliac semble ignorer les recherches infructueuses effectuées par la Commission de Sauvegarde du droit et des libertés et par le Procureur Reliquet. Michel Debré, premier ministre, a alors estimé que le journal de Vidal-Naquet Vérité-Liberté «devrait être interdit et des perquisitions ordonnées».

- plusieurs avocats  (Braun, Borker, Nicole Dreyfus, Badinter) soutiennent la thèse de Vidal-Naquet et demandent que la vérité soit recherchée par de nouvelles enquêtes. Il faut rappeler que les avocats du FLN sont suivis dans un dossier du premier ministre (3) « les avocats félons »… «ces hommes dont le président Patin n’a cessé de dire qu’ils trahissaient». Nicole Dreyfus se réclame des valeurs de la Révolution française ; celles de Robespierre sont en effet imitées par le FLN ; au XIXe siècle en revanche, les valeurs de la colonisation relèvent d’une idéologie républicaine (V. Hugo, J. Ferry, L. Blum).

- plusieurs témoins (Nallet, Rambaud, Bonnardot, Alleg, Pouillot) font état des tortures, des viols et des exécutions sommaires à grande échelle dont ils ont été témoins ou victimes. Mais suivant les errements de Patrick Rotman, aucun de ces témoignages n’est recoupé. Le cas d’Henri Alleg, en particulier, mérite d’être souligné. Massu affirme (4) qu’Alleg a reçu une paire de giffles de la part du capitaine Faulques. Me Badinter, défenseur de l’Express devant la 17ème Chambre correctionnelle (14 avril 1970), a reconnu que les sévices sur Alleg et Audin ne pouvaient être imputés à Faulques. Quant au professeur Pierre Michaux de la faculté de médecine d’Alger, qui eut à étudier le dossier Alleg, il observe que la plainte a été retirée et il conclut : «Alors de deux choses l'une, ou Alleg a menti et n'a jamais eu de brûlures électriques ou bien, ce qui n'est pas non plus à son honneur, il aurait eu peur d'une simple petite biopsie cutanée pour faire la preuve de l'origine électrique de sa cicatrice». Le pourvoi d’Alleg a d’ailleurs été rejeté par la Cour de Cassation le 10 août 1960.


approximations et erreurs

D’autres approximations ou erreurs historiques, reprises dans le documentaire, doivent être corrigées :

- il n’y avait pas d’apartheid en Algérie, mais un certain complexe de supériorité, tempéré par des relations de confiance employeur-employé, confirmées par l’accueil que les anciens colons reçoivent aujourd’hui en Algérie ;

– la scolarisation, rejetée initialement comme l’école du diable, a notablement prospéré après 1920, pour atteindre 15% en 1954, 40% en 1960 et 68% en 1961 ;

- les pouvoirs spéciaux, votés par le parti communiste le 12 mars 1956, donnaient des pouvoirs de maintien de l’ordre aux autorités civiles (et non militaires) et promouvaient des réformes sociales ; - l’assignation à résidence a été légalisée par la loi sur l’état d’urgence du 3 avril  1955, confirmée par l’Instruction du 7 juillet ;

- la généralisation de la torture a été démentie par les délégués suisses du CICR (plus de 400 rapports) qui estiment son taux à environ 20% des internés ; quant au colonel Trinquier, il était formellement opposé à l’emploi de la torture (témoignages Messmer, professeur Dabezies et général Jacquinet) ;

- la liste des disparus de la bataille d’Alger établie par Paul Teitgen a été démentie par le colonel Godard et mise en doute par l’historien Pervillé ; le ministre Edmond Michelet déplore la déclaration de Teitgen au procès Jeanson, et Michel Debré constate que son récit est mensonger, sa conduite n’est  pas admissible et ses propos non tolérables ;

- à l’audience de 1967 qui reconnaît la mort suspecte de Maurice Audin, Edmond Michelet n’est plus Garde des sceaux depuis six ans ;

- le témoignage de Pouillot sur la villa Sesini en 1961-62 est un faux ; le Commissaire Le Cornec et le commandant d’unité de Pouillot en 1962 (le capitaine  Guy Hardy) le démentent totalement. La diffusion du débat L’éternelle déchirure devrait susciter d’autres commentaires.

Maurice Faivre
le 12 février 2011

 

1 - un film «La valise ou le cercueil» serait en préparation. Souhaitons qu’il bénéficie de la même attention des médias
2 - Pierre Vidal-Naquet, L’affaire Audin, éd. de Minuit, 1958. Sous sa direction, cinq comités publient un  memorandum Audin «Nous accusons», qui dénonce de multiples exactions, tortures, génocides, arrestation d’avocats. Le professeur Richet écrit que certains faits sont douloureux, mais que le memorandum contient des absurdités. Les procureurs étudient le document et concluent : aucune trace, non-lieu, classé sans suite, affaire inconnue. La Justice militaire poursuit cependant quelques affaires
3 - fonds privé Debré 2DE 14-22. Maurice Patin préside la Commission de Sauvegarde du droit et des libertés.
4 - général Massu, La vraie bataille d’Alger, Plon, p. 246. Grâce à cet interrogatoire, le secrétaire du PCA, André Moine, a pu être arrêté et condamné à 20 ans de réclusion pour atteinte à la sûreté de l’État. Amnistié en 1962, il est devenu animateur de la FNACA.

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13 novembre 2010

Oran, juillet 1962

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massacres du 5 juillet 1962

Merci pour votre blog qui permet à tous de s'exprimer. Tous les jours de nouveaux témoignage arrivent sur ce dossier du 5 juillet 1962. Ci-joint les dernières photos reçues.

Bien cordialement.

Jean-François PAYA

 

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Signaler pour ceux qui veulent en savoir, taper sur GOOGLE : "jf paya" et "jean francois paya"

Reçu d'un jeune correspondant Algérien :

BONJOUR, merci beaucoup de cette information, je t'assure que les Algériens ne connaissent rien sur l'histoire des pieds noirs

Hammed Ben Malek

 

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Ci joint carte d'Oran : Disposition des troupes françaises le 5 juillet 62, en collaboration avec le professeur Guy Pervillé de l'université de Toulouse (autorisation de diffuser). Voilà vous avez tout pour un rappel historique .

Cordialement JF Paya

 

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18 janvier 2011

une kouba en métrople, 1919-2010

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la kouba de Nogent (1919)

reconstruite en 2010 et inaugurée en 2011

Michel RENARD

 

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la kouba dans le carré musulman à Nogent-sur-Marne le 11 novembre 2010


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la kouba dans le carré musulman à Nogent-sur-Marne le 11 novembre 2010

À l'été 2004, aux archives d'Outre-mer, à Aix-en-Provence, poursuivant mes recherches sur la présence musulmane en métropole, j'ai découvert une correspondance entre Émile Piat, consul en région parisienne, responsable des formations sanitaires accueillant des combattants de confession musulmane, et le capitaine Jean Mirante, du service des Affaires indigènes à Alger. Il était question de l'édification d'une kouba en l'honneur des soldats musulmans de l'armée française morts lors de leur séjour à l'hôpital de Nogent-sur-Marne.

J'ai expliqué ici ce qu'était une kouba et les épisodes de cette histoire, l'inauguration du monument en 1919, ainsi que les démarches entreprises pour tenter de la faire reconstruire après son écroulement dans les années 1980. Avec mon ami Daniel Lefeuvre, professeur à l'université Paris-VIII, nous avons multiplié les initiatives (surtout lui ces dernières années) qui ont fini par aboutir après un appui initial du président Nicolas Sarkozy (la Gauche se foutant carrément de cette affaire, bravo les défenseurs des immigrés...!) :

- Appel et souscription pour le reconstitution de la kouba de Nogent-sur-Marne (2007)

- Projet de reconstitution de la kouba (1919) du cimetière de Nogent-sur-Marne (Michel Renard, 2005)

- Versets du Coran sur la kouba de Nogent

- Lettre adressée à Hamlaoui Mekachera (9 mai 2005)

- Lettre adressée à Dalil Boubakeur (10 mai 2005)

- Réponse de Dalil Boubakeur (24 mai 2005)

En 2004, j'avais retrouvé le marbrier, descendant de celui qui avait bâti la kouba, et tout a commencé comme cela. Aujourd'hui, la kouba a été reconstruite.

Elle avait été édifiée à la fin de la Première Guerre mondiale grâce à une conjonction d'initiatives : la politique de gratitude et de reconnaissance de l'institution militaire à l'endroit des soldats venus du domaine colonial, l'empathie d'un consul entreprenant et l'entremise d'un officier des affaires indigènes en poste à Alger, le soutien d'un édile communal et la générosité d'un marbrier. Cette osmose dépasse toute politique d'intérêts au sens étroit.

C'est ce surplus de signification qui en fait un symbole d'une mutuelle reconnaissance qui a toutes raisons d'être rappelée aujourd'hui. C'est aussi cela l'identité nationale en France.

Michel Renard

 

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en 2004

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construction en cours à l'été 2010

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à l'été 2010

 

 

 

- blog sur la reconstruction de la kouba de Nogent-sur-Marne

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28 juillet 2009

Oujda : le livre de Saïd Zerzouri

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un siècle de football à Oujda


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"Ce livre est un récit d’une multitude de traditions et d’évènements sportifs qu’a connus la ville d’Oujda (Maroc) depuis la période précoloniale jusqu’à l’an 2000. Il expose la manière dont les gens sont passés des jeux traditionnels aux sports modernes suite à l’occupation de la ville par l’armée française à partir de 1907. Il explique comment le pouvoir colonial a exploité le sport, en particulier le football, à des fins politiques visant à acculturer et à contrôler la jeunesse d’Oujda qui, à son tour, en a fait un moyen et une arme de lutte et de résistance contre ce pouvoir colonial à une époque où les relations entre d’une part, les européens et d’autre part les musulmans, étaient très tendues.

Il relate aussi les années de gloire et de revers du football dans l’est du Maroc depuis la période de colonisation jusqu’à sa nationalisation après l’indépendance.

Il rend hommage aussi, malgré toutes les dissensions entre les communautés, aux vedettes françaises, algériennes et marocaines qui ont marqué le football national et international et qui resterons à jamais  gravés dans nos mémoires bien qu’ils nous aient quittés."

_____________________________________________________

SOMMAIRE

I - Introduction :                            1

La période précoloniale

II - Période précoloniale, celle des jeux et des loisirs :            4

La période coloniale

III - Période coloniale : L’occupation française en 1907 :            19

1- Phase de réticence, de méfiance et de discrimination :        20
a- Le sport militaire :                    21
b- Le football civil :                    25
1- Sporting Club d’Oujda (SCO) et France-Maroc    25
2- Sporting Club France Maroc d’Oujda (SCFMO)    27
c- Construction d’un terrain de football en 1921 dans
la nouvelle ville « le Stade Municipal »            30
d- L’école et son caractère discriminatoire sur le plan culturel
et sportif entre 1920 et 1935 :                32

2 -  Phase de rapprochement, d’essai et d’initiation :            41
a- Essor du sport corporatif et début d’acculturation
des occupés dans les années trente :            41
b- La période 1939-45 et le début d’une nouvelle histoire
sportive à Oujda :                    46
c- l’Union Sportive d’Oujda (USO) :            46
d- Le football comme moyen de contrôle de la jeunesse
des quartiers périphériques d’Oujda à partir de 1940:        49

3 - Phase de nationalisme sportif (marocains et algériens d’Oujda)
à partir de 1940:                            51
a- La Jeunesse Sportive Musulmane d’Oujda (JSMO) :    51
b- La naissance du Mouloudia Club Oujda (MCO)
de football :                        52    b-1- L’emprunt du nom et sa signification :        54
b-2- L’emblème choisi et sa signification :        55
b-3- Le choix des couleurs et leur signification :    56
c- Le début du championnat dans la Ligue du Maroc
de 1946 à 1950:                        58
d- Le football de la période située entre la montée
en division d’honneur et l’indépendance (1950 à 1956) :    64


La période postcoloniale

IV - La période postcoloniale, de la gloire à la relégation :            75

1 - Diversification, multiplication et abondance des pratiques
sportives :                            75
a- Le développement des équipes de football dans
les quartiers juste après l’indépendance (1956) :        75
b- La période glorieuse du football à Oujda
de 1957 à 1962 :                        76
c- L’équipe du FLN à Oujda en 1958-59 :            91
d- Les hommes forts de cette période glorieuse :        102
d-1- Monsieur Belhachemi Mostafa le légendaire :    103
d-2- Monsieur Benbrahim Mohamed le sauveur :    105
e- Comment s’est formée l’équipe de l’Union
Sportive Musulmane d’Oujda (U.S.M.O.) ?            106
2 - La première période du déclin du football à Oujda
à partir de 1963-1970 :                        110

3 - La période de consécration du football d’Oujda
de 1970 à 1980 :                            118

4 - La période de crise du football à Oujda de 1981 à nos jours :    144
    a- La période située entre 1981 et 1988 :            144
    b- Le sport scolaire :                    151
    c- Le football en crise de 1989 à nos jours :            155

5 - Le football et la femme à Oujda :                160

V – Conclusion :                            165

BIBLIOGRAPHIE :                            168

Constatation :                                170



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27 septembre 2010

un faux discours de Léopold II, fabriqué en Afrique

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un faux discours de Léopold II (1883)

 

Il circule depuis plusieurs mois sur internet une vidéo mettant en scène et en paroles "le discours ignoble de Léopold II, roi des Belges, aux prêtres chargés d'évangéliser le Congo belge" (1883) : par exemple sur You Tube ici. 

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Ce prétendu discours est un faux...

1) Il aurait commencé à circuler en 1981 au moment des différends entre Mobutu et l'Église catholique ; cf. commentaire de "moi_951" :
http://www.dailymotion.com/video/x5uro3..._colonisation-et-religion-congo-belg_news

2) Par ailleurs, il ne semble pas qu'il y ait eu des missionnaires belges au Congo à cette date, les prêtres et religieux venaient du Congo des Français ; cf. http://books.google.fr/books?id=U47B0mwVU_4C&pg=PA346&lpg=PA346&dq=missionnaires+belges+au+congo+1888&source=bl&ots=MjrpJODtzv&sig=Or883P0FV9OZnKrO_OoGkWIxVBE&hl=fr&ei=Lp6hTPLwGJTL4Aa9vZzVAw&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=4&ved=0CCEQ6AEwAw#v=onepage&q=missionnaires%20belges%20au%20congo%201888&f=false

3) une investigation historiographique et critique se trouve sur ce forum de discussion :
http://www.empereurperdu.com/tribunehistoire/viewtopic.php?f=10&t=577

Michel Renard

congo


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25 août 2010

Ali Boumendjel

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Ali Boumendjel (1919-1957)

Malika RAHAL

En mars 1957, la presse annonce la mort d'un "petit avocat musulman" : "Qui a tué Maître Boumendjel" titre France-Observateur. On s'interroge sur un faux suicide. Mais que faisait donc ce "modéré" entre les mains des "paras". Pourquoi a-t-il été assassiné, comme le reconnaîtra le général Aussaresses dans ses mémoires en 2001.

