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études-coloniales

11 mai 2011

le terrorisme algérien (général Faivre)

 Dahou

 

le terrorisme en Algérie :

les faits historiques

général Maurice FAIVRE

 

Exposé le 4 mai 2011 à l'Université de Créteil

sommaire

FAITS HISTORIQUES

- Élimination des traîtres et des méchants
- Le terrorisme anti-européen
- L’anarchie de 1962 : deux terrorismes ennemis
- Le massacre des harkis

 INTERPRÉTATIONS

- Colonel Trinquier
- Pierre Le Goyet
- Jean Daniel
- Jean-Pierre Lledo
- Mohammed Harbi
- Gilbert Meynier
- Albert Camus
- Gérard Chaliand

RÉPÉTITIONS DE L’HISTOIRE

 

 

LES FAITS HISTORIQUES

Élimination des traîtres et des méchants

C'est d'abord contre leurs propres corréligionnaires que les membres de l'organisation spéciale  (OS) du PPA, qui donnera naissance au FLN, vont exercer leur action d'épuration. Un de leurs dirigeants, Hocine Aït Ahmed, estime en décembre 1948 que la tentation du terrorisme généralisé doit être rejetée, mais qu'il faut faire disparaître les traîtres et les méchants (1). "On ne s’allie pas aux traîtres, on les abat", confirme Mohammed Harbi.

Cette élimination a commencé à être mise en pratique depuis 1945 et s'est poursuivie de façon discrète jusqu'au déclenchement de la Révolution. Cependant la Révolution du Peuple par le Peuple, proclamée le 1er novembre 1954, était loin de faire l'unanimité parmi la population musulmane, aussi bien dans le bled que dans les villes. L'appel du FLN prévoyait même des résistances : "Se désintéresser de la lutte est un crime. Contrecarrer l'action est une trahison".

"Après la Toussaint de 1954, incapable de provoquer un soulèvement généralisé, écrit Jacques Julliard (Nouvel Observateur du 10 mai 2001), le FLN a eu recours à la terreur et aux atrocités". "Pressé de dénoncer la torture française, on oublie systématiquement l’extraordinaire sauvagerie de l’autre camp", affirme Jean-Claude Guillebaud (Sud-Ouest, 17 juin 2001).

L'indifférence et la passivité du peuple conduisirent l'ALN à lancer un nouvel appel le 1er avril 1955 : "Sortez de votre réserve et de votre silence". Abane Ramdane, principale tête politique du mouvement, proclame alors que la lutte continue et s'efforce de faire d'Alger la principale base de l'ALN. Pour ce faire, il prescrit à quelques groupes armés de nettoyer la ville des indicateurs de police qui se recrutent dans la pègre, des policiers et gardiens de prison trop zélés, des contre-terroristes et des messalistes. Pour mobiliser le peuple, il ordonne que chaque Algérien se prive de fumer, de jouer et de boire, prescription qui se traduit en des centaines de mutilations faciales (atteintes à la dignité).

Dans le Constantinois, la masse des musulmans ne croit pas à la Révolution, estime Zighout Youssef, et c'est pour entraîner les hésitants en provoquant des représailles aveugles qu'il lance l'attaque de 30 localités le 20 août 1955, au cours de laquelle 71 civils européens, 31 militaires et policiers, et 21 musulmans modérés (dont le neveu Allaoua de Ferhat Abbas, opposé à toute violence) seront sauvagement assassinés. Après vérification par R. Vétillard, ces chiffres sont portés à 135 européens, 45 militaires et policiers et 36 musulmans.

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Bien qu'il considère ce massacre comme une entreprise de fanatiques, Abane Ramdane le justifie comme une réplique à la répression, et rédige en décembre un tract appelant chaque patriote à abattre son traître. Belkacem Krim adopte la même attitude en Kabylie. "Tout le monde, écrit Mouloud Feraoun dans son journal, a choisi de narguer le Français afin de ne pas mourir en traître". Le nombre des traîtres assassinés monte alors à 150 par mois. C'est le 12 décembre que Yacef Saadi, qui vient de recruter le truand Ali la Pointe, fait jeter deux bombes dans des cinémas arabes.

Au cours de l'été 1955, Amirouche a éliminé les maquis messalistes en Kabylie ; le maquisard Mohamed Benyahia (2)rapporte la vengeance de l'officier de l'ALN H'Mimi Fadel, qui le 21 avril 1956 fait égorger, autour de Feraoun en petite Kabylie, 490 habitants, coupables d'avoir voulu se rallier à la France. En mai 1957, les Kabyles de Melouza massacrent les Arabes de Beni Ilman.        

Le FLN installe la terreur dans les villages et les quartiers. L'assassinat de musulmans va connaître en 1956 un point culminant avec une moyenne de 300 par mois, dont 488 en juillet. Dans ces chiffres, il est indéniable qu'il faut retrancher un certain nombre de victimes des "ratonnades" qui ont suivi certains attentats.

De 1955 à 1962, la guerre du FLN contre le MNA se déroule à la fois en Algérie et en métropole. Le bilan en est très lourd : 6.000 musulmans tués en Algérie et 4.000 en métropole.

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Le terrorisme anti-européen

Les nationalistes de l'UDMA et du MTLD, avant 1954, considéraient généralement les Européens comme des Algériens, appartenant à une patrie commune. La proclamation du 1er novembre 1954 affirmait le respect de toutes les libertés, sans distinction de races et de confessions. Ce jour-là, il y eut peu de victimes européennes (intituteur Monnerot).

D'autres opinions cependant se faisaient jour. Lamine Debaghine déclarait en novembre 1942 : "Il faut créer un fossé irréversible entre les Européens et nous". En 1946, le slogan "la valise ou le cercueil" fit son apparition dans l'Est algérien, dont l'un des leaders, Ben Tobbal, exigeait le rejet des Européens, à l'exception des Juifs.

Cette tendance populiste l'emporta, à partir d'avril 1955, sous la forme de destructions et de sabotages. En un an, le colonel Schoen décompte 543 fermes, 237 écoles et 60 maisons forestières détruites ou brûlées, 19.128 têtes de bétail abattues, 57.387 arbres fruitiers et 228.865 ceps de vignes arrachés (3). Cinq à sept colons, et autant de militaires, sont enlevés chaque mois et ne sont pas retrouvés.

Dans le Constantinois, ces destructions furent accompagnées en mai d'attentats individuels à Philippeville, Bône et Constantine. Les attentats par explosifs précèdent largement la riposte des contre-terroristes (rue de Thèbes le 10 août 1956). Le 20 août, la tuerie décidée par Zighout Youssef, vise à rejeter à la mer tous les infidèles, avec le secours de Nasser. Ce massacre effraya le Gouverneur Soustelle, qui avait entrepris de négocier. "C'est la guerre, il faut la faire", dit-il.

Bien qu'il eût encouragé le projet de Trêve civile d'Albert Camus en janvier 1956, Abane Ramdane affirma dans un tract de février "sa conviction profonde que tous les Français, à de rares exceptions près, sont peu ou prou des colonialistes". Il annonce alors des représailles terribles sur la population européenne, si le gouvernement fait guillotiner les condamnés à mort. Peu après, le 26 février, 8 Français sont assassinés au col de Sakamody.
Le 3 mai à Ain Beida, trois écoliers sont attirés dans un guet-apens par un de leur camarade d'école ;  martyrisés et lapidés, leurs corps seront retrouvés dans un puits deux mois plus tard. Après l'exécution capitale de deux condamnés, le 19 juin, un tract rédigé par Abane Ramdane et Ben M'hidi menace d'abattre cent Français pour chaque maquisard guillotiné. Les groupes armés reçoivent l'ordre de "descendre n'importe quel Européen de 18 à 54 ans. Pas de femmes, pas d'enfants, pas de vieux". La Zone autonome d'Alger (ZAA) perçoit ses premières bombes en juillet, alors que les Combattants de la Liberté du PCA sont intégrés dans l'ALN.

Il faut noter qu'en revanche Messali Hadj se prononce contre tout attentat raciste. Le PPA ne nourrit aucune haine ni arrière-pensée contre les Européens (4).

Le massacre et la mutilation de 21 soldats rappelés, dans les gorges de Palestro, le 18 mai 1956, a fortement choqué l'opinion. Le témoignage du lieutenant Poinsignon (encadré) en rappelle toute l'horreur.

En août 1956, le Congrès de la Soummam reconnaît que la nation algérienne est ouverte aux autres communautés, tout en préconisant l'isolement de l'ennemi colonialiste, et la neutralisation d'une fraction importante de la population européenne.

Mais de retour à Alger, le Comité de coordination et d'exécution (CCE) opte pour la stratégie du pire, et lance une offensive systématique contre les quartiers européens, en réponse aux attentats contre-terroristes. Il s'agit également de frapper l'opinion et de soulager les maquis.

Fin septembre, la ZAA de Yacef Saadi dépose ses premières bombes dans les lieux publics. Le mot d'ordre est "de tuer un Européen, n'importe quel Européen, pourvu que ce soit un Européen". On est rentré dans la logique de la revanche du colonisé, conforme à la thèse raciste de Franz Fanon. Cette série d'attentats ne prendra fin qu'en septembre 1957, faisant en 14 mois, selon le maire Jacques Chevallier, 314 morts et 917 blessés.

L'espoir d'Abane Ramdane, formulé en octobre, d'une insurrection générale contre le colonialisme français, échoue en 1957. Il sera lui-même assassiné par ses pairs, au Maroc, en décembre 1957. Bien que Yacef Saadi, de sa prison, cherche à relancer le terrorisme, la ZAA est éliminée jusqu'en 1961.

Après les manifestations de fraternisation en mai 1958, les statistiques montrent que les attentats, qui ne sont plus que des actes individuels, régressent jusqu'en juin 1961. La trêve, intitulée Interruption des opérations offensives, permet alors au FLN de relever la tête et de reprendre le contrôle des populations. Il en est de même à Oran, où les attentats qui s'étaient développés depuis 1956, avaient disparu en 1958.