L'homme était un militant de l'Union Démocratique du Manifeste Algérien (UDMA), l'organisation de Ferhat Abbas. Son parti, perçu comme modéré, bourgeois, francophone et intellectuel a été gommé de l'histoire officielle algérienne et largement ignoré par les historiographies française et algérienne. Au moment de son arrestation, Boumendjel faisait le lien entre la direction de l'UDMA et la direction algéroise du FLN. Il conjuguait alors, comme il l'avait toujours fait sans complexe, la culture française avec un nationalisme algérien, républicain et démocratique. Il y a plusieurs histoires dans cette histoire : une histoire française et une histoire algérienne, celle d'une affaire qui a secoué les intellectuels français, et l'histoire d'un héros et d'un martyr. L'une et l'autre éclairent d'une lumière nouvelle les récits existants.

Au mépris qu'Aussaresses exprime à l'encontre de cet intellectuel, aux abracadabrantes explications qu'il donne de son arrestation, il est nécessaire d'opposer un travail d'historien. À l'histoire officielle algérienne, qui tente d'intégrer Ali Boumendjel parmi ses martyrs en schématisant son parcours, il importe d'opposer la richesse d'une biographie familiale, la complexité d'un engagement politique nuancé et d'un idéal à la fois algérien et républicain, partagé par nombre de nationalistes d'alors, et susceptible de trouver aujourd'hui un écho de l'autre côté de la Méditerranée.

Malika Rahal
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- le livre de Malika Rahal sur Ali Boumendjel

- sur Études Coloniales

- Malika Rahal : notice biographique



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Malika Boumendjel, veuve de l'avocat Ali Boumendjel :

"Mon mari ne s'est pas suicidé, il a été torturé puis assassiné"

 

Le Monde, 2 mai 2001

JE NE CONNAIS PAS les circonstances exactes de la mort de mon mari. Je n'ai même pas eu le droit de voir son corps. Seuls, deux médecins de la famille l'ont aperçu, car ils avaient été appelés pour l'identifier à la morgue d'Alger. J'ai su par la suite que l'un d'eux avait dit à ma famille : "Ne la laissez pas voir le corps, elle ne s'en remettrait pas."

Ma vie de femme s'est arrêtée le 23 mars 1957. C'était un dimanche. Mon plus jeune frère est arrivé en criant : "Ali s'est suicidé !" Il tenait un journal à la main. Je me suis sentie comme anéantie et, en même temps, je n'arrivais pas à y croire. Quelques jours auparavant, on nous avait prétendu qu'Ali, arrêté par l'armée quarante-trois jours plus tôt, avait fait une tentative de suicide. Il avait prétendument essayé de se couper les veines avec ses lunettes. Plus tard, j'ai appris qu'il souffrait en réalité de multiples blessures au poignard faites au cours de ses interrogatoires. C'était l'une des méthodes favorites du sinistre lieutenant Charbonnier…

Ce dimanche 23 mars, je me suis précipitée à l'hôpital militaire Maillot, puis au tribunal militaire. J'ai expliqué mon histoire à un jeune du contingent. Il est allé s'informer auprès de ses chefs, et, quand il est revenu, il avait l'air troublé et a bredouillé : "Je ne peux rien vous dire, allez voir au commissariat central." C'est ce que j'ai fait. Là, le commissaire Pujol m'a reçue et il m'a dit tout de suite : "Vous ne le saviez pas ?" C'est comme cela que j'ai appris la mort d'Ali. J'ai eu l'impression de plonger dans des ténèbres absolues.

Je suis rentrée chez moi dans un état second.
Les militaires nous ont annoncé que les obsèques n'auraient lieu que le mercredi suivant, mais le corps ne m'a pas été rendu. Le jour de l'enterrement a été pire que tout. Je suis allée à la morgue. J'y ai aperçu Massu, en train de rendre les honneurs à un militaire tombé au combat. Pendant ce temps-là, on faisait passer en vitesse un cercueil plombé, celui de mon mari, qu'on a chargé à bord d'une fourgonnette, avant de prendre la direction du cimetière, sous escorte policière. Tout a été expédié en un quart d'heure. Ali a été enterré comme cela, sans cérémonie, sans rien. Il avait trente-huit ans.

Je me suis retrouvée seule avec mes quatre enfants âgés de sept ans à vingt mois : Nadir, Sami, Farid et la petite Dalila. J'ai appris peu à peu les activités politiques de mon mari. L'un de ses anciens camarades m'a appris qu'il avait été le conseiller politique d'Abane Ramdane l'"idéologue" de la "révolution algérienne". C'était un avocat engagé, un humaniste et un pacifiste. Bien avant l'insurrection, il était choqué par ce qui se passait en Algérie, en particulier dans les commissariats. La torture y était déjà largement pratiquée, et cela nous scandalisait. Au début, Ali ne souhaitait pas l'indépendance de l'Algérie. Il ne s'y est résolu qu'après avoir compris qu'il n'y avait pas d'autre alternative.

Il était très réservé et ne se décontractait qu'avec moi. On s'adorait. Il me disait : "Tu es un autre moi-même." On s'était connus à l'âge de quatorze ans et, des années après, nous avons fait ce qu'on appelle un vrai, un grand mariage d'amour. Toute cette année 1957 a été un cauchemar. En février, mon frère Dédé avait été arrêté, et on ne l'a jamais revu. Une "corvée de bois". Mon père a fait des recherches désespérées pour le retrouver. Un jour, il s'est rendu à la mairie avec toutes ses décorations d'ancien combattant de la guerre de 14-18, du Chemin des Dames, à Verdun, où il avait perdu ses deux bras. Eh bien, cet homme de soixante-quatorze ans s'est fait jeter par les parachutistes. Ils lui ont lancé ses décorations à la figure et l'ont mis dehors en l'insultant… En mai de cette année-là, il a été arrêté à son tour, et lui aussi a disparu au cours d'une "corvée de bois".

Ce que je souhaite aujourd'hui avec mes quatre enfants, c'est que la lumière   soit faite. Nous l'attendons depuis quarante-quatre ans. Nous avons repris espoir   l'année dernière, avec l'affaire Louisette Ighilahriz, mais le choc, ç'a été les aveux d'Aussaresses. Un peu plus tard, le 12 décembre, Libération a publié un papier désignant nommément Aussaresses comme l'assassin de mon mari et de Ben M'hidi.   Depuis, on n'a plus de doutes là-dessus, mais nous voulons que la vérité soit dite : Ali ne s'est pas suicidé. Il a été torturé puis assassiné. Surtout, qu'on ne nous parle plus de suicide, c'est primordial pour nous ! Nous ne disons pas cela dans un esprit de vengeance, nous estimons seulement avoir droit à la vérité. C'est indispensable pour l'Histoire encore plus que pour nous.

Propos recueillis
par Florence Beaugé

 

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12 avril 2010

Indochina, An Ambiguous colonization, 1858-1954

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Indochina, An Ambiguous colonization,

1858-1954

Pierre BROCHEUX et Daniel HÉMERY



Présentation, en langue anglaise

Combining fresh approaches with an historical synthesis, this book presents general history of French Indochina. Focusing on economic, social, intellectual, and cultural dimensions, it intends to treat Indochina's entire history from its inception in Cochinchina in 1858 to its crumbling at Dien Bien Ph in 1954 and on to decolonization.


Combining new approaches with a groundbreaking historical synthesis, this accessible work is the most thorough and up-to-date general history of French Indochina available in English. Unique in its wide-ranging attention to economic, social, intellectual, and cultural dimensions, it is the first book to treat Indochina's entire history from its inception in Cochinchina in 1858 to its crumbling at Dien Bien Ph in 1954 and on to decolonization.
Basing their account on original research as well as on the most recent scholarship, Pierre Brocheux and Daniel Hemery tell this story from a perspective that is neither Eurocentric nor nationalistic but that carefully considers the positions of both the colonizers and the colonized. With this approach, they are able to move beyond descriptive history into a rich exploration of the ambiguities and complexities of the French colonial period in Indochina.
Rich in themes and ideas, their account also sheds new light on the national histories of the emerging nation-states of Vietnam, Laos, and Cambodia, making this book essential reading for students, scholars, and general readers interested in the region, in the Vietnam War, or in French imperialism, among other topics. Caption translations work provided in part by Nina Fink.

biographie des auteurs, en langue anglaise

Pierre Brocheux is Professor of Contemporary History at Universite Paris VII-Denis Diderot and the author of Ho Chi Minh: A Biography and The MeKong Delta: Ecology, Economy and Revolution, 1860-1960. Daniel Hemery is Professor of Contemporary History at Universite Paris VII-Denis Diderot and the author of In the Servitude of Power: Energy and Civilization through the Ages, among other books.

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Product Details

  • Pub. Date: March 2010
  • Publisher: University of California Press
  • Format: Hardcover, 508pp
  • Sales Rank: 268,118

Synopsis

"An important, well-conceived, and original piece of historical synthesis."—Peter Zinoman, author of The Colonial Bastille: A History of Imprisonment in Vietnam

"Indochina is the first and best general history of French colonial Indochina from its inception in 1858 to its crumbling in 1954. It is the only work to avoid 'nationalist,' 'colonialist,' and 'anticolonialist' historiographies in order to fully explore the ambiguity of the French colonial period. A major contribution to the national histories of France, Vietnam, Laos, and Cambodia."—Christopher Goscha, Université du Québec à Montréal

"An important, well-conceived, and original piece of historical synthesis."—Peter Zinoman, author of The Colonial Bastille: A History of Imprisonment in Vietnam


Biography

Pierre Brocheux is Professor of Contemporary History at Université Paris VII-Denis Diderot and the author of Ho Chi Minh: A Biography and The MeKong Delta: Ecology, Economy and Revolution, 1860-1960. Daniel Hémery is Professor of Contemporary History at Université Paris VII-Denis Diderot and the author of In the Servitude of Power: Energy and Civilization through the Ages, among other books.


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1 juin 2010

les massacres du 5 juillet à Oran

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réponse de Jean Monneret

à Gilbert Meynier

les massacres du 5 juillet à Oran

 

La thèse de Gilbert Meynier sur l'origine des massacres du 5 juillet à Oran est surprenante. Il ne fait en réalité que reprendre ce qu'avait déjà avancé à ce sujet un journaliste du Figaro aujourd'hui disparu,il y a trois décennies. Pour ma part, je n'ai jamais cru à la culpabilité de tireurs de l'OAS dans cette affaire. Je n'ai jamais cru non plus à un complot de l'Armée des frontières et des benbellistes qui aurait résulté en un massacre des Européens.

Un historien se penche sur des faits établis. C'est fort loin d'être le cas ici. Meynier admet qu'il n'a aucun document en l'espèce. Pourquoi nous resservir alors la vieille thèse complotarde fumeuse du tandem Ben Bella-Boumedienne montant une provocation pour assurer ensuite son emprise sur Oran.

J'ai réfuté cette "analyse" dans mon livre. Le professeur Meynier l'a-t-il seulement lu? Il confond en outre la fusillade du 26 mars à Alger et le massacre du 5 juillet à Oran. Mauvais début. Il place en outre la rue d'Isly à Oran. Passons. La thèse de la provocation repose sur deux postulats arbitraires : le premier que le FLN d'Oran était favorable au GPRA et hostile à Ben Bella et à Boumedienne ; rien ne le démontre sérieusement. Le second que l'ALN dite "des frontières" avait besoin d'un prétexte pour entrer à Oran. Tout cela ne repose sur rien en l'état actuel de nos connaissances. Quant à évoquer des témoignages........... anonymes de surcroît !

Ce que nous savons et qui est irréfutable est qu'il régnait un climat d'hystérie dans les quartiers musulmans d'Oran. Que le FLN local était peu et mal organisé et que le "militantisme" de certains se confondait avec un certain gangstérisme (voir pages 48 à 52 de mon livre), que l'ALN locale et les ATO était un ramassis de gens mal formés et incontrôlés, que de nombreux manifestants sont venus en centre-ville armés et que dans une telle situation, il ne pouvait qu'y avoir du sang.

De toutes les responsabilités, la plus lourde fut celle du commandement militaire français et de son chef le général Katz qui appliquant aveuglément des directives de Paris qu'il jugeait pourtant absurdes n'avait rien prévu pour ce jour là. Il donna à deux reprises aux troupes françaises l'ordre de rester consignées dans leurs casernes. Ceci, je l'ai prouvé, documents à l'appui, dans mon livre La phase finale de la guerre d'Algérie. Selon Alain Peyrefitte, le général De Gaulle avait dit : "Si les gens s'entre massacrent ce sera l'affaire des nouvelles autorités, pas la nôtre". Les responsabilités sont là et les chercher ailleurs c'est exonérer les dirigeants français de leurs lourdes fautes.

Jean Monneret

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30 mai 2010

les massacres d'Oran en juillet 1962

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la responsabilité de "l'armée

des frontières"

dans les massacres d'Européens à Oran

le 5 juillet 1962 ?
 

 

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Cher(e)s ami(e)s,

 
je vous prie de trouver, ci-dessus, la version sur les origines de la fusillade qui devait conduire aux massacres d'Européens, à Oran, le 5 juillet 1962, présentée par Gilbert Meynier, lors d'une journée sur "Paris et la guerre d'Algérie, Une mémoire partagée", le 19 mai 2009.
 
Cette hypothèse est présentée avec toutes les précautions nécessaires. Néanmoins, elle semble suffisamment crédible aux yeux d'un historien scrupuleux comme Gilbert Meynier pour  qu'il ait souhaité l'annoncer publiquement. Cette version témoigne par ailleurs, et une fois de plus, de l'intérêt qu'aurait l'ouverture des archives de l'ALN et du FLN à tous les historiens. Sauf à ce que certains documents soient dérangeants pour l'histoire algérienne officielle !
 
Très cordialement vôtre
 
Daniel Lefeuvre

 

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24 mai 2010

à propos du film "Hors-la-loi" de Rachid Bouchareb et d'une pétition d'historiens

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À vous mes amies et mes amis

Daniel LEFEUVRE

Une pétition de soutien au réalisateur du film Hors-la-loi, signée par quelques historiens, circule. Pourquoi, seuls quelques historiens, triés sur le volet, ont-ils été convié à cette avant-première ? Pourquoi n'avoir pas invité un nombre plus large et plus divers d'historiens. Si c'est faute de carnet d'adresses, je me serais fait un plaisir et d'autres avec moi, j'en suis sûr, de compléter les références des attachées de presse.

Ou bien, fallait-il ne montrer le film qu'à des amis pour obtenir leur imprimatur et délégitimer ainsi toute contestation ? En tout cas, le texte de cette pétition est un chef d'oeuvre de jésuitisme et de contorsion. D'une part, les signataires défendent, avec raison, la liberté de création, le droit d'utiliser un décor historique pour camper une fiction.

Mais alors, il faut être clair. Et les historiens auraient dû dire que le réalisateur a pris toute liberté avec l'histoire et que cette fiction n'a pas plus de valeur historique que La Vache et le Prisonnier ou que Papy fait de la Résistance.

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Mais, dans le texte, d'autres affirmations contredisent la nature simplement fictionnelle du film. D'abord lorsque nos collègues estiment que "L'évocation d'une page d'histoire tragique peut aussi bien passer par la fiction, avec ses inévitables raccourcis, que par les indispensables travaux des historiens. Aussi bien par la fiction malgré les inévitables raccourcis que par les travaux d'historiens !


de l'inutilité des historiens...!

Ainsi c'est bien d'une évocation historique dont il est question. Mais une évocation à laquelle des historiens accordent le droit de traiter les faits évoqués avec toute la licence  qui plait au réalisateur, tout en mettant cette évocation "et ses inévitables raccourcis" sur le même plan que les travaux des historiens.

Mais alors, tout se vaut ! La fiction, le roman, comme le travail méticuleux des historiens s'attachant à serrer au plus près les faits, à les peser, à tenter de les interpréter, en évitant les inévitables raccourcis et les libertés que s'accordent les romanciers ou les cinéastes.

Rarement, un tel constat de l'inutilité de notre profession aura été dressé, et par des historiens ! Une bonne fiction, quelques raccourcis légitimes (par exemple sur l'heure des premiers assassinats et les origines des massacres qui ont ensanglanté Sétif et sa région en mai 1945), et tout est dit. Le spectateur saura ! En conclusion, les signataires de la pétition affirment enfin  que "Le pire est à craindre quand le pouvoir politique veut écrire l'histoire que nos concitoyens iront voir demain sur nos écrans".

Mais alors, cher(e)s collègues, ce n'est plus d'une fiction, d'un film de gendarmes et de voleurs dont il est question, mais de  l'écriture cinématographique d'une page d'histoire, dont vous prenez la défense, même si vous évoquez, les quelques désaccords, non, pardon - le mot est trop fort - "les réserves précises" sur certaines de ses évocations du contexte historique de la période, émises par certains d'entre vous. Réserves dont le texte ne dit rien.


la fiction n'est qu'un prétexte

Ce qui est projeté n'est donc pas, d'abord, l'itinéraire de trois frères, comme on veut nous le faire croire. La fiction n'est qu'un prétexte : elle permet de se dédouaner des critiques que le film suscitera : voyez mes ailes, je ne suis que le réalisateur d'un polar !

C'est bien une "histoire" que l'on veut montrer à nos concitoyens, celle de l'Algérie de la fin de la Seconde Guerre mondiale à l'indépendance, mais une histoire qui, d'après ses historiens-avocats, s'est accommodée "d'inévitables raccourcis" et sans doute aussi des silences, dont il faudra mesurer les conséquences sur l'honnêteté du film et qui permettront de mieux apprécier ses enjeux, non point artistiques, mais idéologiques et politiques.

Bien à vous, très amicalement.

Daniel Lefeuvre, 24 mai 2010




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22 avril 2010

mort de Charles Fourniau

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décès de Charles Fourniau

 

Charles Fourniau est mort mercredi 21 avril 2010 au soir. Historien du Vietnam, il avait passé l'agrégation en 1949 et il est l'auteur d'une oeuvre abondante.

- cf. Répertoire des historien(ne)s du temps colonial

- cf. "Charles Fourniau se souvient" : Association d'amitié franco-vietnamienne (2008)

 

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18 mars 2009

conférence de Benjamin Stora

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29 mars 2009 : conférence

de Benjamin Stora

"Paris pendant la guerre d’Algérie"


Le cinéma à la Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration
Du 27 mars au 7 juillet 2009

À l’Auditorium de la Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration
(Paris-XIIè) -
5€ (plein tarif) – 3,5€ (tarif réduit)

«Quand tous les autres s’appellent Ali…»
En partenariat avec le Goethe Institut
Dans le cadre de l’exposition
"À chacun ses étrangers ? France-Allemagne, de 1871 à aujourd’hui"

(Jusqu’au 19 avril 2009) : Comment les étrangers sont-ils perçus en France, comme en Allemagne, de 1871 jusqu’à l’actualité la plus récente ? Que révèlent ces images de l’«Étranger» ?

Une sélection de films majeurs illustre la question des représentations de l’étranger dans les cinémas français et allemand, les week-ends du 17-18 janvier et du 27-28-29 mars.

Avec la participation exceptionnelle de Hanna Schygulla, le vendredi 27 mars.

Benjamin Stora, historien, présentera, le 29 mars, au cours d’une conférence : Paris pendant la guerre d’Algérie, en introduction du film ‘Elise ou la vraie vie’ de Michel Drach.

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Vendredi 27, samedi 28 et dimanche 29 mars :
Les années 1970, fragments d’un discours amoureux
§ Vendredi 27 mars, 20h : Soirée Carte blanche à Hanna Schygulla, en sa présence

Entrée libre sur réservation, dans la limite des places disponibles : spectacle@histoire-immigration.fr

Hanna Schygulla animera cette soirée autour de l'émigration et l'immigration en Allemagne. De courts films (qu'Hanna Schygulla a elle-même réalisés), et extraits de longs métrages auxquels elle a participé, illustreront cette rencontre ponctuée d'une lecture de ‘Qu'une tranche de pain’, première pièce de Rainer-Werner Fassbinder

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10 décembre 2007

Pourquoi les Vietnamiens n'ont-ils pas revendiqué des "excuses" ? (Pierre Brocheux)

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Pourquoi les Vietnamiens

n'ont-ils pas revendiqué des "excuses" ?

Pierre BROCHEUX

 

Plutôt qu'un commentaire hasardeux et confus posté par Pickwicks (qui semble bien être un colonialiste pur jus, en tous cas il en manie la rhétorique) qui fait appel à l'explication génético-psychologico-culturelle, je propose la suivante : les Vietnamiens (et non les Indochinois) ont battu l'armée française comme plus tard ils ont tenu en échec la superpuissance américaine : être vainqueur donne de l'assurance et évite de mariner dans la rancoeur pour finalement revendiquer des excuses et des réparations. Après le victoire de Dien Bien Phu sur le corps expéditionnaire français en 1954 (mais rappelons nous la victoire sur la RC4 en 1950), Ho chi Minh recommandait à Hoang Tung, responsable de la propagande et rédacteur en chef du Nhan Zan/ Le Peuple : "exaltez l'esprit de sacrifice et l'héroïsme de notre peuple et de nos combattants mais évitez d'humilier les Français, nous les avons battus, c'est bien et c'est tout". Dix ou douze ans plus tard, apprenant que pendant son absence les autorités de Hanoi avaient fait défiler les aviateurs américains prisonniers pour les livrer à la vindicte populaire, il demanda au même Hoang Tung "qui a pris cette décision imbécile?"...

Pierre Brocheux
maître de conférence honoraire, université Denis-Diderot, Paris VII

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- Hô Chi Minh, Presses de Sciences Po, 2000.

- Hô Chi Minh, du révolutionnaire à l'icône, Payot, 2003.

 

 

 

 

reponse aux fellaghas;pourquoi les indochinois victime du colonialisme sont depouiulle de tte vindicte

pourquoi la communaute vietnamienne n'intentent pas un procès contre la France à l'image des fellagas dans ce pays, la question vaut d'etre posee, car on fait comme si cela participait d'une evidence cette posture des arabes dans ce pays?

Parce que les mouvement nationaliste vietnamien n'aviat rien de democratique et que les sud vietnamiens installes dans le confort de l'armee americiane savainet exactment ce qui leur arriverait,ils ont ete capble d'une vision realiste des choses,les boat people sont venus chercher en france et en occident les libertes fondamentales,jamais l'immigration arabe n'a vu ds son derpart vers la france,un moment d'emancipation profondement contradictoire d'avec son histoire nationaliste Prquoi; parce que l'indigen a une mentalite d'indigene..infantile irresponsable, tjrs en contradiction, tjrs inarticulee et surtout iraationnelle et profondement nevrotique,cette incapcite de formaliser l'histoire sou une forme rationnelle c'est la marque de fabrique des mususlamns...

Posté par pickwicks, jeudi 6 décembre 2007 à 12:18

 

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"être vainqueur donne de l'assurance et évite de mariner
dans la rancoeur pour finalement revendiquer des excuses
et des réparations", Pierre Brocheux

 

Réaction édifiante

pickwicks, votre réponse est édifiante.

Je vous suis à peu près sur vos remarques sur le gouvernement du Viêtnam-Sud (encore que l'on pourrait se poser les mêmes questions sur la Corée du Sud, qui pourtant, bien que dans les mêmes conditions que vous décrivez, critique l'ancien colonisateur japonais), mais la suite sur "l'indigène", là ce n'est même plus du néo-colonialisme mais carrément du colonialisme tout court...

Posté par Arnaud Nanta, mardi 11 décembre 2007 à 14:39

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Arnaud Nanta - bio-biblio

- "Le Japon, victime ou agresseur" (2005)

 

 

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28 novembre 2007

Colonisation - évangélisation

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Colonisation - évangélisation

les relations entre les pouvoirs coloniaux,

les pouvoirs locaux et les missions :

des Grandes Découvertes à la décolonisation

 

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- colloque à la Sorbonne, les jeudi 13, vendredi 14 et samedi 15 décembre 2007

- programme colloque colonisation-évangélisation

 

Haut_Cameroun

 

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Jeudi 13 décembre 2007

Président de séance : Alain Tallon

9h00 Alain Tallon (Paris IV), Introduction

9h20 Luiz-Felipe de Alencastro (Paris IV), Colonisation – Évangélisation ou Civilisation – Évangélisation ?

9h45 Giovanni Pizzorusso (Chieti), Évangélisation des peuples et pouvoirs coloniaux : les initiatives de la Congrégation de la Propaganda Fide face aux États (XVIIe siècle).

10h10 débat

10H40 Benoit Pierre (Tours), Apostolat et affirmation de l’État sous le règne de Louis XIII : les missions capucines du père Joseph

11H00 Claude Prudhomme (Lyon II), Le rôle de Rome dans la conception et la régulation des relations entre pouvoirs coloniaux et autorités missionnaires catholiques.

11h30 débatC_te_d_Ivoire

12h00 déjeuner

14h00 Jean-François Zorn (Montpellier III), Internationalisme missionnaire et nationalisme colonial : la mission protestante de Paris au XIXe siècle.

14h30 James P. Daughton, (Stanford) The relationship of French and British missionaries to their respective imperial projects, c. 1880-1914.

15h00 débat

Président de séance : Jacques Frémeaux

15h30 Géraud Poumarède (Paris IV), La monarchie française et l’essor missionnaire en Méditerranée orientale dans la première moitié du XVIIe siècle.

16h00 Bernard Heyberger (Tours-EPHE), Pouvoirs et missions en Syrie à l’époque moderne.

16h30 débat

17h00 Daniel Lefeuvre (Paris VIII), La conquête religieuse de l’Algérie : les premières implantations catholiques, l’évangélisation et le prosélytisme.

17h30 Oissila Saaïdia (IUFM Strasbourg), Le dialogue interreligieux entre Oulémas et clercs en situation coloniale en Algérie.

18h00 débat

18h30 fin de la première journée


 

 

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Vendredi 14 décembre 2007

Président de séance : Jacques Frémeaux

9h00 Colette Zytnicki (Toulouse II), L’Alliance israélite universelle au Maroc : les "hussards noirs" juifs de la République en contexte précolonial et colonial (1862-1939).

9h30 Christophe Réveillard (Paris IV), Contradictions de la politique religieuse au temps des lois laïques entre métropole et Algérie.

10h30 Jérôme Bocquet (IUFM Orléans-Tours), Les missions à l’heure du nationalisme arabe : pouvoirs et allégeances au Proche-Orient (1925-1967).

11h00 débat

Président de séance : Déjanirah Couto (EPHE)

11h30 Alain Forest (Paris VII-Denis Diderot), Missions et expansion coloniale en Asie du Sud-Est entre les XVIIe et XIXe siècles.

12h00 Xavier Huetz de Lemps (Casa Velasquez), Pouvoirs et missions aux Philippines du XVIe au XIXe siècle.

12h30 débat

13h00 déjeuner

14h30 Ronnie Po-chia Hsia (Pennsylvanie), Les missionsp_re_L_on_Bourjade catholiques, les pouvoirs européens et l’Empire de Chine aux XVIe-XVIIIe siècles.

15h00 Nathalie Kouamé (INALCO), Missionnaires chrétiens et samurais, ou l’impossible colonisation du Japon pendant son "siècle chrétien" (1549-1640).

15h30 débat

16h00 Jacques Weber (Nantes), Les rapports entre les pouvoirs et les missions dans les établissements français de l’Inde de la Restauration au Second Empire.

16h30 Sarah Mohammed-Gaillard (INALCO), Administration coloniale, missionnaires et populations autochtones : alliances et conflits politico-religieux en Nouvelle-Calédonie.

17h00 débat

17h30 Jean-François Klein (INALCO), À l’origine du mythe du Yunnan. Missions catholiques en Chine méridionale et intérêts impériaux franco-britanniques au XIXe siècle.

18h00 Claire Tran Thi Liên (Paris VII-Denis Diderot), Les catholiques vietnamiens pendant la guerre d’indépendance (1945-1954). Entre la reconquête coloniale et la résistance communiste.

18h30 débat

19h00 fin de la deuxième journée


 

 

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Samedi 15 décembre 2007

Président de séance : Luiz-Felipe de Alencastro (Paris IV)

9h00 Philippe Evanno (Paris IV), Les pouvoirs locaux, les comptoirs et les missions de Dakar à Ouidah entre 1680 et 1797.

9h30 Laurick Zerbini (Lyon II), L’Afrique, une terre de mission pour Augustin Planque.