Ces statistiques ne signifient pas que toute violence cesse sur le territoire algérien. Une des conséquences de la bataille d'Alger est l'infiltration des wilayas 3 et 4 par les bleus du capitaine Léger, qui conduisent Amirouche à suspecter des centaines de jeunes combattants, de préférence intellectuels, et à les livrer aux supplices de son adjoint Mayouz Ahcene, surnommé Mayouz la torture. Les purges qui s'ensuivent se traduisent par des milliers d'exécutions dans des conditions horribles.

Enfin, la guerre portée en métropole le 27 août 1958 se traduit par l’assassinat de 69  policiers et militaires, et de 150 civils Français.

 

L’anarchie de 1962 : deux terrorismes ennemis

On sait qu’au début de l’année 1961, des activistes de l’armée et de la population européenne se sont opposés à la politique d’abandon du général de Gaulle. Le putsch des quatre généraux a échoué, mais l’Organisation Armée secrète (OAS) poursuit la résistance et met en oeuvre à son tour un terrorisme pur et dur, qui s’attaque même à l’armée française, et qui est attribué par certains (J.-P. Lledo) à la situation de desperados des victimes de la purification ethnique

Un mois après le cessez-le-feu du 19 mars 1962, on assiste vers le 17 avril à une recrudescence des enlèvements de civils européens, qui monte de 150 à près de 600 par mois. Le FLN, estimant que l’effort de la France contre l’OAS est insuffisant, aurait ordonné d’éliminer les partisans de l’OAS. Cette explication n’est que partiellement exacte. Il est vrai que la majorité de la population française a espéré que la résistance de l’OAS conduirait le gouvernement français à maintenir le statu quo.

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Mais à partir du 26 mars, date de la fusillade de la rue d’Isly contre des manifestants pacifiques, les Français de souche se détachent peu à peu de l’OAS. Le FLN poursuit cependant sa guerre, fidèle à son slogan "la valise ou le cercueil", mais pour ne pas porter atteinte aux accords d’Évian, il évite les attentats mortels ; les enlèvements sont ainsi une sorte de terrorisme silencieux. Le colonel Azzedine, responsable de la Zone autonome d’Alger (ZAA), reconnaît que "l’exode massif des Européens est dû aux enlèvements" (Et Alger ne brûla pas, p.217)

Environ un tiers des enlevés sont retrouvés, tous sont torturés dans des prisons clandestines et les deux tiers tués après interrogatoire ; certains sont vidés de leur sang. Cette campagne n'atteint pas les membres de l'OAS au centre des villes, mais elle touche les Français qui, sans distinction d'âge ou de sexe, résident dans les quartiers périphériques où les communautés cohabitent .

La psychose de terreur qui se répand est énorme et à cet égard, le but recherché est atteint. En faisant disparaître des Européens, on intimide la population pied-noire, on la pousse à l'exode. Les témoignages, les archives militaires et privées laissent penser que la population européenne fut indistinctement visée. Tout Européen passant dans les zones contrôlées par le FLN courrait le risque d’être enlevé. Du 17 avril au 1er juillet, le département d’Alger subit 404 enlèvements, celui d’Oran 237, l’ensemble des autres département 213. Selon Jean Monneret, témoin et historien, ce sont les attentats et les  enlèvements qui ont facilité la purification ethnique.

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Les rivalités internes au FLN produisent dans toute l'Algérie une situation anarchique dans laquelle quatre pouvoirs (le GPRA, le Bureau politique de Ben Bella, les Wilayas et l’Exécutif provisoire) se font concurrence. Cette anarchie facilite tous les excès, ceux des wilayas, ceux des marsiens qui se sont ralliés tardivement, ceux des truands qui profitent du désordre. Le prétexte invoqué est toujours celui de la lutte contre l'OAS, alors que les commandos Delta ont quitté l'Algérie à la fin juin.

Les massacres du 5 juillet 1962 à Oran amplifient le cycle des violences. À onze heures, après des coups de feu dont l’origine n’est pas établie, la foule qui descend des faubourgs enlève des centaines d’Européens. Bien qu’il dispose  de 18.000 hommes, le général Katz impose la consigne à la garnison d’Oran, ce qui facilite les disparitions ; l'engagement tardif des gendarmes mobiles ne peut empêcher ces enlèvements. Certains musulmans protègent leurs amis, mais des centaines d’Oranais disparaissent à tout jamais (de 350 à 450).

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Les enlèvements se poursuivent en août et septembre et diminuent ensuite. Mais les attentats contre les personnes se sont poursuivis après la prise de pouvoir de Ben Bella le 25 septembre 1962. 295 disparitions sont signalées de janvier à août 1963. Au total, 1823 Français ont été enlevés, dont 175 incertains. 72 corps seulement ont été retrouvés.

Le bilan des pertes met en tête les départements d’Alger et d’Oran, qui sont les plus peuplées d’Européens. Ordre est donné en août à l'armée française d'aller chercher les Français isolés, de les ramener sains et saufs à la côte et de les embarquer (JM. Jeanneney, op.cit., p.164).

 

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Le massacre des harkis (5)

Dès l'été 1961, des directives du FLN font état du sort réservé aux supplétifs engagés dans l'armée française : "Ils seront égorgés... Nous garderons les moins mauvais. Non payés et soumis comme des cochons, ils travailleront à votre place". Contrairement à la promesse verbale, obtenue à Bâle en novembre 1961, selon laquelle il n'y aurait pas de représailles, les chefs des wilayas prescrivent de "se montrer conciliant avec les harkis, afin de ne pas provoquer leur départ en métropole, ce qui leur permettrait d'échapper à la justice de l'Algérie indépendante"(wilaya 2). "Envers les harkis, que le Peuple frappe de son mépris... user de tact et de souplesse afin de les gagner provisoirement. Leur jugement final aura lieu dans l'Algérie indépendante, devant Dieu et devant le Peuple qui sera alors seul responsable de leur sort "(wilaya 5).

C'est à partir de juillet, et jusqu'en novembre, que furent perpétrés des massacres massifs dans des conditions affreuses, rapportées par de nombreux témoins.

Le rapport le plus véridique est celui du sous-préfet d'Akbou, M. Robert, resté en place après l'indépendance. Il observe que jusqu'au 27 juillet 1962, "l'ALN fut d'une correction parfaite, rassurant les harkis et élus... leur disant que le passé était totalement oublié, qu'ils étaient tous frères, que la France était seule responsable de leur action, et que les promesses d'amnistie et les accords d'Évian seraient scrupuleusement respectés... Il était cependant précisé que quitter l'Algérie serait une trahison qui ne pourrait être admise.

La répression va s'abattre soudainement. Une cinquantaine d'ex-supplétifs ou de civils furent tués par l'ALN dans les villages les plus éloignés. Mais surtout 750 personnes furent arrêtées et regroupées dans trois centres d'interrogatoires... Dans ces centres où l'on entendait très loin à la ronde les cris des torturés, près de la moitié des détenus furent exécutés...

Un conseiller général dont le président du comité FLN m'avait dit qu'il avait toute l'estime de la population... a été arrêté le 1er août... puis il fut enterré vivant le 7 août, la tête dépassant et recouverte de miel... Son agonie, le visage mangé par les abeilles et les mouches, dura cinq heures".

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Camille Brière, Président d'une Amicale de Rapatriés, a recueilli des témoignages de rescapés, dont il fait un horrible tableau :

"Certains furent crucifiés sur des portes, les yeux crevés, le nez et les oreilles coupés, la langue arrachée, systématiquement émasculés... Quant aux familles, voici ce qui les attendait. Des vieillards et des infirmes étaient égorgés, des femmes violées puis éventrées..."

Bien qu'aucun décompte n'aît pu en être effectué, on estime que le bilan se monte à des dizaines de milliers de supplétifs massacrés au cours de l'été 1962.

 

INTERPRÉTATIONS HISTORIQUES

L'arme terroriste

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Le colonel Roger Trinquier, éminent chef de corps parachutiste et théoricien de la guerre moderne (6), considère que "la guerre révolutionnaire ou subversive dispose de deux armes essentielles : l'action psychologique et le terrorisme...Arme du temps de paix, l'action psychologique visait à obtenir l'adhésion des populations à une cause, et à les dresser contre le pouvoir établi par des moyens pacifiques. Le terrorisme brisera leur volonté de résistance et obtiendra leur soumission par l'emploi sans limite de la violence.

...Aujourd'hui, il a changé d'objectif. Il n'attaque plus l'État au sommet, mais à sa base pour qu'il perde tout contact avec ses administrés, et pour que ses rouages tournent à vide. Les petits cadres, tous les individus capables de faciliter l'exercice du pouvoir seront les premiers supprimés ou neutralisés.

La population, privée de ses petits cadres et de ses éléments actifs, ne résistera pas à une telle épreuve. Elle perdra confiance dans l'État, dont la mission première est d'assurer sa sécurité. Elle devra se soumettre à la volonté des terroristes, seuls, en définitive, capables de la ménager. Elle deviendra une masse confuse que les organisations subversives manipuleront à leur gré...

Ce qui caractérise le terroriste, et fait sa force essentielle, c'est qu'il tue, dans le cadre d'une législation qu'il connaît bien, des individus sans défense, souvent des femmes et des enfants, en évitant les risques que prend un criminel ordinaire, un soldat sur le champ de bataille ou même un guerillero... Il se bat sans uniforme et ne s'attaque qu'à des civils désarmés...

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Pierre le Goyet, qui après avoir combattu en Indochine et en Algérie, fut chef de la section Études du Service historique de l'Armée de terre, partage cette analyse (7) et estime que "le véritable vainqueur de la guerre d'Algérie, c'est le terrorisme.

Battu sur le terrain militaire, c'est par le terrorisme que le FLN s'est imposé, qu'il a vaincu le MNA, c'est par le terrorisme qu'il a obligé la grande masse des indécis, des indifférents, des modérés, de ceux qui étaient favorables à la France, à se ranger définitivement sous sa bannière. Car le nationalisme algérien en 1954 était plutôt pressenti qu'exprimé... C'était encore un sentiment imprécis et dont l'évolution aurait sans doute demandé du temps, peut-être plusieurs générations, sans l'intervention du terrorisme, et elle n'aurait pas revêtu cette forme de violence fanatique.