10h00 débat

10h30 Markus Roser (Église évangélique luthérienne de Saxe), Connections between powers and missions in the Royal domain of Congo.

11h00 Félix Iroko (Abomey-Calavi), Les missions, les esclaves affranchis revenus du Brésil et les différents pouvoirs.maison_m_re_Lavigerie

11h30 débat

12h00 déjeuner

Président de séance : Annie Moliné-Bertrand (Paris IV)

14h00 Charlotte de Castelnau (Paris X), Pouvoir et missions au Brésil à l’époque moderne.

14h30 Paolo Broggio (Roma Tre), Ordres missionnaires et politiques indigènes dans la Vice-Royauté du Pérou aux XVIe et XVIIe siècles.

15h00 débat

15h30 Karl-Heinz Arenz (Paris IV), Pouvoirs et missions jésuites en Amazonie au XVIIe siècle.

16h00 Dominique Deslandres (Montréal), "Les puissances", jésuites, sulpiciens et autorités coloniales en Nouvelle-France.

16h30 débat

17h00 Philippe Delisle (Lyon III), Les missionnaires catholiques, l’administration coloniale et la question du travail sur les plantations en Guyane française au XIXe siècle.

17h30 Nelly Schmidt, (Paris IV) et Oruno D. Lara, (Centre de Recherches Caraïbes-Amériques), Religion et colonisation en 1848-1852.

18h00 débat

18h30 Jacques Frémeaux (Paris IV) : conclusion

19h00 fin du colloque.

 

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26 octobre 2009

témoins de l'Indochine française

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avez-vous connu l'Indochine française?

appel à témoins


Dans le cadre du tournage de notre second film documentaire concernant l'Indochine (Paroles d'Anciens d'Indochine - La vie coloniale) nous recherchons des témoins ayant vécu en Indochine : Planteurs, administrateurs, commerçants, policiers, professeurs... d'origines indochinoise, française, africaine etc

Nos travaux sur l'Indochine ont pour impulsion l'amitié et la révolte. Amitié pour une région du monde fantastique et révolte pour la méconnaissance de notre histoire commune depuis le XVIIe siècle à 1954. Mené par Stéphane Boudy un professeur de philosophie, auteur et réalisateur, le point de vue de ces recherches se veut curieux, réfléchi et équilibré. Ce second film s'intègre dans le cadre d'une série de trois Paroles d'Anciens d'Indochine, le dernier ayant pour cadre le Laos, le Cambodge et le Vietnam.

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CONTACT: Etienne Weber 0630197583
www.compagniedubarrage.com

930428489
Indochine, film de Régis Warnier

La Compagnie du Barrage
www.compagniedubarrage.com
5, Place du Marché des Chartrons
33000 Bordeaux  France
Tel:  + 33 (0)5 56 44 30 11
mail: compagniedubarrage@yahoo.fr

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album d'images du chocolat Pupier, 1936

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27 novembre 2007

un regard réducteur et anachronique (Jean-Pierre Renaud)

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un regard réducteur et anachronique

sur le rôle

des officiers en Afrique coloniale

Jean-Pierre RENAUD

 

Cf. - "Les troupes de marine en Afrique à la fin du XXème siècle : le cas du Soudan français", Lieutenant Benjamin Leroy, Revue Historique des Armées, n° 247, année 2007

rha247Avant tout compte rendu de lecture et d’analyse, formulons une remarque préliminaire qui a son importance sur un tel sujet : la hardiesse d’interprétation dont fait preuve l’auteur de cet article, hardiesse qui fait plaisir de la part d’un représentant d’un monde militaire plus souvent formaté par la discipline et l’obligation de réserve. Mais il convient de voir si l’audace du propos trouve sa justification dans la solidité de l’analyse historique.

L’auteur examine rapidement la conquête du Haut-Sénégal, devenu le Soudan en 1886 [le Mali d'aujourd'hui], entre le commandement de Faidherbe, antérieur à 1870, et l’année 1894, date de l’occupation de Tombouctou. Une première réserve au sujet de l’affirmation : «Jusqu’en 1890, la France n’a pas de véritable politique coloniale, ni de perspective précise sur le long terme» (page 115). Pourquoi cette date de 1890 ? Aucune explication. Pour autant que la France ait jamais eu une politique coloniale...

 

 

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chemin de fer du Sénégal au Niger : un chef de section

Une description trop caricaturale du monde des officiers de l’infanterie et de l’artillerie de marine : «Portrait d’un marsouin de l’époque…» (p.116). «Les officiers de l’infanterie de marine sont, à cette époque et en règle générale, des hommes sortis parmi les derniers de Saint Cyr» (p. 117). «Combinant la soif d’aventures, de gloire, le nationalisme et la frustration née de la défaite, se dresse alors le portrait moyen d’un officier d’Afrique, d’un fanatique prêt à tout pour donner à la France un nouveau morceau de terre» (p. 118).

 

Le «régime du sabre (p.120)»…

«Ces coloniaux cherchent à agir comme ils l’entendent, sans en avoir à en référer à chaque instant à des supérieurs lointains ou à des civils incompétents. (p. 120)

Mais pour être efficaces, cela suppose le maintien sur place, non d’administrateurs étroitement contrôlés par le secrétariat des Colonies, mais d’officiers indépendants agissant comme de véritables despotes éclairés. La conception que les militaires se font du rôle de chef de la colonie est plus proche d’un Bonaparte Premier Consul que d’un préfet représentant le gouvernement. (p. 121)

Les relations entre administrateurs civils et militaires sont rarement bonnes, voire franchement mauvaises lors du renvoi d’Archinard

Ce mépris du civil et la prétention d’être seuls capables de juger des situations locales amènent ces hommes à la violation systématique des instructions reçues. Une attitude trop agressive risque cependant d’irriter le ministère, mais Faidherbe trouve la solution en camouflant des campagnes en mesures de sécurité, et en faisant vibrer la vieille corde française de la souveraineté territoriale. Il inaugure ainsi une tradition d’indiscipline et d’hypocrisie, où il garde toujours quelque mesure, mais qui fera remarquablement école parmi les commandants supérieurs

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Tombouctou : une compagnie de tirailleurs dans la brousse

 

Appréciations anachroniques

J’ai envie de dire à l’auteur de ces lignes : pourquoi autant d’appréciations anachroniques et d’affirmations péremptoires ?

Première remarque, l’auteur reprend à son compte la fable des derniers de Saint Cyr, mais aurait-il connaissance d’une étude sérieuse qui aurait été faite à ce sujet, notamment à l’initiative des autorités militaires ? Il faudrait qu’il cite sa source. Qui n’existe pas d’après moi, et aux témoignages d’une excellente historienne de ce domaine de l’histoire militaire et d’un colonel féru de l’histoire de son arme.

Et comment ne pas rappeler également que plusieurs des officiers qui se sont illustrés dans les campagnes évoquées n’étaient pas des cyrards, mais d’anciens polytechniciens, Faidherbe [ci-contre], Borgnis-Desbordes, Archinard, Joffre…, et queFAIDHERB d’autres officiers, appartenant eux, à la Marine Nationale, s’illustrèrent également en positif ou en négatif sur les fleuves Sénégal ou Niger.

Et que beaucoup d’entre eux, les plus jeunes, s’ils furent les derniers de Saint Cyr, affirmation non encore démontrée, s’illustrèrent dans de grands commandements au cours de la première guerre mondiale.

Deuxième remarque, la citation de la page 118 est très proche de la description de Person (p. 364), écrivant lui-même : «Si nous y ajoutons la frustration de 1870, nous aurons le portrait moyen d’un officier d’Afrique, d’un "fana", comme on disait, prêt à tout pour donner à la France un nouveau morceau de terre

Si l’auteur avait beaucoup fréquenté les livres de ces officiers, il n’aurait pas pu se livrer à une telle caricature, et s’il connaissait un peu mieux ce pan de notre histoire coloniale, il ne lui aurait pas été possible de commettre autant d’erreurs.

Car la plupart de ces officiers n’étaient pas les «fanatiques» décrits par l’auteur : ils savaient souvent écrire et bien, dessiner, étudier minutieusement les mœurs des populations locales, apprendre et parler leur langue. Ils n’étaient pas des «despotes», même éclairés. Péroz que cite l’auteur pour illustrer le rôle des officiers dans la politique coloniale, a procédé à beaucoup d’analyses, encore utiles, sur la géographie, l’histoire, les institutions des royaumes et empires du Haut-Sénégal et du bassin du Niger. Il s’est en particulier illustré par sa description très complète de l’Empire de Samory Outre le fait qu’il parlait plusieurs langues du pays !

 

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école des enfants de troupe des Tirailleurs indigènes

 

La description faite de l’attitude de ces officiers à l’égard des indigènes est un peu expéditive : elle ne tient compte, ni des situations stratégiques de conquête, ni de la réalité de la politique indigène concrète de ces officiers. Paternalisme envers les indigènes, sûrement, mépris radical pour les valeurs africaines, considérées comme barbares, certainement pas, si l’auteur avait eu une meilleure connaissance des récits de ces officiers, en citant au choix, Gallieni, Péroz déjà évoqué, Binger, Monteil, Toutée…car leur liste est longue, pour ne parler que de l’Afrique de l’Ouest.

Approximation également des propos que l’auteur tient à la page 118 : «Dans la politique coloniale menéef_tiche_bambara par les officiers des troupes de marine, il est une constante : celle du soutien quasi-systématique apporté aux fétichistes (animistes) [ci-contre : fétiche bambara],… son action est donc marquée par une profonde hostilité à l’Islam politique.»

Un jugement qui ne tient aucun compte du contexte militaire et politique du Haut-Sénégal de l’époque, les deux empires d’Ahmadou et de Samory, s’étant édifiés et continuant à s’édifier, avec des moyens qui n’avaient rien d’angélique, notamment celui de Samory, aux dépens des royaumes animistes, peuls, malinkés, ou bambaras du bassin du Niger.

Ce qui est vrai, c’est que la politique française a beaucoup tergiversé entre un accord avec les deux almamys musulmans, principaux chefs d’empire, Ahamadou et Samory et leur soumission, mais la responsabilité des gouvernements  de l’époque est à mettre en cause, peut-être plus que celle des officiers, très souvent, laissés à eux-mêmes, dans une colonie qui ne coûtait pas beaucoup à la France, sauf en morts de soldats, et qui n’intéressait pas grand monde à Paris.

Il convient de rappeler à ce sujet que Péroz a accompagné à Paris, en 1886, l’un des nombreux fils de Samory, Karamoko pour qu’il fasse connaissance avec la France, le monde moderne de l’époque, et qu’il puisse en faire témoignage à son père.

En résumé, un regard réducteur et trop souvent anachronique sur cette époque et sur le rôle des officiers.

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Soudan français (Mali), poste de Bamba

 

Troisième remarque : comment est-il possible qu’un officier puisse, en 2007, faire l’impasse sur le contexte historique de l’époque ? Mais il n’y avait pas d’administrateurs civils, et les officiers étaient les seuls à pouvoir, techniquement, exercer des commandements territoriaux. Il ne faut donc pas appeler Bonaparte et les Préfets en renfort. L’Ecole Coloniale n’existait pas encore, et elle mit beaucoup de temps pour pouvoir fournir les cadres civils nécessaires aux nouvelles colonies, qui ne s’appelaient d’ailleurs pas des administrateurs civils.

 

Le cas du docteur Colin (p. 122)

L’auteur fait un sort au cas du docteur Colin, lequel illustrerait les relations difficiles qu’entretiendraient les officiers avec les civils, épisode que l’historien Henri Brunschwig a analysé dans son livre Le Partage de l’Afrique noire.

Le docteur Colin était avant tout un chercheur d’or attiré par l’or du Bambouk et du Bouré, et s’il est vrai qu’un ministre lui donna une lettre de mission pour se rendre au Soudan, y faire ses prospections, et même y signer des traités, il faut replacer l’affaire dans son contexte historique : les troupes françaises, peu nombreuses, venaient à peine d’atteindre le Niger, à Bamako. Rien n’était encore acquis sur le plan des communications et de la sécurité de la région, et la venue d’un chercheur d’or était tout à fait prématurée, et sans doute inopportune, compte tenu de son objet. Ceci dit, le docteur Colin, selon les années, et les titulaires du commandement supérieur, fut découragé ou aidé, par exemple par Gallieni.

Je serais tenté de dire à propos de l’exemple choisi : caractère anodin.


Le «régime du sabre»
(p. 120) et la politique du fait accompli

Question sur le sous-titre «régime du sabre» : s’agit-il d’une référence à un des livres du député Vigné d’Octon ? Lequel, à la fin du XIXe siècle, s’attacha à dénoncer les exactions coloniales les plus criantes ?

Venons en à présent au discours que l’auteur tient sur la politique du fait accompli des officiers, discours assez classique, qui tient rarement compte de la réalité historique et des conditions d’exercice du commandement dans des contrées lointaines, mal reliées à la chaîne de commandement du pouvoir politique.

Je signale d’ailleurs au lecteur que les recherches historiques que j’ai13108772_p effectuées sur la période des conquêtes coloniales des années 1870-1900 sont parties de la même idée, celle d’après laquelle le concept du fait accompli expliquait une grande partie de ces conquêtes, ce qui n’est pas vrai, comme je l’ai démontré dans mon livre [ci-contre]. (1)

Ce n’est pas vrai au Soudan pour la période 1880-1888. À partir de 1888, Archinard exerça effectivement un pouvoir de proconsul, mais avec la complicité du pouvoir politique, et la ratification de ses initiatives par le gouvernement, qu’il s’agisse de la prise de Koundian, de Kankan, de Ségou, ou de Djenné. Il a fallu cinq ans à ses amis et soutiens politiques à Paris, donc complices, pour sanctionner ses multiples faits accomplis.

En ce qui concerne la prise de Mourgoula en 1882, nous renvoyons le lecteur à l’article que j’ai publié sur le blog «Etudes coloniales», intitulé «Un cas d’école au carré de l’histoire coloniale», car son classement en fait accompli n’est ni assuré, ni significatif dans les opérations de conquête du Soudan.

Il conviendrait d’ailleurs de noter que les officiers de marine sur les canonnières du Niger se sont également illustrés par leur indiscipline, renouant ainsi avec une voie largement ouverte par le fait accompli des amiraux, de La Grandière en Cochinchine, en 1867, puis Dupré au Tonkin, en 1873, et bien avant eux, en 1849,  Dupetit-Thouars à Tahiti.

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Tombouctou, le nouveau marché et le poste de police

L’auteur ne fait mention que du cas Boiteux, à Tombouctou. Leur indiscipline, qu’il faut toujours replacer dans son contexte historique et dans une déontologie du commandement, dépassa peut être celle des fantassins et des artilleurs. Celui de Tombouctou eut pour conclusion un des plus grands désastres humains de cette conquête.

Quatre officiers de marine, Davoust, Jaime, Hourst et Boiteux ont fait preuve d’indiscipline au cours de la période examinée, particulièrement Jaime en 1889, et Boiteux en 1893. Le mythe de Tombouctou fonctionnait à plein pour tous les officiers coloniaux, qu’ils soient fantassins, artilleurs, ou marins, mais bien au-delà des coloniaux.

bonnierLe cas de Boiteux, à la fin de 1893, est sans doute le plus emblématique, compte tenu de sa responsabilité indirecte dans la catastrophe de Tacoubao, qui, en janvier 1894, a entraîné la mort de 77 militaires, dont 11 officiers. Mais les responsabilités d’Archinard et de Bonnier [ci-contre - source] ne peuvent être écartées, compte tenu de l’ambiguïté de leurs instructions, et plus haut celles des gouvernements qui n’ont jamais donné d’instructions claires.

Outre le fait que les ministres changeaient tous les six mois ! Et que le plus souvent ils ignoraient tout de la réalité des contrées qu’on leur proposait de conquérir !

Les exemples cités pour illustrer «la violation systématique des instructions reçues» (p.123) ont un rapport limité et faible avec la réalité de la conquête militaire du Soudan. Ils ne servent que faiblement la démonstration de la thèse avancée par l’auteur.

Conclusion de notre lecture et de notre analyse du contenu, dans la forme et le fond de cet article : un survol rapide du cas du Soudan avec des observations et formulations qui sont le plus souvent dénuées de nuances dans la forme et dans le fond.

Une analyse à coups de sabre, avec la reprise des thèses développées par les historiens Yves Person [1925-1982] et Alexander Sydney Kanya-Forstner [The Conquest of Western Sudan, a study in French Militaria Imperialism, 1969, Cambridge Univ. Press], d’après lesquelles le Soudan aurait été conquis par une clique d’officiers, adeptes du fait accompli, thèses qui sont loin d’être démontrées selon les périodes examinées, et compte tenu du fonctionnement concret de la chaîne de commandement militaire et politique, avec au gouvernement des ministres qui ne prenaient pas leurs responsabilités entre 1888 et 1893. La période Faidherbe mériterait une analyse différente, compte tenu de l’époque et de la nature du pouvoir politique.

L’historien Yves Person a produit, après Péroz, une véritable somme sur Samory180px_Almamy_Samory_Tour_ [ci-contre], et il a eu le mérite de rechercher toutes les sources possibles de la tradition orale, mais on peut regretter, qu’en tant qu’historien, il ait laissé souvent courir sa plume, avec une analyse de ce qui pouvait se passer dans les têtes, et en prêtant donc des intentions, souvent orientées, aux officiers dont il a analysé l’action et les responsabilités. Quant à l’historien A.S. Kanya Forstner, dont les analyses sont souvent rigoureuses et acérées, il est possible de lui reprocher peut être sa connaissance incomplète du fonctionnement concret des colonnes et de la relation qu’elles pouvaient entretenir avec le pouvoir militaire ou politique.

Ce que l’on peut dire de façon plus modérée, comme l’a noté le grand historien Henri Brunschwig pour l’Algérie, qui appartint à la Guerre, comme la Cochinchine à la Marine, c’est que le Soudan appartint alors à l’Infanterie et à l’Artillerie de Marine, ainsi qu’aux canonnières de la marine du Niger.

Mais plus grave de la part d’un officier, une méconnaissance complète du terrain, de l’époque, des conditions concrètes du commandement, et de la relation inévitablement conflictuelle qu’entretenait ces officiers coloniaux avec le devoir d’obéissance et la liberté de commandement, problème qui conserve son actualité dans les armées modernes.

Jean-Pierre Renaud

(1)  Le vent des mots, le vent des maux, le vent du large, Jean Pierre Renaud, éditions JPR 2006.

- de Jean-Pierre Renaud, sur Études Coloniales : la parabole de la Propagande coloniale

 

 

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mosquée de Djenné (Mali)

 

 

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19 mai 2009

colonisation et "judiciarisation" de l'Afrique

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palais de justice de Bobo-Dioulasso (Haute-Volta)



les prémices de la justice contemporaine

en Afrique noire

les coutumiers d’Afrique noire francophone à l’épreuve du modèle juridique français

Bernardo-Casmiro DO REGO

La justice se rendait autrefois, en Afrique noire, selon la coutume. La colonisation a donné lieu à rédaction des coutumiers à l’aune du modèle juridique français. Une évolution fondamentale.

Si le XVIIIe siècle européen est qualifié de siècle des lumières, c’est à bon droit que nous pouvons affirmer le XVIIIe siècle africain de siècle des résistances. En effet, les colons ayant pénétré l’Afrique noire dès les XVIe et XVIIe siècle entamèrent un vaste chantier de conquête aux XVIIIe et XIXe siècles. Les monarchies africaines, défenseurs de leurs terres perdirent à tour de rôle leur sceptre, laissant ainsi la mère Afrique à des inconnus venus d’outre-mer : la colonisation est née.

Cette dernière est décriée comme première cause du retard du monde noir ; mais n’a-t-elle eu que des conséquences négatives sur le vieux continent. Sans doute pas. Au-delà de la civilisation du monde noir, il importe également de préciser que la colonisation inscrivit l’Afrique dans l’histoire des peuples. Les sociétés primitives africaines dont il ne reste aujourd’hui quasiment point d’écrits doivent leur trace à ce qui en a été inscrit dans les archives ou les récits de la colonisation. Il n’est point dessein pour nous de faire ici l’apologie de la colonisation, ni de dénier l’exploitation de l’Afrique sous la colonisation.

Notre objectif est de rappeler l’impact de la colonisation dans l’étatisation du continent, ou du moins l’impact de la colonisation dans la «judiciarisation» du continent. En effet, pour asseoir leur autorité, il a fallu réformer les colonies. La France avait donc regroupé ces colonies dans de vastes ensembles territoriaux : l’Afrique Occidentale Française (AOF) et l’Afrique Equatoriale Française (AEF). Confrontée à des incompréhensions, une justice divine (plutôt fétichiste) et arbitraire, la première étape de la réorganisation de ces ensembles fut l’identification des colonies à la métropole.

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Comment concilier une société traditionnelle, animiste ou islamique, avec une autre plus moderne et christianisée. La réponse fut semble-t-il de comprendre comment fonctionne chacune des colonies et d’essayer d’assurer une unité en leur sein. Était-ce en réalité cet esprit qui anima le colon ? Dieu le sait, nous ne le savons ; néanmoins tout laisse croire que cet esprit préfigura l’idée de rédaction des coutumiers qui commença à germer dans les esprits des colons.

Cette idée ne tarda pas à éclore : une circulaire AP du 19 Mars 1931 ordonne la rédaction des coutumiers. Les travaux débutent dans chaque colonie pour le recensement des coutumes. Nous avions dans un article, paru il y a peu, décrit le coutumier du Dahomey. Nous ne reprendrons pas cette description ici mais nous nous contenterons d’analyser l’idée d’une rédaction des coutumiers à l’aune du modèle juridique français. En effet, il s’agit ici de relever des généralités ayant motivé les colons et ayant commandé une mise au point des coutumiers dans les territoires conquis. En réalité, dans l’attente d’une prochaine publication d’une compilation des plus grands coutumiers d’Afrique noire francophone, nous avions jugé utile de vous noter ces traits majeurs. Avant toute chose, il convient de rappeler la notion de coutume.

Concilier les règles françaises et règles africaines

La coutume est un ensemble de pratiques répétées et spontanées d’un territoire donné suivies sur une longue période et s’imposant à la population qui l’accepte et l’érige en norme. M. Gillesen, spécialiste de la question dira que c’est «un ensemble d’usages d’ordre juridique qui ont acquis force obligatoire dans un groupe sociopolitique donné, par la répétition d’actes publics et paisibles pendant un laps de temps relativement long».

Un coutumier peut donc être conçu de deux façons différentes : soit par recueil, soit par compilation. La deuxième hypothèse est celle retenue dans le cadre de l’Afrique noire francophone. En réalité, la plupart des coutumes africaines peu importe les territoires et les régions étaient constituées de règles abstraites gouvernées la plupart du temps par des considérations animistes, qui mieux est, vodouïstes. Ces règles furent jugées sauvages par les Occidentaux déjà clonés aux règles des droits de l’Homme.

La principale préoccupation fut d’épurer ces pratiques afin de les dépouiller des superstitions dont elles étaient jugées colorées. Précisons néanmoins que l’objectif était de doter ces territoires de règles qui leur seraient imposées, c’est-à-dire une façon pour les Occidentaux d’affirmer leur suprématie et d’asseoir leur puissance. Pour mieux adoucir l’imposition, la mise en place de coutumiers censés reprendre les us et coutumes de ces territoires sera le perron qui offre l’assentiment des indigènes.

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En revanche, il faut remarquer que la diversité des cultures, ethnies, langues rendait la justice impraticable avant la colonisation et l’arbitraire s’érigeait en maître mot ; aussi, faut il ajouter qu’à partir du processus de colonisation, des tribunaux français furent installés dans les colonies et ceux-ci devaient concilier les règles françaises et les règles indigènes ou requérir dans d’autres cas auprès des dignitaires locaux la répression de telle ou telle autre coutume à l’égard d’un délit ou d’un crime ; ce qui implique une insécurité juridique.

À mille lieux du berceau de l’humanité, la France vivait au XVIIIe s. une révolution intellectuelle. La raison est apparue comme guide de la pensée humaine, rejetant aux calendes grecques toute explication du monde par la foi ou la religion. La France traverse un siècle des lumières avec une intelligentsia inspirée. Plusieurs codes ont été édités dès 1800 : le code civil en 1804, le code de procédure civile en 1806, le code de commerce en 1807 et le code pénal en 1810. Le système judiciaire français à l’heure coloniale était donc très organisé et très structuré. Il revenait impérieux aux colons de réorganiser le système judiciaire au sein des colonies, en le calquant sur le système de la métropole.

En finir avec l’atrocité, les tortures et les actes de barbaries qui existaient dans les territoires était une première façon d’expliquer l’évolution. Sans rejeter ce dernier motif, on pourra relever trois autres raisons principales qui justifiaient la démarche coloniale. La première est la cause efficiente : l’établissement d’une loi écrite qui servira de base à tous les tribunaux. La deuxième est la vision de chacun des territoires comme un tout. La troisième est l’affirmation de l’autorité française. Les français cherchaient à s’imposer avec le moins de heurts possibles, de manière à éviter toute rébellion tout en anéantissant les dernières institutions royales qui pouvaient encore exister. À cette dernière raison s’ajoute l’idée de faire intégrer les territoires dans un ensemble d’espaces coloniaux, l’Afrique française.

En conclusion, on ne saurait renier que l’idée de la rédaction des coutumiers se veut une conciliation des besoins de la colonie avec ceux de la puissance colonisatrice. Car en réalité, si les colons cherchaient à imposer leur mœurs, l’Afrique a trouvé dans cette imposition française une sécurité juridique créant ainsi le fondement de sa justice et de son droit.

source : Afrik.com
mardi 19 mai 2009

- le blog de Bernardo-Casmiro do REGO, juriste en droit privé et en histoire du droit

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le "tribunal des races" à Yaoundé (Cameroun), 25 juin 1951 (source)

 

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7 octobre 2007

Changer le regard sur l'immigration (Jacques Toubon)

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Changer le regard sur l'immigration

Jacques TOUBON

ancien ministre et président de la Cité nationale de l'immigration

 

 

Le Monde, 6 octobre 2007

Conçue sous la gauche, décidée par Jacques Chirac, la Cité nationale de l'histoire de l'immigration ouvre enfin ses portes. Comment expliquer que ce projet ait mis tant de temps à se concrétiser et ait été finalement réalisé par la droite ?
28198Jacques Toubon
- Entre le moment où la décision de créer la Cité a été prise - au début du quinquennat de Jacques Chirac -, et celui de son ouverture, il s'est seulement déroulé quatre ans et demi. Une période relativement courte, finalement, pour une institution inédite. C'est la maturation de l'idée qui a été longue : lancée il y a vingt ans par des historiens et des militants, elle a effectivement connu un sort indifférent pendant les années 1980-1990.

 


il y a encore à gauche une confusion entre esclavage,

colonisation et immigration

Durant toute cette période, l'accent était davantage mis sur la différenciation, le droit à la différence, que sur la démarche d'intégration, qui caractérise le modèle français. Le meilleur exemple est la proposition faite par Lionel Jospin, ministre de l'éducation, de développer un enseignement des langues d'origine. Cette idée était intellectuellement contraire à celle de raconter une histoire de la France reconnaissant la place déterminante de l'immigration dans la construction collective. C'est à partir de la campagne présidentielle de 2002 et la réélection de Jacques Chirac que l'intégration a été remise à l'honneur, sur l'idée que l'immigration était un phénomène durable et incontournable, qu'il fallait travailler sur l'intégration de ceux qui arrivent comme de ceux qui sont déjà là, que notre société était une société de diversité, et que cette diversité devait être prise en compte sans que notre modèle d'intégration, universaliste et égalitaire, ne soit remis en cause.
La gauche, si elle avait été au pouvoir, aurait-elle mené à bien ce projet ? Je n'en suis pas si sûr. Car il y a encore à gauche une confusion entre esclavage, colonisation et immigration. Et cette confusion est un obstacle à la réalisation d'un tel projet.

Ce projet est-il encore porté, soutenu par le pouvoir actuel ? Le jour de son ouverture, la Cité ne sera pas officiellement inaugurée, ni par Nicolas Sarkozy ni par le ministre de l'immigration, Brice Hortefeux.
Jacques Toubon
- Ma préoccupation, ma priorité est d'ouvrir la Cité, de la faire vivre. En faire un événement20040820_interv_toubon_1 politique m'importe peu. Mon souhait est que la Cité accrédite son propre message et qu'on ne lui en impose pas un. L'histoire a une force en elle-même qu'il faut absolument protéger. Ce faisant, quelle que soit l'apparence du discours politique aujourd'hui, je ne pense pas qu'ait disparu cette idée que la France est une société de diversité. Il est certain que le discours actuel insiste davantage sur l'idée de fermeture que sur celle d'ouverture. À entendre Nicolas Sarkozy devant les Nations unies, il semble néanmoins qu'il y ait davantage une continuité qu'une rupture avec les années Chirac, sur tous ces sujets concernant les valeurs fondamentales. En tout cas, depuis l'installation du nouveau gouvernement, je n'ai rencontré aucune difficulté, ni explicitement ni implicitement.