Il a fallu ce terrorisme pour annihiler l'influence française, beaucoup plus enracinée qu'il est prétendu, car comment expliquer jusqu'aux derniers moments les effectifs des musulmans se battant pour la France ?

Le terrorisme est donc une véritable arme de guerre, destinée à briser la volonté de résistance d'un État ou d'une nation. S'il lui arrive d'attaquer au sommet, c'est surtout sur la base que se poursuit maintenant l'action ; elle agit d'une façon anomyme, pour que chacun ait l'impression d'être une cible, la police ne pouvant protéger tout le monde. Tous les habitants, chez eux, dans la rue, dans les moyens de transport, les stades, les autres lieux de réunion, risquent d'être abattus, et cela sans grand risque pour les agresseurs, qui se fondent dans la masse dès leur forfait accompli."

 

Terreur et répression

Jean Daniel, peu suspect de sympathie pour l’Algérie française, note que les premiers maquisards ont fait ce rêve insensé de livrer d’abord une guerre civile, pour transformer en traîtres tous ceux qui n’étaient pas pour l’indépendance ou qui n’y songeaient pas. Cela ne pouvait se faire que dans le sang, par la terreur, le sectarisme, l’intimidation religieuse… Il fallait inventer le concept de trahison et faire de tous les incertains , et de tous les tièdes, comme de tous les passifs, des renégats, des apostats et  des collaborateurs (La  blessure, Grasset, 1992, page 129).

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Nous avons à entraîner le peuple algérien, ajoute Ahmed Boumendjel. Il faut que notre terreur soit supérieure à toutes les autres, celle de l’État français et celle des autres partis algériens. Pour être recruté par le FLN, il fallait faire ses preuves en tuant deux collaborateurs. Qui étaient-ils ? Le commandant Azzedine précise : n’importe qui, puisque tout le monde l’était (8).

Le cinéaste Jean-Pierre Lledo recueille le témoignage des terroristes de Philippeville et d’Alger, qui affirment qu’ils avaient l’ordre d’égorger les gour (non-musulmans), y compris leurs amis, leurs collègues de travail, des femmes et des enfants, pour les faire partir. Il est effrayant de constater qu’une propagande mensongère, fondée sur l’arrivée de Nasser et des Américains, et inspirée du djihad, transforme en assassins sadiques des foules villageoises de plus de 10.000 personnes, qui auparavant vivaient en bonne intelligence avec les colons (Algérie, Histoires à ne pas dire, Ed.Atlantis, 2011).

L’historien-militant du FLN Mohammed Harbi observe qu’en juin 1956, le leader politique Abane Ramdane opte pour une offensive systématique contre les quartiers européens, désavouant la politique modérée adoptée au Congrès de la Soummam. Il y voit la preuve que "la guerre n’était pas pensée du côté algérien" et qu’il fallait "l’examiner comme un enchaînement d’initiatives et de ripostes". En revanche, Khalfa Mameri, biographe de Ramdane, y voit une stratégie délibérée "d’accélération voulue de la répression". (réf. Guy Pervillé, op.cit. L’Histoire, octobre 1997)

Historien de l’intérieur du FLN, Gilbert Meynier souligne davantage la guerre sans merci menée par l’armée française que le massacre de civils innocents. Le CCE préconisa la reprise du terrorisme au printemps 1957, écrit-il. Une bombe causant la mort de dix personnes et en blessant cinquante autres équivaut sur le plan psychologique à la perte d’un bataillon français… Lors de l’anarchie (la fawda libertaire) de 1962, les résistants du 19 mars affluent dans les rangs de l’ALN pour se racheter, mais aussi parfois pour assouvir des vengeances ou partir à la chasse aux biens matériels… Sous-estimant le massacre des harkis, il estime que l’épuration sanglante fut très inégale selon les régions. (réf. Histoire intérieure du FLN, Fayard 2002, pages 325 et  643).

Rejet du terrorisme

Dans ses chroniques algériennes (Actuelles II, Gallimard 1965), Albert Camus condamne le terrorisme appliqué par le FLN. "Quelle que soit la cause qu’elle défend, elle sera toujours déshonorée par le massacre d’une foule innocente où le tueur sait d’avance qu’il atteindra la femme et l’enfant". On peut rapprocher de Camus le rejet de la Révolution par Chateaubriand : Jamais le meurtre ne sera à mes yeux un objet d’admiration et un sentiment de liberté ; je ne connais rien de plus servile, de plus méprisable, de plus lâche, de plus borné qu’un terroriste, les niveleurs, régénérateurs, égorgeurs, transformés en valets, espions, sycophantes…

Théoricien de la stratégie, Gérard Chaliand estime que si la guérilla est l’arme du faible, le terrorisme est l’arme du plus faible encore. Substitut à la guérilla, c’est la forme la plus violente de la guerre psychologique… Il observe que le FLN a eu recours abondamment au terrorisme, dans les buts de liquidation des agents du colonialisme, intimidation des populations pour asseoir son contrôle, liquidation des mouvements concurrents, terrorisme indiscriminé pour scinder les communautés selon des critères ethniques. (réf. Les guerres irrégulières, Gallimard 2008, page 799 et Terrorisme et guérillas, Flammarion 1985).

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Le terrorisme a pour résultat d'obliger les services de sécurité à employer des procédés rigoureux de protection des populations et des institutions, sans toujours respecter la légalité du temps de paix. Les arrestations de suspects, perquisitions, contrôles inopinés, interrogatoires musclés, internements administratifs provoquent des oppositions, des campagnes de presse  et des troubles dans l'opinion publique. La torture, selon Germaine Tillion et Pierre Messmer, est indissolublement liée au terrorisme. En même temps, les victimes du terrorisme sont  tentées de recourir aux violences du contre-terrorisme, et à pratiquer des attentats et des exécutions sommaires.

Le FLN a parfaitement su exploiter cette situation en transmettant aux médias des dossiers de torture, et à la justice des plaintes qui n'étaient pas toujours fondées. C'est ainsi que la Fédération de France du FLN a donné l'ordre à ses membres de déclarer, quoi qu'il arrive, qu'ils avaient été torturés (9).

Le terroriste peut ainsi tirer un avantage politico-médiatique des actions violentes qu'il exécute contre des personnes innocentes, se présenter comme un martyr et un héros de la "résistance" et amener le pouvoir qu'il combat à infléchir sa politique. Cet effet pervers du terrorisme a joué un rôle certain dans le dénouement de l'affaire algérienne.

Ces directives ont conduit ses hommes de main à exercer les sévices les plus barbares, assimilables à des crimes contre l'humanité. La faculté de médecine d’Alger s’interroge sur la complexité du fait algérien, et relève les atrocités qui ont été perpétrées dans le passé.

 


RÉPÉTITIONS DE L'HISTOIRE

En dehors de la guerre de 1954-62, enlèvements et crimes de guerre ont été pratiqués à plusieurs occasions dans l’histoire "algérienne" (10):

- la traite saharienne, du VIIe au XIXe siècle, a touché des millions d’Africains noirs,

- les incursions sarrazines ont dévasté une partie de l’Europe du VIIIe au Xe  siècle,

- la piraterie barbaresque, du XVIe au XIXe siècle, a enlevé un million d’Européens qui ont  subi la cruauté des maîtres (Cervantès) ou la souffrance des galériens,

- les razzias intertribales et la journée du tri instituée par les Almoravides ont causé de lourdes pertes,

- la guerre civile des années 1990 s’est traduite par 200.000 morts et 7.000 disparus.

Souvent, ce sont les plus radicaux qui se sont imposés, profitant d’une crise sociale ou économique pour rallier la masse inculte des mécontents, des obscurantistes et des fanatiques  religieux. C’est dans de telles circonstances que se font jour des risques de libanisation, lesquels, soulignés par la sociologue algérienne Malika Sorel-Sutter, appellent une fermeté de réaction. L’appel au djihad et à la charia sont en effet des anachronismes insupportables pour les Français.

Hélène L’Heuillet  exprime la même mise en garde contre le terrorisme islamique (11).

Maurice Faivre
le 4 mai 2011

 

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pièces documentaires

Le massacre de Melouza-Beni Ilmann,     

28 mai 57

"Plus de 300 cadavres, la plupart ignominieusement mutilés,

avec un sadisme proprement révoltant "

 

"Ce n'est plus, hélas! l'explosion spontanée d'instinct sadique

plus ou moins comprimé en temps normal. cela fait partie

d'un système consciencieusement élaboré et froidement appliqué"

 

" à coups de couteaux et de haches, les charcutant en une sanglante

frénésie"

 

"des Algériens ont immolé d'autres Algériens... les Musulmans ont

mené à la boucherie d'autres Musulmans "

 

Tribune de Genève

 

 

 

Maurice Duverger

 

 

Time Magazine

 

Témoignage

chrétien

 

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victimes algériennes du FLN à Melouza en 1957

 

"Oradours" algériens

La formule n'est pas outrée. Qu'il suffise de savoir qu'à Ain Abid, une petite fille de cinq jours, Bernadette Mello, fut tronçonnée sur le rebord de la baignoire, devant sa mère, dont on ouvrit ensuite le ventre pour y replacer le nouveau-né ! Que sous le même toit, le père, est assassiné dans son lit, amputé à la hache, des bras et des jambes. Que la tuerie n'épargne ni Marie-José Mello, une fillette de onze ans, ni la grand-mère de soixante-seize ans. Qu'à El Halia, sur 130 Européens, 32 sont abattus à coups de hache, de serpe, de gourdin, de couteau, les femmes violées, les tout petits enfants fracassés contre les murs.

Ces exemples peuvent aider à comprendre la réaction de ces Européens dont le frère, ou le fils, ou la femme, eurent à subir pareil sort.

La réaction de l'armée est vive, brutale... La répression frappe dès lors tous les musulmans... "l'escalade du sang" commence.

Cette relation de Marie Elbe dans Historia n°206 est contredite par le fils Mello, gendarme, et par R. Vétillard, historien.

La Commission de Sauvegarde du droit et des libertés constate "l'atrocité de la guerre de rébellion...le terrorisme frappe de préférence des innocents...les fellaghas tuent pour tuer, pillent, incendient, égorgent, violent, écrasent contre les murs les têtes des enfants, éventrent les femmes, émasculent les hommes.."

Rapport du préfet Haag, septembre 1957

 

Manquant de troupes, Zirout Youssef avait mis au point une technique qui consistait à rameuter des civils arabes, au préalables gavés de slogans et de fausses nouvelles, à les armer de tout ce qui se présentait, puis de les lancer, solidemment mais discrètement encadrés, contre des objectifs précis. Dès les premières réactions, les soldats du FLN se retiraient rapidement, laissant les masses musulmanes face à la répression.

Gérard Lemel, Paroles d'officiers, p.187.

  

Des atrocités que je ne veux ni oublier ni révéler

21 rappelés du 9ème RIC, dont 15 pères de famille, tombent dans une embuscade le 18 mai 1956 près de Palestro. Un horrible spectacle attend le lieutenant Poinsignon commandant la compagnie... Deux cadavres mutilés gisent dans les buissons. Les yeux sont crevés, les corps vidés de leurs entrailles et bourrés de cailloux. Les testicules ont été coupés et les pieds, dépouillés de leurs chaussures, sont zébrés de coups de couteau.

"Extermination au cours de la bataille, se demande le lieutenant ? Torture et massacre des survivants ? Macabre férocité sur des corps sans vie par la population du village voisin ou avec sa complicité ?

Sur certains des cadavres, on s'était acharné avec une effroyable sauvagerie... ce que nous avons vu était tel que j'ai demandé par écrit un examen médico-légal pour déterminer les causes de la mort et si les mutilations avaient précédé  ou suivi celle-ci. Je n'en ai jamais connu les résultats...

La gravité de mes constatations comme la douleur des familles m'ont fait un devoir de ne pas faire état de ces atrocités ".

Pierre Poinsignon, Historia n° 23-216

 

Le Casino de la Corniche

9 juin 1957, jour de la Pentecôte

Il est 18h30. On danse au coude à coude et joue contre joue sur la piste cirée du Casino... Soudain, en quelques secondes, c'est le drame. Une terrible explosion secoue tout l'établissement... La salle s'emplit instantanément de fumée et de poussière. À travers ce nuage, on distingue des fantômes qui titubent avant de s'abattre dans un invraisemblable désordre... L'estrade a été pulvérisée...Des dizaines de corps sont allongés parmi les débris de tables, de chaises, de verre pilé... Les rescapés se portent au secours des blessés. Ils marchent sur des jambes, des bras, des mains arrachées.

Des hommes et des femmes fuyaient comme s'ils venaient de s'échapper de l'enfer. Les vêtements déchirés, les yeux remplis d'épouvante, ils fonçaient droit devant eux.

 François Attard, Historia n° 35-228

 

Collaboration avec les barbouzes

Michele Chehbouni, Française pro-FLN, dénonce aux barbouzes un ingénieur de Berliet, Petitjean, qui serait membre de l'OAS. Elle participe à son arrestation et à son interrogatoire, rapportés par Azzedine :

Petitjean est attaché sur une chaise. Sur son front, de l'acide coule goutte à goutte d'une boite de conserve suspendue au-dessus de sa tête. Michèle reprend mot à mot la conversation surprise dans le bureau du directeur... Petitjean nie. L'acide coule, creusant d'atroces rigoles. Au bout de quelques heures, le point de limite de résistance est dépassé. Petitjean avoue...

Son corps découpé en morceaux sera découvert dans un sac, à quelques kilomètres d'Alger... Ponctuellement, l'opération est un succès.

Commandant Azzedine, Et Alger ne brûla pas, Stock, 1980, p.277

 

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1 - Les références sur les directives du FLN sont empruntées aux articles de Guy Pervillé : "La guerre d'Algérie sans mythes ni tabous" (L'Histoire d'octobre 1986) et "Terrorisme et torture" (L’Histoire d'octobre 1997), et aux articles de Historia-Magazine consacrés au terrorisme.

2 - Mohamed Benyahia, L'imposture au pouvoir, L'Arcantère, 1988,p. 47.

3 - Bulletins mensuels du colonel Schoen (SLNA) en 1955-56.

4 - Déclaration à Rivarol le 30 juillet 1964 et témoignage de Jacques Simon.

5 - Référence Maurice Faivre, Les combattants musulmans de la guerre d'Algérie, L'Harmattan, 1995, p.152-66. AEZ Meliani, Le drame des harkis, Perrin, 1993, p. 68, 77, 79. C. Brière. Qui sont les harkis ? l'Atlanthrope. 1974.

6 - La guerre moderne, Table ronde, 1961, et "Terrorisme et torture" , in Historia Magazine n°33-226

7 - Le Goyet,  La guerre d'Algérie (Perrin, 1989), p. 470-479

8 - La guerre d’Algérie. La fin de l’amnésie, Laffont 2004, p .496.

9 - Bulletin clandestin  de la Fédération de France, du 17-9-1959, cité par Pierre le Goyet p. 471 de son livre, en se référant aux archives de Jean Lamy.

10 - Malek Chebel, L’esclavage en terre d’Islam, Fayard, 2007. Charles-Emmanuel Dufourq, La vie quotidienne dans l’Europe médiévale sous domination arabe, Hachette 197. Jacques Heers, Les Barbaresques, la course et la guerre en Méditerranée, Perrin, 2001. Habib Souaïdia, La sale guerre, Gallimard, 2001.

11 - Malika Sorel-Sutter, "La France fait trop de concessions", Valeurs actuelles du 21 avril 2011. Hélène L’Heuillet, Aux sources du terrorisme, Fayard, 2009.

9782707133588 

 

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9 mai 2011

abolir les "lois mémorielles"

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Commémorations :

pour en finir avec les lois mémorielles,

Daniel Lefeuvre sur iTélé

 

http://www.itele.fr/emissions/magazine/arret-sur-info/video/9413

émission du lundi 9 mai 2011 sur iTélé

Pauvre Taubira...!

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- intervention de Daniel Lefeuvre :  "Commémorer l'abolition nous rassemble, dans la mesure où la date d'avril 1848, le décret Schoelcher, montre que la République a été capable d'abolir quelque chose d'absolument ignoble qui était l'esclavage après que l'abolition de la traite a été proclamée.
Mais ce que jaimerais entendre demain du Président de la République, c'est d'abord qu'il faut se battre contre tous les esclavages, y compris les esclavages contemporains qui perdurent aujourd'hui dans un certain nombre de pays.

D'autre part, si on fait de l'histoire, il faut faire de l'histoire jusqu'au bout. C'est-à-dire qu'on ne parle pas "la" traite dans l'Atlantique ou dans l'océan Indien, mais de l'ensemble des traites négrières qui ont précédé celle-ci. Je pense notamment aux traites internes à l'Afrique et à la traite arabo-musulmane qui ont donc précédé la traite transatlantique, c'est-à-dire la traite européenne, et qui se sont prolongées au-delà de l'abolition de la traite atlantique.

Et c'est tout le problème de cette date et de la loi de Mme Taubira. Parce que dans l'article 1er de la loi qui a été adoptée définitivement 2001, que dit-on ? On parle de la traite négrière transatlantique ainsi que de la traite dans l'océan Indien, et de l'esclavage perpétré à partir du XVe siècle aux Amériques et aux Caraïbes et dans l'océan Indien. Pratiquée par qui ? Uniquement par l'Europe.

Il y a donc une mise en cause extrêmement restrictive de ce qu'a été la traite. Et je crois, avec l'historien Pétré-Grenouilleau qu'il vaut mieux parler des traites. Je regrette donc que la loi ne mette en accusation que la traite européenne qui a été abolie en 1848 et que la France a combattue dans ses colonies au fur et à mesure de l'avancée de son empire colonial.

La deuxième chose regrettable dans cette loi, et j'espère que l'on ne va pas commémorer cet aspect-là, c'est évidemment l'anachronisme de la notion juridique de "crime contre l'humanité" puisque cette notion, juridique je le répète, est née au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Par conséquent, on reconstitue un passé pour servir les questions politiques du présent."

- interruption de François Durpaire : "Ce que vous êtes en train de nous dire, c'est qu'il ne fallait pas condamner les criminels nazis parce que le crime a été défini en 1945 ?"

- Daniel Lefeuvre : "La définition du crime contre l'humanité a été élaboré en 1945 à Nuremberg en présence des criminels nazis."

- François Durpaire : "C'est donc rétroactif. C'est une barbarie juridique." (1)

- Daniel Lefeuvre : "Ce n'est pas rétroactif. Les criminels nazis étaient présents lorsqu'on a défini la notion de crime contre l'humanité. Alors qu'aujourd'hui, il serait difficile de condamner les propriétaires d'esclaves grecs sous Périclès ou les propriétaires d'esclaves arabes ou noirs au XVIIe siècle ou encore les propriétaires français de la même époque.
Par conséquent, ce que je souhaite, c'est que le Président de la République dise également que l'État abandonne cette politique de lois mémorielles qui repose sur des enjeux politiques, sur l'anachronisme et qui corsète dangereusement le travail des historiens comme la tentative de procès contre Olivier Pétré-Grenouilleau en 2005 l'a montré."

_________________

 1) Oui, Nuremberg est une justice de vainqueurs. Mais il est faux de dire qu'elle est totalement rétroactive. C'est une formalisation de notions qui avaient été antérieurement définies. La déclaration d'une commission militaire internationale le 11 décembre 1868, à Saint-Petersbourg évoquait l'idée que : "l'emploi de pareilles armes serait contraire aux lois de l'humanité."
En 1899, la communauté internationale débat à La Haye de la "clause de Martens", relative aux "lois de l'humanité" et cette notion est présente dans le préambule de la convention de La Haye en 1907 sur les lois et coutumes de guerre : "les populations et les belligérants sont sous la sauvegarde et sous l’empire du droit des gens, tels qu’ils résultent des lois de l’Humanité."
En 1942, est créée la "Commission d'enquête des Nations unies sur les crimes de guerre" qui se réunit en octobre 1943. La Déclaration de Moscou d’octobre 1943, signée par Roosevelt, Churchill et Staline, stipule qu’à la fin de la guerre, les responsables de crimes de guerre seront extradés et jugés. Fin 1943, la conférence de Téhéran (États-Unis, G.-B. et URSS) annonce le jugement des criminels nazis. Nuremberg n'est donc pas tombé du ciel comme le prétend François Durpaire.