N'est-il cependant pas surprenant que l'Institut d'études sur l'immigration et l'intégration soit créé au sein du Haut Conseil à l'intégration au moment où on lance la Cité ?
Jacques Toubon - Ce n'est pas très judicieux. Mais cela ne change en rien notre vocation et notre message. 01_salla_dioramaLa Cité travaille sur une matière beaucoup plus précise : les faits historiques. Ce nouvel institut a, lui, plus vocation, pour ce que j'en sais, à travailler sur la philosophie et les idées.

N'y a-t-il pas contradiction entre l'ouverture de ce musée, qui signe la reconnaissance de l'apport de l'immigration dans l'histoire, et la politique actuelle, qui semble davantage stigmatiser l'immigré qu'en souligner l'apport ?
Jacques Toubon - Très franchement, non. Je ne crois pas que la politique de Nicolas Sarkozy et de ce gouvernement rompe avec les principes républicains, en particulier avec le principe d'intégration. L'identité française qui est aujourd'hui mise en avant est une identité non pas essentielle, mais une identité construite. L'identité que nous présentons à la Cité est celle d'une France, d'une civilisation qui a fait son miel de cultures, de religions, de modes de vie différents, et ce depuis au moins deux siècles. Ainsi, je ne pense pas du tout que notre projet soit mis en cause par la mise en avant de l'identité française. C'est en ce sens que j'ai toujours dit aux historiens travaillant avec moi qu'il ne fallait pas s'arrêter aux mots.

Leur démission au printemps pour dénoncer l'amalgame entre immigration et identité nationale vous a-t-elle surpris ?
Jacques Toubon - Je comprends que l'on puisse réagir à la conjonction, au "choc" des mots immigration et identité nationale. Car cette collision peut effectivement faire référence à des périodes historiques et à des idéologies d'exclusion. Leur réaction s'explique, mais elle est politique. La meilleure réponse qui soit à cette collision des mots, c'est la Cité elle-même, car elle repose sur un ensemble de faits historiques,item_img_big_817_fr_chantier_2 scientifiques. La Cité apporte au débat, mais elle n'est pas dans le débat politique.

Ce qu'elle symbolise n'est-il pas toutefois contradictoire avec le souhait du chef de l'État d'instaurer des quotas d'entrées par nationalité ?
Jacques Toubon - Je ne crois pas. Je ne récuse pas, sur le principe, l'idée de contingents professionnels et régionaux. Je préfère le terme de contingent à celui de quotas, qui sous-tend une idée de proportion. Simplement, une telle politique ne peut être conçue et conduite au niveau d'un seul État. La construction d'une politique européenne de l'immigration légale sera un des thèmes de la future présidence française de l'Union européenne. Dans ce cadre-là, au regard des besoins professionnels, mais aussi à l'aune des relations qu'entretient l'Europe avec telle ou telle région du monde, pourraient être définis des contingents, comme le fait le Canada de manière ouverte et démocratique.

N'est-il pas de la responsabilité d'organisations comme l'Union européenne de définir à l'échelle d'un continent ses relations avec le monde, de se comporter en acteur de la mondialisation ? Organiser les flux migratoires, c'est reprendre en main son propre sort. En matière d'immigration aussi, l'Europe doit être acteur. J'ajoute que travailler dans une telle perspective permet de restituer les mouvements migratoires, de voir par exemple que le mouvement de migrants entre l'Afrique du Nord et l'Europe est bien moindre que celui existant entre le Mexique et les Etats-Unis.

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Que pensez-vous de l'idée de recourir à des tests ADN pour les candidats au regroupement familial ?
Jacques Toubon - Mieux vaudrait en discuter dans un débat sur la bioéthique que lorsque l'on parle d'immigration. Mais il est incontestable qu'aujourd'hui faire famille ne signifie pas simplement engendrer. Et, au-delà des principes, il ne faudrait pas que cela devienne une condition supplémentaire au regroupement familial, supplémentaire et discriminatoire. Une telle disposition pourrait être censurée par le Conseil constitutionnel, non pas tant pour des questions de principe, car après tout juridiquement il est toujours possible d'étendre l'article 16 du code civil, mais parce que cela apparaîtra comme une entrave au regroupement familial, non conforme aux principes définis en 1979 par le Conseil d'État.

Établissement public, la Cité ne risque-t-elle pas de livrer une lecture partielle de l'histoire de l'immigration ?
Jacques Toubon - Non, parce que nous sommes partis du travail des historiens. Tous les textes sont de leur plume. Et autant, sur l'histoire de la colonisation, des divergences existent, autant, sur l'histoire de l'immigration, les chercheurs s'accordent sur l'essentiel. La Cité est une institution culturelle éducative scientifique et civique, au sens où son rôle est d'éveiller la conscience politique des gens. Non par un discours politique mais par la connaissance.
La mission de la Cité est de changer le regard sur l'immigration, d'en faire une question rationnelle et non plus fantasmatique. La question de l'immigration sera toujours débattue mais nous avons besoin d'un débat plus serein.

Que peut être cependant un musée sur l'histoire de l'immigration sans le fleuron des universitaires spécialistes du sujet ?
525895584_102d60fd66Jacques Toubon - Il ne faut pas se leurrer. D'un côté, les historiens mènent l'action en tant que citoyens et ils en ont le droit. Et de l'autre, ils continuent à travailler avec nous. Ils sont à la base de toutes les activités de la Cité. La Cité travaille et continuera à travailler avec le fleuron des universitaires. D'autant qu'à partir de ce fleuron, une des missions de la Cité est d'essaimer, de susciter des initiatives de collectivités locales, de jeunes chercheurs, d'associations, et de leur donner du sens. L'exposition permanente que nous ouvrons le 10 octobre n'est qu'une goutte d'eau au regard du travail qu'il y a à faire, notamment auprès des millions d'élèves et d'étudiants.

Vous êtes-vous inspiré des autres musées du même type existant dans le monde, comme celui d'Ellis Island à New York ?
Jacques Toubon - De mes visites d'Ellis Island ou du Musée de la civilisation à Québec, pour ne citer qu'eux,20040820_interv_toubon_1 j'ai tiré des enseignements sur la scénographie, la muséographie, et notamment l'importance de l'audiovisuel. Ce qui m'a paru essentiel, c'est l'idée de faire du visiteur un "fréquenteur". Des lieux de ce type ne sont pas simplement des musées que l'on visite pour voir des choses, mais ce sont des lieux utiles, répondant à une demande, à un besoin. Des lieux où l'on revient, comme on "fréquente" le café du coin.

Ancien ministre, Jacques Toubon est président
de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration
- propos recueillis par Laetitia Van Eeckhout

 

 

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- sur la photo de groupe ci-dessus, de gauche à droite : Vincent Viet, Nancy Green, Patrick Weil, Gérard Noiriel, Janine Ponty

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7 mai 2009

lecture de : L'Europe face à son passé colonial

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à propos du livre

L’Europe face à son passé colonial

Jean-Pierre RENAUD

 

Livre intéressant et utile, mais livre déroutant. Le plan annoncé dans l’introduction n’est pas facile à suivre dans le corps de l’ouvrage. Est-ce dû à la difficulté que rencontrent certains universitaires à respecter une discipline intellectuelle commune ? Toujours la liberté universitaire ?

Il est en effet difficile de s’y retrouver dans l’articulation chronologique et conceptuelle des contributions.

L’introduction annonce trois lignes d’éléments utiles à la compréhension de la relation histoire et mémoire, au cours de la période post-coloniale :

- les processus repérables ;

- les phénomènes mémoriels repérables ;

- le domaine propre de l’historiographie.

Le lecteur attendait de pouvoir suivre l’examen de ces thèmes à partir d’une grille historique partagée, c’est-à-dire chronologique, ce qui n’est pas le cas.

Autre remarque, et compte tenu du titre, pourquoi avoir inclus dans l’ouvrage des pays non européens, le Japon, Haïti, et le Québec ? En ce qui concerne ce dernier pays, l’argument de transversalité opère effectivement, mais sur un autre plan.


l'histoire perdrait-elle son combat avec la mémoire ?


Il n’empêche que la juxtaposition des contributions décrit bien la problématique de la relation mémoire/histoire, problématique dynamisée par l’immigration, et manipulée par des politiques, des intellectuels, et quelquefois par des historiens.

À lire ces contributions, on en retire l’impression que l’histoire perd actuellement son combat avec la mémoire, mais une mémoire rarement définie, identifiée, et mesurée.

On voit bien, au cours de la lecture de ce livre, que l’histoire coloniale est oubliée dans la plupart des pays, alors que des groupes de pression surfent sur une mémoire coloniale sélective manipulée à l’avantage des thèses qu’ils défendent.

Et le livre apporte beaucoup d’informations sur le passé colonial des autres pays européens, souvent mal connu, même de la part d’esprits curieux.

La contribution relative aux soldats africains est intéressante pour un Français, car elle illustre parfaitement la problématique mémoire/histoire, ravivée par le film Indigènes. Elle replace leur concours sur un terrain historique et tord le coup à un certain nombre d’affabulations mémorielles. À chacun ses indigènes, comme l’écrit un des auteurs.

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(source Caom)

Je suis beaucoup plus hésitant sur tout ce qui touche à l’Algérie, tant il parait difficile encore de dissocier histoire et mémoire, compte tenu de l’importance des remontées permanentes de mémoire, manipulées ou non. La population d’origine algérienne, française d’origine ou non, a beaucoup de poids en France.

Un auteur évoque «une explosion mondiale des mémoires» (p. 144). Un autre auteur écrit : «La mémoire coloniale constitue depuis plusieurs années un sujet primordial dans le débat public français» (p. 219) Est-ce si sûr. Quelle mesure statistique  peut-il donner à cette affirmation ?

Un troisième auteur parle de «la mentalité collective» (p. 91). Il serait intéressant qu’il nous en donne, également, définition précise et bonne mesure statistique.

Mentalité collective, mémoire collective, stéréotypes, inconscient collectif, quelques uns des mots souvent utilisés par les mémorialistes coloniaux, et que l’on trouve aussi dans certaines contributions. Les historiens seraient bien inspirés de tenter de donner un contenu scientifique à ces mots, pour autant que cela soit possible.

Gaz en Éthiopie, extermination de populations en Afrique du Sud et dans le Sud Ouest Africain, colonisation française et belge comparée, guerre d’Algérie, Haïti, Japon, Québec, etc … sujets tellement variés en thématique et en chronologie, qu’il était difficile de mener complètement une analyse transversale et chronologique  de la problématique décrite.

Mais le compte des informations et des réflexions y est, d’autant plus qu’en conclusion du débat entre histoire et mémoire, qui nourrit tout le livre, Daniel Lefeuvre propose une mise en garde méthodologique salutaire, en préconisant un «retour sur quelques règles de la science historique», en bonne filiation de grands historiens reconnus pour leur rigueur scientifique, un Marc Bloch par exemple, ou dans le domaine de l’histoire coloniale, un Henri Brunschwig.

Jean-Pierre Renaud

 

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présentation du livre

La colonisation a-t-elle eu un "caractère positif" ou a-t-elle été facteur d'une exploitation et d'une domination féroces des peuples et des territoires colonisés ? Faut-il la traiter comme une page d'histoire parmi d'autres ou bien l'expier comme un péché, qui entache la France depuis plus d'un siècle ?

Loin d'être un objet froid de la recherche historique, le passé colonial nourrit aujourd'hui dans l'hexagone une véritable guerre des mémoires.

Depuis la loi du 23 février 2005 et son article 4, le débat fait rage autour de ces questions. Ces débats sont-ils uniquement franco-français ? Il suffit de porter le regard au-delà de nos frontières pour se convaincre du contraire. Au nom du gouvernement italien, Silvio Berlusconi ne vient-il pas de faire officiellement acte de repentance pour la colonisation de la Libye ? Ce livre le montre, toutes les anciennes puissances coloniales, sont confrontées à ce passé, le Japon ne faisant pas exception.

Comme d'ailleurs les sociétés anciennement colonisées. Cette approche comparative permet donc de mieux saisir ce qui, dans les débats sur ce passé, est spécifique à notre pays et ce qui relève d'un passé partagé des puissances impériales.

- L'Europe face à son passé colonial, dir. Daniel Lefeuvre, Olivier Dard, Guy Pervillé, Marc Michel, éd. Riveneuve, 2009.

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Hanoï, agent de police indigène (source Caom)

 

 

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10 septembre 2008

du colonialisme à la Belle Époque

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Du colonialisme à la Belle Époque

(1871-1913)

La bande dessinée Larousse le Monde

du 6 septembre 2008

Jean-Pierre RENAUD

Une première observation de lecture : l’aventure coloniale est assez bien décrite et résumée, sans exagération négative ou positive, je dirais volontiers avec une certaine rigueur historique.

La description de la plupart des personnages choisis est correcte. En ce qui concerne Samory, il aurait été plus juste de dire qu’en 1880 son empire avait atteint sa pleine puissance, et donc qu’il n’avait pas besoin de le porter «à bout de bras». L’anecdote sur le fusil Kropatchek est pertinente, car elle donne un témoignage précis sur le degré d’évolution technique de son armée.

Le personnage de Behanzin est bien évoqué, la puissance de son armée, mais aussi la force des coutumes sacrificielles qui régnaient à sa cour.

En ce qui concerne les explorateurs, on peut s’interroger sur le choix de Soleillet qu’on  peut ne pas considérer comme très représentatif de cette espèce d’explorateurs, civils ou militaires, qui, au mépris de tous les dangers, parcouraient une Afrique noire encore inconnue. Le sultan Ahmadou  de Ségou le garda d’ailleurs prisonnier pendant plusieurs mois.

Dans une autre bulle, Reybaud ? Inconnu au bataillon !

Et précisément au sujet des événements retenus, et de la prise de Sabouciré par les troupes coloniales, en 1878, on n’est pas obligé de partager à ce sujet le jugement de l’historien Person qui fit de la prise de ce tata, un fait historique fondateur de la conquête coloniale du Soudan.

Une simple allusion à la conquête du Tonkin, peut être, mais le texte de la bulle ne correspond pas du tout à la réalité historique, je cite : Quand les troupes françaises occupent le Tonkin en 1884-1885, elles affrontent un adversaire encore médiéval… avec la bataille de Bac Ninh. La citadelle en question était occupée par des troupes régulières chinoises, armées d’armes modernes. Par ailleurs, la citadelle était truffée d’ouvrages de défense très sophistiqués, comme savait les construire l’armée chinoise. Le combat fut donc loin d’être médiéval !

la magie exotique des images ?