Michel Renard

 

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 __________________

 

deux types d'esclaves ?

Pour la loi Taubira, il y a deux types d'esclaves : 1) les victimes de la traite européenne méritent la reconnaissance et la considération mémorielle ; 2) les victimes (mais sont-ce vraiment des victimes dans son esprit ?) des traites internes à l'Afrique et de la traite arabo-musulmane : ces esclaves-là, il vaut mieux les oublier car ils viennent perturber le simplisme du doublet esclave noir/maître blanc.

Michel Renard

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28 avril 2011

la kouba de Nogent (1919) enfin reconstruite

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la kouba reconstruite est inaugurée

ce jeudi 28 avril 2011

 Michel RENARD - Daniel LEFEUVRE

 

La kouba de Nogent-sur-Marne, édifiée en 1919, effondrée en 1982, est reconstruite. Elle est inaugurée ce jeudi 28 avril 2011. N'ayant pu m'y rendre, pour des raisons personnelles, je me sens représenté par l'allocuation de Daniel Lefeuvre, mon ami.

Je le remercie pour tous les effots auxquels il a consenti pour faire faire aboutir ce projet que j'avais conçu en découvrant le dossier de la kouba aux Archives d'Outre-Mer à Aix-en-Provence et en retrouvant l'héritier du marbrier de 1919.

Je remercie tous ceux qui ont conjugué leurs efforts pour que cette résurrection voit le jour.

Des jeunes gens de vingt et quelques années sont venus mourir "pour la France" dans la boue des tranchées lors de la Première Guerre mondiale. Il s'est trouvé alors quelques esprits pour leur rendre hommage, en dehors de toute sollicitation officielle. Aujourd'hui, d'autres esprits généreux, ont additionné leur dévouement pour que l'édifice soit à nouveau debout. C'est une fidélité qui mérite le respect.

Nous avons fait un peu plus que les concepteurs de l'édifice premier. Nous avons pu ajouter les versets du Coran que le consul Émile Piat et les imams algériens présents alors à Nogent avaient imaginés sans avoir eu les moyens de les faire figurer au fronton de l'édifice.

Cette refondation de la kouba de Nogent-sur-Marne témoigne que la France n'est pas "islamophobe", que l'engagement aux côtés de ses principes n'a ni couleur ni religion, que seule compte l'adhésion à ses principes émancipateurs - ceux-là fussent-ils malmenés en certains temps et en certains lieux. Car nul idéal ne se déploie sans contradictions.

Michel Renard
professeur d'histoire
"découvreur" scientifique de la kouba de 1919

 

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- Qu'est-ce que la kouba de Nogent ?

- témoignage de Marc Arazi, conseiller municipal (28 avril 2011)

 

allocuation de Daniel Lefeuvre, président de l'association Études Coloniales

Il y a bientôt cent ans, entre 1914 et 1918, près de 450 000 soldats – volontaires et conscrits -, venus de toutes les colonies de l’empire français, participèrent, aux côtés des Poilus métropolitains et des Alliés, aux combats meurtriers de la Première Guerre mondiale et contribuèrent par leur courage à la victoire finale.

Si ils n’ont pas servi de «chair à canon» pour l’armée française, contrairement à une légende tenace, leur sacrifice, à l’égal de celui des combattants français, a été particulièrement élevé : 70 800, soit 13 % des effectifs mobilisés, ont donné leur vie pour défendre la France.

À Nogent-sur-Marne, lors du conflit, a été implanté un hôpital colonial destiné à soigner ces soldats, blessés lors des combats ou gravement malades. Ceux qui n’ont pu être sauvés, malgré les soins attentifs du personnel médical, reposent ici, dans ce cimetière.

C’est pour leur rendre hommage, que trois personnalités nogentaises, M. BRISSON, le maire de la Ville, M. HERICOURT, entrepreneur de monuments funéraires et le consul général Emile PIAT, décidèrent d’édifier une kouba, monument qui, dans la tradition islamique, honore un pieux personnage.

Inauguré le 16 juillet 1919, mais peu entretenu les années suivantes, l’édifice dû être rasé en 1982.

Mais, grâce au travail d’un historien, mon collègue et ami Michel RENARD, ces traces ont été retrouvées, aux Archives d'Outre-mer à Aix-en-Provence, puis chez le descendant de M. Héricourt, M. Gilles Martin, qui en a conservé précieusement les témoignages.

Aussi, dès sa création, l’association Études coloniales, a-t-elle décidé d’entreprendre les démarches pour la reconstruction de la kouba. Cette entreprise n’aurait pu aboutir sans l’appui déterminé d’un certains nombre de personnalités et d’associations auxquelles je voudrais rendre hommage. En premier lieu,

- à l’actuel maire de Nogent, M. Jacques MARTIN qui a immédiatement apporté son soutien «enthousiaste» à cette initiative.

- à M. Sébastien Eychennes, maire-adjoint chargé de la Mémoire, qui a suivi avec une attention toute particulière ce dossier et qui a contribué avec obstination à son avancement.

- Je voudrais également remercier les successifs ministres de l’Immigration, de l’Intégration et de l’identité nationales, messieurs Brice HORTEFEUX et Eric BESSON qui ont appuyé le projet de toute leur autorité et qui ont pris en charge une part élevée de son financement.

- Le Souvenir français, son président général, le contrôleur général DELBAUFFE, son délégué départemental, le colonel Hamon et son Comité nogentais doivent également être remerciés pour leurs contributions importante.

- M. Gilles CARREZ, député. Grâce à son intervention une subvention importante du ministère de la Défense a été obtenue. Je tiens également à souligner l’appui apporté par Jacques TOUBON, président de la CNHI, par le Comité d’Entente des Anciens Combattants et Victimes de Guerre de Nogent-sur-Marne, par l’association des Amis de Raoul Salan, par l’Association Mémoire et Souvenirs de l’Armée d’Afrique ainsi que par l’Union nationale des Anciens combattants musulmans.

- Je n’aurais garde d’oublier M. Gilles MARTIN qui, fidèle à l’engagement de son aïeul a accepté d’entreprendre et d’achever les travaux de reconstruction, sans que le financement de l’opération n’ait été pleinement assuré.

Enfin, un certain nombre de contributeurs privés, que je ne peux tous citer aujourd’hui, se sont associés à ce projet. C’est grâce à cet effort commun, que la kouba est aujourd’hui reconstruite et qu’ainsi, la République assure, à travers le temps, son devoir de mémoire à l’égard de tous ceux qui ont sacrifié leur vie pour défendre ses idéaux.

Je vous remercie.

Daniel Lefeuvre
Professeur des Universités
Président d’Etudes coloniales

___________________________________________________________

 

texte du bulletin municipal de Nogent :

Le Conseil municipal, par délibération du 23 décembre 1917, avait décidé de l’érection d’un monument dans le cimetière communal, destiné à honorer les militaires musulmans morts pour la France au cours de la guerre 1914-1918 et inhumés à Nogent.

C'est principalement à Émile Piat, consul général, attaché au cabinet du ministre des Affaires étrangères et chargé de la surveillance des militaires musulmans dans les formations sanitaires de la région parisienne, que l'on doit la construction de la kouba de Nogent. Grâce à l’assistance de M. Brisson, maire, et à un généreux donateur, M. Héricourt, entrepreneur de monuments funéraires, ce monument est construit en 1919. Inauguré le 16 juillet, mais peu entretenu dans les années qui suivirent, il fut détruit en 1982.

La reconstruction de la kouba du cimetière de Nogent en 2011 a été réalisée par l’entreprise funéraire E.L. Martin. Ce projet décidé par Jacques J.P. Martin, maire de Nogent-sur-Marne, suivi dans sa mise en oeuvre par son adjoint Sébastien Eychenne et l’association Études Coloniales, marque comment la République assume, par-delà le temps, son devoir de mémoire à l'égard de tous ceux qui ont donné leur vie pour défendre ses idéaux.

Le monument reconstruit sera inauguré sous le haut patronage du ministre de la Défense et en présence de Jacques J.P. Martin, maire de Nogent-sur-Marne, Sébastien Eychenne, adjoint au maire délégué au devoir de mémoire, Daniel Lefeuvre, président de l’association Etudes coloniales et des associations d’anciens combattants.

Du 28 avril au 19 mai, une exposition se tiendra dans le hall de l’Hôtel de Ville.

Cimetière de Nogent
134, rue de la Paix - Le Perreux-sur-Marne


Jeudi 28 avril à 10 h - source

 

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19 avril 2011

Millénaire de Hanoï

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Hanoï, un quartier annamite - source

 

Hanoï, mille ans

En septembre 2009, était inaugurée à Hanoï l'exposition "Traits d'architecture, Hanoï à l'heure française (1875-1945". Cette manifestation était organisée dans le cadre de la coopération entre la Direction des Archives de France et la Direction d'État des Archives du Vietnam. Elle marquait le début des célébrations commémorant le millénaire de la capitale vietnamienne en octobre 2010.
Cette exposition fut l'occasion de voir réunies des reproductions de cartes, de photographies et de relevés d'architecture conservés aujourd'hui à Hanoï et à Aix-en-Provence.
Le Service des Archives et Bibliothèques de l'Indochine a été créé par Albert Sarraut en 1917. (lire la suite)

- source : http://www.archivesnationales.culture.gouv.fr/anom/fr/11_anc.documents/1011_Hanoi/documentdumois.html

 

Diapositive1

 

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Hanoï, la gare d'autobus (1930/1950) - source

 

- ANOM : Archives Nationales d'Outre-mer à Aix-en-Provence

 

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9 avril 2011

Algériens déportés en Nouvelle-Calédonie (avec listes nominatives)

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La déportation vers la Nouvelle-Calédonie

Introduction

Carte Nouvelle-CalédonieAprès la défaite de la légendaire Commune de Paris (mai 1871), quelques milliers d'insurgés furent envoyés, comme mesure de punition, à l'autre bout du monde. La Nouvelle-Calédonie, un archipel du Pacifique Sud, était depuis une vingtaine d'années territoire français où, tout comme en Guyane, il avait été mis en place une colonie pénitentiaire.
Une centaine d'Algériens furent également déportés vers le Pacifique. Ils avaient, eux, en ce moment même, commencé une guerre d'indépendance audacieuse contre l'occupant français, et avaient finalement dû se rendre après de longs mois de combats.
Le sort des Communards bannis a été consigné nommément sur le site web les Déportés de la Commune et a été décrit en détail dans la littérature.