On peut regretter d’ailleurs que pour une représentation historique plus fidèle, l’Indochine n’ait reçu qu’une part infime des bulles, et Madagascar, aucune. Une des cartes de la troisième page est d’ailleurs inexacte, puisque l’île n’était pas une colonie en 1890, pas plus que le Maroc qui a été évoqué plus loin. La Tunisie également absente des bulles !

Le même problème de représentativité se pose pour la place qu’occupe dans l’ouvrage l’aventure coloniale, une page sur trois, alors que les journaux de l’époque n’ont pas consacré une page sur trois à ces sujets, pas plus que le Parlement en nombre d’interpellations ou de sessions.

Est-ce que les auteurs de l’ouvrage n’ont pas été trop séduits par la magie exotique des images, plus que par la relation historique des faits ?

Cela dit, dans l’ambiance actuelle d’une contrition souvent revendiquée et d’un anachronisme colonial un peu trop agressif à mon goût, ces pages sont les bienvenues.

Jean-Pierre Renaud,
le 10 septembre 2008


Note pour l’information du lecteur

Rien dans la couverture, ni dans la quatrième de couverture de l’opuscule en question, ne permet de penser qu’il s’agit de la réédition d’un des opuscules de l’histoire de France édité par Larousse en 1978. Il faut lire la préface pour en avoir conscience.

Or il se trouve que sous la responsabilité du journal Le Monde, la partie rééditée, intitulée, L’aventure coloniale, est rigoureusement la même en images, bulles et textes, que celle publiée par Larousse, mais sous un titre tout à fait différent, La France d’Outre-Mer.

Le lecteur en tirera toute conclusion qu’il voudra, mais est-ce que cela veut dire que le journal Le Monde accrédite la version historique proposée en 1978, plus de quinze ans après la décolonisation ?

J.-P. Renaud

 


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8 avril 2007

«La vérité sur le passé est indispensable» (Claude Liauzu)

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«La vérité sur le passé est indispensable»

Claude LIAUZU

 

Claude Liauzu (Professeur à l’Université de Paris VII et spécialiste de la colonisation)
«La vérité sur le passé est indispensable»

70 auteurs français et étrangers ont contribué à la rédaction du Dictionnaire de la colonisation française, un ouvrage de référence, sous la direction de Claude Liauzu, spécialiste de la colonisation, professeur émérite à l’université de Paris VII et d’un conseil scientifique composé d’Hélène d’Almeida-Topor, Pierre Brocheux, Myriam Cottias et Jean-Marc Regnault. Le dictionnaire compte 700 notices qui permettent de rechercher directement une information, de passer d’un thème à un autre, en fonction de la multiplicité des facettes du fait colonial. Des dossiers synthétiques sur des questions générales font le point des connaissances et des débats. Une journée de débats se tiendra le 4 avril à l’Ecole des hautes études en sciences sociales de Paris, à la faveur de la sortie du Dictionnaire de la colonisation autour de Claude Liauzu et des membres du comité scientifique de l’ouvrage avec la participation de quelques-uns des auteurs du dictionnaire.

El Watan

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Sous votre direction un Dictionnaire de l’histoire de la colonisation vient d’être publié par les éditions Larousse. Pourquoi un tel ouvrage ?
9857925 Le temps est venu de faire un point sur les grands débats de l’histoire de la colonisation qui s’étendent sur un demi-siècle, de présenter les acquis, d’insister sur les nouvelles orientations.

Cet ouvrage répond-il aux débats controversés qui ont traversé la société française classe politique, intellectuels, société civile pendant des moissuite au vote de la loi du 23 février 2005 ?
Pour moi et pour beaucoup d’auteurs, ce dictionnaire est une suite à notre lutte contre la loi du 23 février 2005, qui voulait imposer l’enseignement du rôle «positif» de la colonisation. Il reste de cette loi d’ailleurs un article très inquiétant pour la recherche, puisqu’il prévoit la création d’une fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie. Fondation inquiétante, d’autant plus que depuis un an un rapport sur sa mise en application a été rédigé pour le ministère des Anciens combattants, mais n’a pas été rendu public.

Nous avons tout lieu de craindre le parti pris d’un ministre qui traite les historiens critiquant sa loi de «pseudo-historiens» et celui d’un lobby des nostalgiques de l’Algérie française. À n’en pas douter, si la droite l’emporte aux présidentielles, cette fondation sera mise en place. Si l’on ajoute que c’est la mairie de Marseille qui a le contrôle du Mémorial de la France d’outre-mer, deux lieux de mémoire importants mettront en cause la liberté de la recherche. C’est aussi nos relations avec les chercheurs d’Algérie et des pays anciennement colonisés qui seraient mises en question par l’application de la loi.

À qui s’adresse le Dictionnaire de l’histoire de la colonisation ?
Une des réponses à ces dangers est l’élaboration d’un ouvrage respectant toutes les règles scientifiques et déontologiques des études historiques, ouvrage destiné à un large public. Le livre concerne bien sûr les enseignants auxquels il fournira des moyens pour préparer leurs cours, mais aussi à un public de militants associatifs préoccupés par le passé colonial et son héritage. Nous avons aussi tenu à associer des chercheurs étrangers, africains et asiatiques ainsi que des Dom-Tom (comme on dit), car le livre devrait aussi concerner les pays indépendants qui éprouvent un grand besoin d’histoire. De manière plus générale, tous ceux qui cherchent à comprendre certains aspects du monde actuel pourront trouver des repères.

Avec plusieurs historiens vous vous êtes élevés contre la proposition de Nicolas Sarkozy de créer un Immigresministère de «l’Identité nationale et de l’Immigration» (appel publié par Libération le 13 mars). Qu’est-ce qui vous choque dans cette proposition ? Que comporte-t-elle de nouveau ?
Ce qui est inacceptable, c’est le lien fait entre une crise de l’identité nationale et l’immigration présentée comme une menace. Cette attitude revient de manière classique lors de chaque grande crise de la société française où «l’étrange étranger» (juif, Italien ou Polonais, Arabe ou musulman...) devient le bouc émissaire, cause de tous nos malheurs. On en arrive aujourd’hui à voir à la télévision des chasses au faciès au sortir des écoles maternelles pour arrêter des clandestins. Cela nous rappelle les pires moments du passé colonial ou de Vichy.

La pétition sur ce point est une réponse importante. Elle a un grand succès et il faut la faire connaître à l’étranger. Elle continue à circuler et à recueillir des signatures et les intellectuels étrangers sont les bienvenus dans cette campagne. Ce qui est nouveau (et grotesque mais inquiétant) est de lier dans un même ministère les problèmes de l’identité nationale et une réalité qui a constitué la France depuis un siècle, l’entrée des étrangers qui représentent aujourd’hui un bon tiers de la population française.

Le concept d’identité nationale fait débat. Des notions, telles que le patriotisme, la patrie, l’exaltation de la Marseillaise, la cohésion nationale sont développées par les différents candidats à l’élection présidentielle. Comment analysez-vous ce débat ?
Il y a un réel problème de l’identité nationale par la conjugaison d’un ensemble de facteurs auxquels aucune réponse n’a pu être apportée jusqu’ici : ce qu’on appelle la mondialisation économique, la constitution de grands réseaux capitalistes transnationaux, les transformations du marché du travail à l’échelle de la planète, un chômage structurel sans précédent dans certains pays, et dans tout cela les immigrés - comme on dit - n’ont rien à voir.

De manière plus profonde, une culture mondiale dominante, imposée par la prépondérance américaine, détruit les anciens repères identitaires. Il suffit de regarder les programmes des chaînes de télévision pour le comprendre. Face à toutes ces transformations, c’est une révolution culturelle qui serait nécessaire, mais une majorité d’intellectuels médiatiques ont choisi de présenter les migrations, le Tiers Monde comme le danger principal. Une majorité aussi de la classe politique se situe dans la même logique.

Pourquoi la reconnaissance du passé colonial et la repentance divisent-elles tant la classe politique et la société françaises ?
C’est une question complexe à laquelle le dictionnaire essaie de répondre. En quelques mots, il faut rappelerFRCAOM08_9FI_00036R_P que «la plus grande France» s’écroule sous le coup de deux défaites contre les Vietnamiens et les Algériens, avec l’humiliation de Suez qui suit la défaite de 1940 et la Collaboration. La France a vécu entre 1940 et 1962, 22 ans de guerre où elle a perdu son statut de grande puissance mondiale. Sur tout cela, l’histoire officielle a menti ou gardé le silence pendant très longtemps (sur le génocide antisémite et la complicité de Vichy, sur les crimes coloniaux...), et les minorités impliquées ont réagi en affirmant leurs mémoires. Les juifs ont imposé la reconnaissance de la responsabilité française dans les persécutions et le génocide, et ce modèle a été repris par toutes les autres populations se considérant comme victimes. C’est le cas pour les pieds-noirs qui réclamaient repentance de la part de l’État français, c’est le cas pour les enfants d’immigrés qui ont lutté pour la reconnaissance des crimes du 17 octobre 1961, des descendants d’esclaves, mais aussi du contingent.

Il y a donc des guerres de mémoires qui entraînent une spirale ascendante des revendications. Dans un meeting à Toulon, Nicolas Sarkozy a fustigé «les professionnels de la repentance » en déclarant : «On doit désapprouver la colonisation et le système injuste, mais il ne faut pas confondre le système et les hommes». Dans Mon combat pour la France (un des deux volumes de recueils de ses discours et déclarations publiés par les éditions Odile Jacob), le président Chirac exclut toute «idée de repentance» : «Cette notion, je la récuse absolument, car nul ne peut être rendu comptable des actes commis par ses aïeux. Mais nous devons comprendre et reconnaître les erreurs passées, pour ne pas les répéter». Le parti socialiste y est favorable, Jack Lang l’a affirmé à Alger. Il est indispensable, comme l’ont déclaré 12 personnalités anticolonialistes dont des historiens comme Madeleine Rebérioux et Pierre Vidal-Naquet, Germaine Tillion, Alban Liechti (qui a refusé de combattre en Algérie)... que l’État français reconnaisse la réalité des crimes dus à la colonisation. À mon sens, le meilleur texte politique concernant ce problème colonial est le préambule des accords de Nouméa qui a débloqué la situation en Nouvelle-Calédonie.

La commémoration du 19 mars 1962, - date de la signature des accords d’Evian et du cessez-le-feu en Algérie - est passée sous silence en France, n’étant pas reconnue par la France officielle. On reste dans l’occultation et l’effacement de faits historiques marquants ?
En effet, la date retenue est absolument ridicule puisqu’elle ne correspond à aucun fait réel. Certains groupes de pression défendent le 19 mars (en particulier la FNACA, association majoritaire du contingent), d’autres la refusent (associations de rapatriés et de harkis) parce qu’elles considèrent qu’elles ont été victimes des suites du 19 mars. On paye toujours le gâchis politique de la FRCAOM08_9FI_00576R_Pguerre d’Algérie : il a fallu attendre 1999 pour qu’une loi utilise le terme guerre d’Algérie, auparavant «guerre sans nom».

Instrumentalisée, l’histoire n’est-elle pas en train d’échapper aux historiens et autres chercheurs en sciences sociales ?
Oui, c’est un danger réel, et le dictionnaire, justement, est une des réponses, car il rappelle que la vérité sur le passé est indispensable et possible. Il s’adresse directement aussi aux jeunes qui sont entrés dans le monde créé par leurs pères, et qui ont le leur à construire. Un de nos espoirs est que ce dictionnaire soit suivi, par exemple, d’un manuel franco-algérien. L’idée fait son chemin.

Comment baliser le champ de la recherche des interférences politiques ?
Il n’y a pas de muraille de Chine protégeant notre corporation. Certains historiens choisissent de s’enfermer dans une tour d’ivoire au dessus de la société. C’est impossible, l’histoire est une science de la société, elle est dans la société. Nous devons prendre nos distances par rapport aux tentatives d’instrumentalisation, de simplification mais aussi apporter des réponses à des besoins. Sans les avancées du mouvement ouvrier aux XIXe et XXe siècles et l’influence qu’elles ont eues sur les intellectuel, sans les luttes des femmes et des immigrés qui ont influencé les historiens, il n’y aurait pas eu autant de progrès des études historiques. Une des raisons de combattre pour la liberté de l’histoire, c’est l’arrivée de jeunes chercheurs d’origine métropolitaine ou descendants d’immigrés de la colonisation : ils prendront la suite en posant leurs questions et ils n’auront pas la même dépendance que notre génération qui a vécu les décolonisations. Ils n’auront pas le même regard ni d’un côté ni de l’autre de la Méditerranée.

Propos recueillis par Bouzeghrane Nadjia
El Watan (Alger), 31 mars 2007

 

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source :
base Ulysse, Caom



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18 août 2008

exposition temporaire de la Cité de l'histoire de l'immigration

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1931. Les étrangers au temps de

l’Exposition coloniale

(Exposition coloniale, immigration,

sans-papiers ?)

Jean-Pierre RENAUD

 

item_img_1284_fr_affiche_expoUne amie m’avait décidé à aller visiter cette exposition  Dans un lointain passé, j’avais fréquenté le palais de l’ancien Musée des Arts d’Afrique et d’Océanie, et surtout son aquarium, avec mes enfants. Je me demandais quel rapport pouvait exister entre ce palais de style décoratif de l’Exposition coloniale de 1931 et celle présentée en 2008. Peu familière de la chose coloniale, mon amie fut surprise, en plusieurs points, par le contenu de cette exposition. Les questions s'accumulaient.

Quelle était tout d’abord la justification du choix de l’année 1931 et de la relation pouvant exister entre exposition coloniale et immigration ? On y voyait en effet beaucoup d’Européens, des Italiens, des Polonais, des réfugiés espagnols, aussi des Arméniens, mais presque pas d’Africains.  Et pourquoi cette fameuse année 1931, alors que le contenu de l’exposition couvrait un champ temporel qui allait du début du XXe siècle à nos jours ? Jusqu’à nos sans-papiers d’aujourd’hui, qui sont effectivement souvent d’origine africaine.

Et quel rapport entre immigration et chasse aux juifs, telle qu’elle est décrite par l’exposition ?

Il est vrai que dans la présentation qu’en fait le journal, on vous explique qu’il était difficile d’échapper au destin originel de ce palais qui fut effectivement construit à l’époque des colonies, modeste symbole de sa gloire passée, en avançant un raisonnement fondé sur trop de contorsions intellectuelles pour pouvoir en discerner les claires intentions.