Ceci n'est pas le cas des Algériens déportés. Leurs noms apparaissent dans un document fascinant issu de la Nouvelle-Calédonie, dans lequel on trouve les noms, professions et autres informations sur des prisonniers, qui furent consignés dans un registre lors de chaque arrivée de bateau de transport. Ce registre officiel a mystérieusement échoué dans les archives d'un collectionneur et anarchiste et se trouve (donc) maintenant dans les collections de l'IISG [Institut international d'histoire sociale, à Amsterdam].

Noms des déportés algériens En lire d'avantage ...
• En Algérie
• Le transport
• En Nouvelle-Calédonie
• Intégration et retour
• Noms des déportés algériens
• Sources

Texte et compilation : Margreet Schrevel, mas@iisg.nl

 

Noms des déportés algériens

Les noms des déportés algériens entre 1874-1876 (archive Nettlau n° d'inv. 3155*)
NB Le noms ont été notés phonétiquement par le fonctionnaire du 'Commandant Territorial'. L'orthographe est donc incertaine
Voir une liste avec tous les noms (.pdf, 950Kb)

9me Convoi (arr. 16.08.1874) Loire, Déportation Simple

Noms des déportés algériens

2745 Ahmed ben Amor, cultivateur (farmer, landbouwer)
2746 Ali ben Saad, cultivateur
2747 Ahmed ben Saïd, cultivateur
2748 Ali Amzian Ou Rezzouz, d[joua]d (= noble, nobleman, edelman)
2749 Ali Amzian Naït Ou Azzoug, djouad
2750 Bel Kassem ben Gassem, djouad
2751 El Arbi ben Laribi, djouad
2752 Haoussim ben Ali, mokrain (mokadem, inspecteur des impôts, inspector of taxes, belastinginspecteur(?))
2753 Lounès-ben-El-Hadj-Mohamed-ou-Allah, cultivateur
2754 Mady Mohamed ben Moussa, djouad
2755 Hasen El Achebeb, caïd (chef)
2756 Lakdar ben Doudou, caïd, France
2757 Mohamed ben Belkassem, cultivateur
2798 Mahmed ben Messaoud, djouad
2759 Mohamed ben Ahmed ou El Haoussin, djouad
2760 Mohamed ben El Hadj Ahmed ben Caleb, fs de Saron?
2761 Mohamed Ben Ali, cultivateur
2762 Mohamed ben Belkassem ou Hanouch, domestique
2763 Mohamed ben El Hadj Ahmed ben Dahmani, cultivateur
2764 Mohamed dit Ahmed ben El Hadj Ali ben Dahmani, djouad
2765 Mohamed Ben Saad, djouad
2766 Mohamed Ben Saïd, cultivateur
2767 Si Ahmed ben Saïd dit Al Beggare, khadji, Dumbéa (juge, judge, rechter)
2768 Mohamed ben Haz Allah, khadji
2769 Omar Hamided, caïd
2770 Rabah Naït Zerroug, cultivateur, 10 ans de détention
2771 Ramdan ben Mohamed, djouad
2772 Saïd ben Ahmed, cheik
2773 Si Raham ben Mohamed ou El Hadj, cultivateur
2774 Simain ben Omar, djouad
2775 Si Saadi ben Allel, propriétaire (land owner, grondbezitter)
2776 Tahar ben Akli, cultivateur, décédé, le 7 7me 1876
2777 Tahar ben Kerrich, djouad

11e Convoi Calvados (arr. 18.01.1875), Déportation Simple

2919 Ahmed Amar Amziam, cultivateur
2920 Ahmed ben ben cheik Messaoud, djouad
2921 Ahmed ben Naceur ben ali Chabbi, djouad
2922 Ahmed Boumezrag El hadj El Mokrani, djouad
2923 Ahmed ou Arab Naït ou Yahia, cultivateur
2924 Ahmed ou Lounès, caïd
2925 Aïssa ben Béchar, cultivateur
2926 Ali ben Galouz, kalif, mort le 18 9me 1875
2927 Ali ben Mohamed ou Kafsi, caïd (=chef)
2928 Ali ben Ostman, bachaga(?) (directeur, director, leider)
2929 Ali ben Telaache, caïd, mort le 18 Janvier 1875
2930 Ali ben Tahar, cultivateur
2931 Ali Boudjema, djouad
2932 Ali ou Ameur ou Boudjemah, caïd
2933 Ali ou Saïd, spahi (cavalier, horseman, ruitersoldaat)
2923 Amar ben el Ouennoughi, spahi
2935 Ameur ou Ahmed, cultivateur
2936 Ameur Naït Amara, djouad, mort en rade le 18 Janvier 1875
2937 Azzis ben Mohamed Amzian ben cheik El Haddad, caïd
2938 Bachier ben ali Bouguerrah, cultivateur
2939 Brahim ben Amar, spahi
2940 Cheikh Mohamed ou El Maoussin, spahi
2941 El Hadj ben Mohamed El Djadj, spahi
2942 Kaddour ben Kaddour ben Ali Embarredz (?), cultivateur
2943 Mohamed ben Mohamed Amziam ben cheikh El [H]addad, marabout (teachter, leraar)
2944 Messaoud ben El Kaïd, marabout
2945 Mohamed Amokrani ben Belkafsem ou Kafsi, propriétaire
2946 Mohamed Aresqui ben Amadouch, mokkadem (chef)
2947 Rabia ben Ali, amir (chef, commander, legeraanvoerder)
2948 Mohamed ben Ali, cultivateur
2949 Mohamed ben Lakdar, spahi
2950 Mustapha ben Naceur, cultivateur, P.D. [presqu’ile Ducos]
2951 Saïd Naït ou El Hadj, amir
2952 Salah ben Aiech ben Chitter, cheikh
2953 Si Saïd ben Ali, amir
2954 Taeb ben Embarreck ben Bonfils, cultivateur
2955 Si Saïd ben Ramdan, fertkath (?)
2956 Touzi ben Amara, cultivateur
2957 Yousef ben Amokrani, adel (?)
2958 M’ahmed ben Kaddeche, cultivateur
2959 Mohamed ou Ali ou Saanoum, mokkadem
2960 Hadj Ahmed ben Abed, cheikh

11e Convoi Calvados (arr. 18.01.1875), Enceinte fortifiée

838 Adallah ben ali Chabbi, cultivateur. D.S. [= Déportation simple]
839 Abdallah ben Amar, djouad. D.S.
840 Ahmed ben Brahim, djouad. N[ou?]
841 Ahmed ben Dahmani, djouad. D.S.
842 Ali ben Amor, djouad
843 Ali El Srir ben Yalaoui (?), cheik
844 Amar ben Adallah El Yalaoui, cultivateur. D.S.
845 Brahim ben Cherif, cheik. N
846 Hadj Ahmed ben Abed, djouad. Commué D.S.
847 Khaled ben Dahmani, cultivateur
848 Lakdar ben Ali Chabbi, djouad. D.S.
849 M’ahmed ben Kaddèche, djouad. D.S.
850 M’ahmed Naït Amar. D.S.
851 Mohamed ou Ali ou Gaumoun (?) mokadem. Commué D.S.
852 Mohamed ou Ameur, cultivateur
853 Mohamed ben El Hadj ben Ganah, cheik. Commué D.S.
854 Salah ben Abassi, djouad. Décédé le 13 Avril 1877
855 Salah ben Ali Bouguerrah, Krammes (?). D.S.
856 Salah ben Dahmani, cheik
857 Tahar ben Ahmed Salah, cultivateur. N

12me Convoi Garonne (arr. 12 mars 1875) ; Commués

2968 Mohamed-ben-El-hadj-ben-Ganah, cheikh

15e Convoi Rhin (arr. 30 janvier 1876) Déportation Simple

3101 Abdallah-ben-Amar
3102 Amar ben Abdallah ben Yalaoui
3115 Si-Mohammed Naït Braham
3128 Ahmed-ben-Dalmani
3129 Addallah ben Ali Chabbi
3130 Salah ben Ali Bouguerrah
3131 Lakdar ben ali Chabli
3237 El Hadj ali ben Reghris
3242 Sadock ben el Moulock
3351 Salah ben Dalmani
3352 Ali et Amir ben Malahoui
3353 Tohab ben Ahmed Jallah

15e Convoi Rhin (arr 30 janvier 1876) Enceinte fortifiée

887 Boudjenah ben Cheik. Décédé le 11 juin 1877
897 Ahmed ben Aiech. "Eclaireur" (= corps d’armée, armed forces, legermacht, 1878)
898 Amar ben Salem
899 Chelehi-ben-Dou
900 El Mebrouk ben Saïd "Eclaireur"
902 Mohamed ben Salem "Eclaireur"

 

 

 

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8 avril 2011

affaire Henri Pouillot (Maurice Faivre)

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la villa Sesini à Alger
 

 

lettre du général Maurice Faivre

à la chaîne LCP

 

Mademoiselle,

Ne connaissant pas l'adresse courriel de Benoit Duquesne, je vous serais obligé de lui transmettre les éléments historiques ci-dessous, concernant les déclarations de Henri Pouillot.

Je ne comprends pas qu'une chaîne sérieuse comme LCP puisse faire confiance à un tel agitateur politique, affabulateur de crimes qu'il n'a pas commis.

Je possède d'autres éléments sur les affaires Audin, Sesini, Alleg, Boupacha, Ighilariz, Aissat Idir, mais la directrice des Archives de France m' a interdit de les publier (lettre du 10 avril 2003, confirmée par le CADA le 26 septembre 2003).

Je transmets ce message aux historiens avec lesquels je travaille, et au général Schmitt.

Je mets en copie le sénateur Guerry, qui connaît bien le problème des 1.700 disparus de la guerre d'Algérie.

Maurice Faivre
février 2011

 

 

Affaire Pouillot

Le témoignage des personnels de la Sécurité militaire Air (4 officiers et le Commissaire divisionnaire Lecornec), et le contrôle des personnels de l'unité 01360 font apparaître qu'en 1961, ils occupaient la villa Sesini, où le soldat du Train Pouillot n'avait pas accès. Ces cinq témoins certifient qu'ils n'ont jamais vu de torture à la villa Sesini en 1961 (1). Ce n'est que du 23 décembre 1961 au 6 mars 1962 qu'une section du 584ème BT y a séjourné. Pouillot n'y aurait donc pas passé 10 mois, il n'a pas pu se procurer de documents militaires attestant de son affectation.

La tension règnant au début de 1962 à Alger, où 20 escadrons de gendarmerie mobile et 6 CRS contrôlent la ville, laisse planer de sérieux doutes sur les arrestations, tortures et viols massifs qui se seraient déroulés dans la villa. Ni le commandement de la gendarmerie, ni la Commission de Sauvegarde n'en font état. La priorité des forces de sécurité était alors la lutte contre l’OAS.

Le général Schmitt a été condamné en première instance parce que selon le Tribunal, il a «manqué de prudence» en prétendant que Pouillot raflait des filles en ville pour les violer. Schmitt a reconnu cette erreur.  Le Tribunal estime cependant que «Schmitt a assez d’éléments pour penser que Pouillot est menteur sur certains points». Ces points sont les suivants :

- il décrit une expédition punitive du 584ème bataillon du Train qui aurait fait 400 morts le 24 juillet 1961, or il s’agissait d’une opération ordonnée et encadrée qui avait donné lieu à des escarmouches qui firent 4 blessés, dont un décéda le 25 juillet,

- 4 à 5.000 Algériens auraient été torturés en 10 mois à la villa Sesini, chiffre extravagant,

- une centaine de femmes y auraient été victimes de viols, c’est aussi extravagant.

Pouillot ne se souvient d’aucun nom de ses camarades ni de ses chefs, ce qui ne permet pas à Rotman de vérifier ses accusations, et ce qui prouve l’affabulation de Pouillot. En revanche le général Schmitt a produit deux officiers du 584ème BT (André Cousine et Hardy) qui démolissent la version de Pouillot.

Maurice Faivre

 

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Henri Pouillot

(1) Florence Aubenas, article de Libération du 16 juillet 2003.

 

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4 avril 2011

Sétif, Guelma, mai 1945 : nouvelle édition du livre de Roger Vétillard

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nouvelle édition du livre de Roger Vétillard

La seconde édition du livre de Roger Vétillard, Sétif, Guelma Mai 1945 Massacres en Algérie, est parue. Il s'agit d'une version entièrement revue avec plus de 450 modifications, 80 références bibliographiques nouvelles) et augmentée (610 pages en dépit de la suppression de 8 pages) et d'une rédaction plus concise  Deux éléments paraissent importants :

- ce livre révèle le nom du premier tué à Sétif le 8 mai 1945 qui est un européen et les indices et documents qui permettent d'arriver à cette conclusion

- il donne des indications inédites qui permettent, selon l'auteur, d'innocenter le préfet Lestrade-Carbonnel et qui accablent le sous-préfet Achiary à Guelma.

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* l'auteur interviewé sur le 8 mai 1945 en Algérie

* présentation_seconde_édition en pdf

 

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3 avril 2011

CRS en Algérie, de Jean-Louis Courtois

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CRS en Algérie, de Jean-Louis Courtois

 

Le livre de Jean-Louis Courtois, CRS en Algérie, aux éditions Marines (groupe Ouest-France) est le premier à traiter ce sujet et sert d'argumentaire à un documentaire qui sera diffusé en février/mars 2012 sur France 2.

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présentation éditoriale de l'ouvrage

La guerre d'Algérie a été une période charnière dans l'emploi des CRS.
De 1952 à 1962, des milliers de fonctionnaires de police ont traversé la Méditerranée pour faire respecter l'ordre républicain. Ces policiers ont payé leur engagement au prix fort, comptant de nombreux tués et blessés dans leurs rangs. Sous le commandement d'un chef d'exception, Henri Mir, ils ont accompli leur mission dans la droite ligne du gouvernement légal de Paris et ceci, malgré les pressions des différents camps.
Aux heures les plus sombres de cette période, ils ont su s'opposer aux militaires pour conserver aux compagnies républicaines de sécurité leur vocation de force civile. Leur sang-froid, leur circonspection et leur respect de toutes les communautés qui se sont si douloureusement affrontées ont été reconnus de tous, y compris des plus hautes autorités civiles et religieuses.
Pour la première fois, les relations souvent tumultueuses entre les hommes politiques, les militaires putschistes, les officiers de l'armée et les CRS sont dévoilées dans ce livre à partir d'archives confidentielles et secrètes jamais publiées.

* commander ce livre

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29 mars 2011

commissaire de police pendant la guerre d'Algérie

9782360130436FS 

 

 

Roger Le Doussal, policier, témoin,

acteur et historien en Algérie

Roger VÉTILLARD

 

Roger Le Doussal : Commissaire de Police en Algérie (1952–1962), Riveneuve éditions, Paris mars 2011, ISBN 978-2-36013-043-6.

Il s'agit d'un très gros ouvrage de 948 pages, passionnant, très documenté et qui en fait traite concomitamment de plusieurs sujets. C'est une chronique des dix dernières années de l'Algérie Française, du Sud au Nord, du bled aux grandes villes, du sable du Sahara aux bords de la Méditerranée, des pieds-noirs aux musulmans, de la police et de l'armée.

C'est aussi un récit d'histoire de la guerre d'Algérie, des politiques successives de la France en Algérie, des méfaits de l'ALN et de ceux de l'OAS. Ici les abondantes notes infra-paginales sont plus importantes que le texte. Avec ces annotations le témoin, l'acteur et l'historien se rejoignent.

Les effets favorables de l'arrivée au pouvoir en mai 1958 du général De Gaulle sont indéniables pendant deux ans : le FLN était en difficultés jusqu'en juin 1960. Et il est évident que le mois de mai 1958 fut le théâtre d'un phénomène collectif imprévu, une sorte de contagion de la confiance et que durant plusieurs mois dans les villes mais surtout dans les campagnes, une grande partie de l'opinion musulmane échappa au FLN.

Et à ceux qui disent aujourd'hui que les Français d'Algérie ont pris leurs désirs pour des réalités, il est rappelé que l'UNR fut fondée en vue des élections législatives de novembre 1958 "pour maintenir l'Algérie dans le cadre de la souveraineté française".

C'est enfin, le parcours d'un jeune policier métropolitain qui découvre à vingt-et-un ans un pays  auquel il s'attache, où il fonde une famille et s'y installe. Les rapports professionnels qu'il rédige constituent un véritable journal qu'il redécouvre cinquante ans plus tard parfois à sa grande surprise. C'est en effet celui d'un homme dont les présupposés idéologiques se heurtent aux réalités du terrain.

À travers ce récit, on découvre que les jeunes français d'Algérie à la fin des années cinquante vivent cette période de troubles avec une réelle insouciance ; ils s'accommodent des problèmes d'insécurité et n'imaginent pas un avenir loin de leur terre natale. Avec une plume alerte et agréable, le Commissaire Le Doussal - qui fut en 1989 directeur de l'Inspection Générale de la Police – confronte ses souvenirs personnels à des lectures récentes.

 

les erreurs de plusieurs historiens

Cela l'amène à relever les erreurs de plusieurs historiens. C'est vrai pour Hassen Derdour (1) dont l'auteur montre les insuffisances et les fausses-révélations, les inexactitudes et le manque d'objectivité, les manipulations des faits qu'il transforme en roman historique. C'est à propos de ces récits que l'auteur  écrit  que "si un jour, une commission mixte d'historiens français et algériens entreprend d'écrire une histoire commune de la guerre, elle devra commencer par la purger des allégations mensongères…".

C'est vrai pour Sylvie Thénault (2) qui ne voit que les côtés négatifs de l'activité de la justice française à cette période. C'est surtout vrai pour Jean-Pierre Peyroulou (3) dont les affirmations sur la police en Algérie sont contredites, preuves à l'appui. C'est encore le sort réservé à son collègue policier Jacques Delarue (4) dont Roger Le Doussal  relève le parti-pris. Il est impossible en quelques lignes de résumer une telle somme, d'en montrer tous les intérêts et de citer toutes les révélations, réflexions et analyses. Il faut en souligner la rigueur du raisonnement, l'objectivité indéniable et la richesse des sources.

Mais au fil des pages on y découvre des informations inédites. L'auteur a participé en février 1955 à l'interrogatoire de Mostefa Ben Boulaïd  responsable de la Zone I (Aurès). Le compte-rendu qu'il en livre mérite d'être connu. Robert Lacoste aurait basculé dans la guerre à outrance contre le FLN après l'embuscade de Palestro le 18 mai 1956, un peu comme Jacques Soustelle l'a fait après le 20 août 1955. C'est l'erreur des gouvernements français d'avoir pensé en laïcs les motifs profonds de la rébellion musulmane, c'est-à-dire d'avoir sous-estimé son moteur religieux. On retrouve un aspect souvent tu de cette guerre d'Algérie, celui qui opposa le MNA et le FLN.


anecdotes oubliées

On relève quelques remarques frappées au coin du bon sens : ainsi il faut une certaine dose d'audace à certains ex-FLN qui dénoncent aujourd'hui le manque de reconnaissance de la France envers ses tirailleurs algériens anciens combattants alors que l'ALN les a méthodiquement massacrés pendant 7 ans. Ou encore pourquoi le non de la Guinée au référendum de septembre 1958 est-il considéré comme définitif alors que le oui de l'Algérie ne l'est pas ?

On apprend des anecdotes oubliées comme le refus que le colonel Ahmed Rafa opposa au général De Gaulle en 1962 qui lui demandait de prendre le commandement de la force locale prévue par les accords d'Évian. Le futur premier général musulman français choisit la France et non l'Algérie du FLN.