Ceci dit, comment ne pas regretter que les salles consacrées à l’évocation de l’Exposition coloniale n’aient pas présenté une synthèse historique critique sérieuse sur l’événement, au lieu d’une succession de panneaux insuffisamment éclairants, par exemple ceux consacrés à la contre exposition, anticolonialiste, qui fut un bide, ce qui n’est pas dit.

bigCappielloJobEn quoi les belles affiches de Cappiello [ci-contre] apportent un élément de réflexion sur l’Exposition de 1931 ? J’ajouterais volontiers, on a évité le pire en ne présentant pas les affiches de l’exposition Négripub (1987), considérées comme l’illustration des fameux stéréotypes, évoqués plus loin, dont personne aujourd’hui n’est encore capable de mesurer leur place dans le corpus des affiches, leur diffusion, et leur audience.

Les salles de l’exposition coloniale constituent donc une sorte de fourre-tout.

Comment écrire par ailleurs dans «Le journal de l’exposition» : "Au terme du voyage dans l’année 1931, un certain nombre de silences demeurent. Si l’image du colonisé est particulièrement présente dans notre imaginaire collectif, souvent réduite d’ailleurs à quelques caricatures, les traces du vécu des immigrants coloniaux en France dès l’entre deux guerres attendent encore de voir leur histoire écrite".

Plus haut, le même journal écrivait : "Les stigmatisations héritées de la période Leonetto_Cappiello_Cafe_Martin__1921_5412coloniale et postcoloniale sont loin d’avoir disparu de l’inconscient collectif français". Précisément, l’enjeu est ici de battre en brèche ces stéréotypes en questionnant les relations entre immigration et colonisation en France métropolitaine au début des années 1930.

Manque de cohérence intellectuelle dans le schéma de cette exposition, mélange des genres dans le temps et les concepts, une exposition par ailleurs très bien faite, et agréable à parcourir, truffée d’images intéressantes, sûrement, mais aussi une interrogation : ses auteurs sont-ils en mesure de produire les preuves scientifiques de l’existence effective des stéréotypes qu’ils dénoncent ?

Pourquoi ne pas avoir saisi l’occasion de cette présentation pour procéder à un sondage auprès de ses visiteurs à ce sujet ? Peut être ne connaissaient-ils même pas, avant, l’existence de ce palais et de l’exposition de 1931 ? La Cité Nationale jpg_etrangers_au_temp_de_l_expode l’Immigration, émanation des pouvoirs publics, serait à ce point de vue, bien inspirée de financer un sondage national, sous le contrôle de l’Insee, afin de mesurer la véritable connaissance qu’ont, en 2008, les Français, de leur histoire coloniale. Si les fameux stéréotypes existent réellement ? Et lesquels ?

Jean-Pierre Renaud
18 août 2008

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- présentation de l'exposition sur le site de la Cité de l'histoire de l'immigration

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- retour à l'accueil

23 mars 2008

Sauver la SFHOM (Marc Michel, Daniel Lefeuvre)

Diapositive1

 

Sauver

la Société française d'histoire

d'outre-mer (SFHOM)

Marc MICHEL et Daniel LEFEUVRE

 

Cher(e)s Collègues,

La SFHOM (Société française d'histoire d'outre-mer) vit une crise qui met son existence en péril.

Loin de se résumer à une querelle de personnes, ses origines tiennent d'abord à la difficulté de faire vivre, aujourd'hui, une revue "papier" qui n'est pas adossée à un grand éditeur, avec toutes les conséquences qu'on imagine en matière de budget et de diffusion.

La crise tient aussi, à la nécessité qui s'impose de repenser le projet éditorial de la revue. Seule revue française généraliste en matière d'histoire coloniale, Outre-Mers n'a, nous semble-t-il, de sens que si elle devient le pôle d'une réflexion croisée sur la colonisation, en jetant les passerelles entre les différentes aires, les différents temps et les différentes dimensions de cette histoire, ce qu'elle fait de manière, encore très insuffisante.

En particulier, son ouverture internationale devrait être considérablement élargie.

La crise tient encore, à un insuffisant renouvellement des problématiques et donc, aussi, des générations au sein de l'équipe d'animation de la revue.

Toutes ces pistes, et d'autres encore, devraient faire l'objet d'une réflexion collective que la prochaine assemblée générale du 26 mars ne permettra pas de mener, compte tenu de ses conditions d'organisation, de calendrier et d'horaire.

C'est pourquoi nous demandons avec insistance qu'une assemblée générale extraordinaire soit convoquée au mois de juin, en fin de semaine et à une heure permettant la plus large participation.

Pour l'avenir de la Revue auquel nous sommes tous attachés, nous espérons que notre appel sera entendu.

Marc Michel, ancien président de la SFHOM
Daniel Lefeuvre
, ancien secrétaire général de la SFHOM

 

 - réactions à ce texte (9 et 14 avril 2008)

 

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- retour à l'accueil

10 avril 2008

Guerre des images, guerre sans image ? (Marie Chominot)

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source de la photographie

 

Guerre des images, guerre sans image ?

Pratiques et usages de la photographie pendant la guerre

 

d’indépendance algérienne (1954-1962)

 

Marie CHOMINOT



thèse de doctorat préparée sous la direction de

 

Benjamin STORA, Professeur d’Histoire contemporaine à l’INALCO.

La soutenance se déroulera le

Mercredi 14 mai à 9 heures,

Université de Paris 8 – Saint-Denis,

Salle des thèses, Bâtiment A Salle 010

 

 

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source


Le jury sera composé de :

 

- Stéphane Audouin-Rouzeau, directeur d’études à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales

- Omar Carlier, professeur à l’université Paris VII

- Christian Delage : maître de conférences HDR à l’université Paris VIII

- Abdelmajid Merdaci, maître de conférences à l’université Mentouri de Constantine

- Michel Poivert, professeur à l’université Paris I

- Benjamin Stora, professeur à l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales

 


résumé succinct


Pendant la guerre d’indépendance algérienne (1954-1962), conflit qui n’a pas officiellement le statut de guerre, les deux camps en présence incluent la photographie dans des stratégies de légitimation et de communication complexes, mettant en œuvre une véritable politique des images. Dans le cadre de l’internationalisation du conflit, la communication française est dans une perpétuelle logique de riposte aux initiatives des nationalistes algériens. Pourtant, lorsque l’on se rapproche géographiquement du cœur du conflit, le rapport de forces s’inverse et l’on voit pleinement fonctionner un système d’information mis en place par l’armée française et assumé par le pouvoir politique, qui est aussi un système hégémonique de représentation du conflit.


La photographie se trouve au cœur d’une vaste entreprise de maîtrise de la guerre : elle sert à faire la guerre (comme auxiliaire du renseignement), elle sert aussi à la dire. Dans le but de maîtriser le récit confié à l’opinion publique par les médias, l’armée a organisé une forme de monopole de production et de diffusion des images photographiques, s’efforçant de tarir à la source la réalisation de photographies par des journalistes civils, tout en alimentant régulièrement le système de diffusion médiatique qui se fait par conséquent le relais, consentant mais forcé, d’une vision univoque. Le fonctionnement du système d’information français révèle des failles dont la moindre ne fut pas de générer une «guerre sans image». L’invisibilité du conflit est la conséquence d’un système de représentation qui se veut hégémonique et qui, par l’application de filtres successifs, engendre une banalisation de la vision.

 

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source

 


présentation détaillée


Pendant la guerre d’indépendance algérienne (1954
1962), conflit qui n’a pas officiellement le statut de guerre, les deux camps en présence incluent la photographie dans des stratégies de légitimation et de communication complexes, mettant en œuvre, selon des modalités différentes, une véritable politique des images. Le conflit franco-algérien fut bien une guerre des images, et, si cette dernière fut marquée du sceau de l’inégalité en termes de production, la conclusion est tout autre si l’on déplace le curseur vers la question de la diffusion et que l’on élargit l’échelle géographique. L’enquête en terrain algérien révèle que le camp nationaliste a mis en œuvre, dès 1955-1956, une véritable stratégie de communication qui passe par une utilisation raisonnée de l’image photographique et, dans une moindre mesure filmique.


Peu importe que les Algériens n’aient pas les moyens de produire massivement des images du conflit, ils se donnent tous les moyens d’assurer la diffusion maximale de toutes celles qui leur parviennent, quelle que soit la filière empruntée. La question du déséquilibre est en effet à interroger dans une perspective multiscalaire. Si l’activité d’information par l’image menée par le camp algérien parvient à mettre en échec le système hégémonique de représentation de la guerre qu’ont tenté de construire les Français, c’est à l’échelle mondiale (dans le monde arabe, en Europe, mais surtout sur le front des pays non-alignés et à la tribune de l’ONU).


Dans le cadre de l’internationalisation du conflit, la communication française est dans une perpétuelle logique de riposte aux initiatives algériennes. Pourtant, lorsque l’on resserre la focale, que l’on se rapproche géographiquement du cœur du conflit (le territoire algérien, lieu des affrontements et la France métropolitaine, siège des décisions politiques et de l’opinion publique nationale), le rapport de forces s’inverse et l’on voit pleinement fonctionner un «système d’information» mis en place par l’armée française (et assumé par le pouvoir politique), qui est aussi un système hégémonique de représentation de cette guerre.

L’expression «système d’information» permet de décrire les différents usages de la photographie par l’armée française en Algérie et rend compte d’une soldat_karkitendance globalisante de cette armée qui tend, dans le domaine de l’information comme dans bien d’autres, à s’arroger des pouvoirs qui ne sont habituellement pas les siens. La photographie se trouve au cœur d’une vaste entreprise de maîtrise de la guerre par l’armée : elle sert à faire la guerre et à la dire, à maîtriser le faire et le dire. Le terme d’ «information» doit dès lors être entendu dans trois acceptions différentes. Dans son sens le plus classique, il renvoie à la question de la médiatisation d’un événement, à la manière dont il est mis en récit et transmis à un public. [source photo ci-contre]

Dans le but de maîtriser le récit confié à l’opinion publique par les médias, l’armée a organisé (avec l’accord plein des autorités civiles) une forme de monopole de production et de diffusion des images photographiques relatives au conflit, s’efforçant de tarir à la source la réalisation de photographies par des journalistes civils, tout en alimentant régulièrement en images le système de diffusion médiatique (agences photographiques et journaux), qui se fait par conséquent le relais, consentant mais forcé, d’une vision univoque.
Par «information», il faut aussi entendre «renseignement» car ce dernier permet, en l’informant, de maîtriser le faire de la guerre. En amont et en aval des opérations militaires, la photographie intervient pour repérer, identifier, contrôler des objectifs terrestres et humains. Aux usages proprement stratégiques de la photographie en temps de guerre (photographie aérienne, cartographie), l’armée ajoute ici des pratiques qui relèvent de l’utilisation policière et judiciaire de la photographie (fichage et identification des individus, vivants comme morts). Les populations civiles algériennes, tout comme les combattants algériens, sont pris dans les rets d’un vaste système d’images qui sert à la fois à les contrôler et à les persuader de rejoindre le camp de la France.


Pour ce faire, certains services de l’armée mettent en œuvre une forme particulière d’information, qui s’applique directement sur les publics ciblés (d’abord, exclusivement en son sein, les appelés, puis les populations civiles et les combattants algériens), sans emprunter le canal des médias civils. Cette «action psychologique», forme de propagande ouvertement inspirée de l’agit-prop de tradition marxiste,
s’inscrit dans le cadre d’une interprétation théorique de la guerre pensée, à partir de la fin de l’année 1956, sur le modèle de la «guerre révolutionnaire», issu de l’expérience indochinoise. La conquête des populations (par la persuasion, la séduction ou la terreur) est alors considérée comme un élément fondamental pour gagner la guerre.

Il s’agit d’asseoir sa domination à la fois sur un territoire et sur les esprits de ceux qui le peuplent, afin que l’Algérie reste française. Outil pour garder la maîtrise du conflit, autant dans sa dimension stratégique que dans sa dimension politique, la photographie est réellement utilisée par les Français comme un instrument pour gagner la guerre. Or, malgré le déploiement de considérables moyens humains et matériels, malgré la mise en place d’un système d’information qui se veut verrouillé, les Français perdent la guerre sur le terrain médiatique.

Cet échec médiatique ne saurait être exclusivement imputé à l’activisme du FLN sur la scène internationale. Analysé de l’intérieur, le fonctionnement du système d’information français révèle des failles dont la moindre ne fut pas de générer une «guerre sans image». L’invisibilité du conflit, en effet, n’a pas été élaborée a posteriori par une occultation volontaire, elle a émergé dès l’époque. Elle est la conséquence d’un système de représentation qui se veut hégémonique et qui, par l’application de filtres successifs, engendre une banalisation de la vision.

Au regard de l’océan de photographies produites par l’armée française, la proportion des images effectivement diffusées est minime. Soigneusement choisies et filtrées à toutes les étapes (production, exploitation, diffusion), les mêmes photographies sont destinées à toutes les catégories de publics (soldats, opinion publique française et internationale, populations civiles et combattants algériens). Pendant toute la guerre, seul un petit nombre de figures photographiques, fortement stéréotypées, circule. L’armée a organisé la pauvreté visuelle de l’événement. L’impact relatif des propagandes française et algérienne doit aussi être étudié, au-delà de la question des moyens mis en œuvre de part et d’autre, à la lumière de cette opposition : invisibilité versus dévoilement.

 

Marie CHOMINOT 

 

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_____________________________________________________________________

 

Pour vous rendre à l’université Paris VIII, 2, rue de la Liberté à Saint-Denis :

- Par le Métro, descendez à la station de métro Saint-Denis Université (ligne 13).

- Par la route en provenance de Paris, prenez l’autoroute A1 (dite du Nord) à la Porte de la Chapelle, sortie N°3 direction St-Denis Universités – Pierrefitte ; après le 4e feu tricolore, tournez à droite dans la 2e rue, direction Stains – Saint-Denis Universités – Vélodrome. Après le carrefour, un parking payant se trouve sur votre gauche.

Pour rejoindre la salle A 010, empruntez l’entrée principale de l’université, prenez les escalators sur votre gauche, direction bâtiment A. Ensuite, traversez la passerelle qui franchit la rue de la Liberté et longe la bibliothèque universitaire. Descendez les escalators puis continuez tout droit. Vous arrivez dans le hall du bâtiment A. La salle A 010 se trouve juste sur votre gauche.

Dans le hall principal, des agents d’accueil peuvent vous aider.

 

 

contact : chominot@wanadoo.fr

 

gendarmerie_militaire_Alg_rie
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