Enfin au passage l'auteur rappelle  que la guerre d'Algérie, du fait du FLN a fait plus de 20 000 morts, 13 000 blessés et 13 000 disparus parmi les civils musulmans, ce qui prouve que cette faction ne représentait pas loin s'en faut tous les musulmans du pays. Avec ce livre les chercheurs, les historiens, les curieux de l'histoire de l'Algérie disposent désormais d'un outil irremplaçable et original. Ne pas l'utiliser et ne pas le lire seraient une erreur pour qui veut mieux connaître ces événements.

Roger VÉTILLARD 



1 - Hassan Derdour, Annaba, 25 siècles de vie quotidienne et de luttes, SNED éd. Alger  1983, Tome 2.
2 - Sylvie Thénault, Une drôle de Justice, La Découverte éd. Paris 2004.
3 - Jean-Pierre Peyroulou, "Rétablir et maintenir l'ordre colonial ; la police française et les Algériens en Algérie Française de 1945 à 1962" in La Guerre d'Algérie 1954-2004, Robert Laffont éd. Paris 2004.
4 - J. Delarue, "La police en paravent et au rempart" in La guerre d'Algérie de J.P Rioux, Fayard éd. Paris 1990.

* sur Roger Vétillard, un article de Guy Pervillé

* vidéo : Roger Vétillard, sur les événements de mai 1945 à Sétif

9782851622136FS

 

__________________________________________

 

 

Roger Le Doussal met à mal

bien des idées reçues

général Maurice Faivre

 

Additif à la recension de Roger Vétillard

Tout à fait d’accord avec le jugement de Roger Vétillard, je voudrais simplement le compléter par les précisions suivantes :
- débutant comme Commissaire de police à Laghouat1, puis à Bou Sadda de février 1952 à octobre 1954, Roger Le Doussal est affecté aux RG ( renseignements généraux) à Batna (nov.54) puis à Bône (juillet 55). Il rejoint la Direction de la Sûreté nationale à Alger de février 1960 à janvier 1962. Rapatrié  à la SN Paris, puis aux RG Toulouse, il quitte le service en 1989 comme Directeur de l’Inspection générale de la Police nationale ;
- ses témoignages, précis et localisés, démontrent que la Police d’Algérie n’était pas un ramassis de racistes, politisés, partisans, inefficaces et routiniers, tels qu’ils sont diffamés par Peyroulou, Vidal-Naquet, Delarue et Sylvie Thénault, et que les milices privées n’ont existé qu’en 1945 à Guelma ;
- il rappelle que le Parti communiste, exultant à la chute de Dien Bien Phu, est devenu le compagnon de route du FLN ;
- ayant interrogé Mostefa Benboulaïd à Tunis, il confirme que le terrorisme total, se référant au djihad, a été la politique initiale du FLN (bien avant l’attentat du 10 août 1956 rue de Thèbes), appelant à la chasse au roumi et terrorisant une population musulmane qui n’adhérait pas à ses thèses (Daho Djerbal) ; Zirout Youssef, promoteur des massacres, est devenu héros national de l’Algérie ;
- l’horrible embuscade de Palestro n’est pas l’inversion de l’ordre politique et symbolique décrite par R.Branche ;
- la drôle de justice française, dénoncée par Sylvie Thénault, aurait méritée d’être comparée à la pseudo-justice du FLN, dont les excès sont justifiés au nom de la Charia ;
- la tentation de la torture, moralement condamnable, était confrontée au dilemme entre deux devoirs : protéger des innocents ou respecter la dignité humaine ;
- il estime que 50 Inspecteurs détachés dans les DOP ont été des collaborateurs actifs de la recherche du renseignement ; la lutte contre le terrorisme à Bône a été conduite en coopération étroite entre l’officier de renseignement du Secteur et les RG, à la demande du général Vanuxem ; le succès de l’action psychologique de l’armée, après le 13 mai, a été compromis par le retrait des militaires des CSP, qui a entraîné l’opposition des Français d’Algérie et le trouble des musulmans ;
- l’auteur confirme le point de vue du général Khaled Nezzar, qui condamne la légéreté avec laquelle les djoundis de Tunisie étaient envoyés au casse-pipe sur le barrage ;
- alors qu’en 1961 la Police est engagée en priorité contre l’OAS, le chef du SNA Aubert, succédant au colonel Godard , est partisan de la monstrueuse Force locale ; il relève 1.100 policiers dans l’année ; on ne peut parler cependant de complicités de policiers avec l’OAS,  7 sur 2.000 CRS ont déserté ; plus tard, la mission Choc du Cre Haq est renseignée par les barbouzes du MPC, et indirectement par le FLN.

La richesse des informations recueillies par R. Le Doussal appellerait bien d’autres commentaires2. Cette lecture, écrit Georgette Elgey, met à mal bien des idées reçues. Souhaitons qu’après elle, de nombreux lecteurs fassent le même constat.

Maurire FAIVRE
le 14 avril 2011


(1) L’administrateur Georges Hirtz et Jean Vaujour sont alors ses références.
(2) Ainsi la destruction des archives de la DST le 24 décembre 1974, et les difficultés rencontrées par le Directeur le Doussal pour faire ériger une plaque à la mémoire des 11 Commissaires tués par attentat.

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22 mars 2011

FLN en 1962 : prélèvements sanguins forcés ?

 

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Les «vampires» à Alger, Oran et Tlemcen

(avril-juillet 1962) :

une rumeur de la guerre d’Algérie ?

 Grégor MATHIAS

 

Le cessez-le-feu du 19 mars 1962 symbolise pour beaucoup la fin des combats, cependant il ne signifie pas le retour de la paix. En effet, moins d’un mois après les accords d’Evian, les enlèvements d’Européens par le FLN se multiplient à partir du 17 avril 1962 [1]. D’avril à juin 1962, des rumeurs persistantes agitent alors Alger et Oran, évoquant l’enlèvement d’Européens par le FLN dans le but de procéder sur eux à des prélèvements sanguins. Les structures médicales du FLN connaissent en effet des graves pénuries en poches de sang, comme le montrent des sources du FLN et du CICR [2].

Le recours aux enlèvements d’Européens pour pallier cette pénurie de sang pourrait donc être nécessaire aux structures médicales du FLN. Ne s’appuyant sur aucune preuve, ces rumeurs ont été jusque là souvent négligées par les historiens de la guerre d’Algérie. Or, un rapport de la Légion étrangère n° SP.87.581/AFN datant du 13 juillet 1962, évoquant le récit d’un légionnaire enlevé sur la plage des Sablettes à Arzew, éclaire d’un jour nouveau les prélèvements sanguins [3].

Cet enlèvement a lieu le 8 mai, au moment même où un rapport du CICR de la mission du 30 avril au 14 mai 1962 demande «des moyens de transfusion et de médicaments pour les quartiers musulmans d’Alger et d’Oran» [4]. L’objectif de cet article est de faire une analyse critique des sources sur lesquelles reposent les rumeurs de «vampires» à Alger et Oran entre la période du cessez-le-feu et celle de l’indépendance de l’Algérie, en distinguant celles qui reposent sur des fantasmes, sur la déformation de faits avérés d’enlèvements de celles qui iraient dans le sens de la pratique de prélèvement sanguins.

 

Les rumeurs algéroises

Selon Jean Monneret, les enlèvements d’Européens atteignent «un sommet en mai 1962, où pour la seule ville d’Alger, ils s’élèveront à plus de 276 enlèvements» [5]. Le mobile crapuleux, les représailles aux actions de l’OAS, le moyen d’obtenir des renseignements sur l’OAS et la volonté de faire partir les Européens par la terreur sont les motifs souvent avancés aux enlèvements, cependant dans le même temps, une rumeur agite les milieux européens : les enlèvements auraient pour objectif de procéder à des prélèvements sanguins sur les détenus.

Dans son étude sur l’OAS, le journaliste R. Kauffer évoque les rumeurs qui agitent les quartiers européens au sujet des Européens enlevés en 1962 : «des bruits terribles courent les quartiers européens : ils seraient emmenés dans des hôpitaux clandestins du FLN et vidés de leur sang pour guérir les Algériens blessés. [6]» À Alger, le chef de l’OAS J.-C. Perez rapporte les propos des sympathisants ou militants OAS affirmant que bon nombre d’enlèvements d’Européens par le FLN ont pour but d’effectuer des prélèvements sanguins, mais aucun d’eux n’apporte de preuve justifiant leurs propos [7]. Un lieu de prélèvements sanguins souvent cité dans les écrits [8] est celui du quartier de Beau-Fraisier. Ce quartier avait été progressivement investi par le FLN. Les habitants européens intimidés avaient dû évacuer le quartier.

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quartier du Beau-Fraisier

Un officier en poste à Alger, le commandant Thomas [9], évoque dès le mois de février 1962 l’hypothèse d’enlèvements de jeunes gens et jeunes filles dans le but d’effectuer des prélèvements sanguins. Il reconnaît pourtant l’absence de preuve : «Je n’ai jamais pu établir l’authenticité de ce fait». La date de février 1962 peut paraître extrêmement précoce pour ce type d’enlèvement, alors même que les opérations militaires françaises n’ont pas été interrompues par le cessez-le-feu du 19 mars. Le commandant Thomas mentionne la clinique de Beau-Fraisier dirigée par un Européen, qui protège et soigne dans sa clinique les blessés du FLN. Cette clinique est aussi soupçonnée de pratiquer des prélèvements sanguins sur des Européens enlevés. À la fin du mois de mars, un commando OAS dirigé par le capitaine Murat lance une opération contre la clinique pour rechercher le commandant Azzedine, responsable de la zone autonome d’Alger, et exécuter les blessés du FLN.

les structures médicales du FLN et les rumeurs

L’opération de l’OAS visant la clinique de Beau-Fraisier va avoir des conséquences importantes, en raison de l’identité des victimes. Selon la version du commandant Thomas, «les musulmans tués à la clinique ont tous une fiche au 2e Bureau [10]». Yves Courrière donne une autre interprétation de cette action au Beau-Fraisier, qu’il situe en avril. L’OAS aurait «mitraillé à bout portant les malades de la clinique de Beau-Fraisier.» Les neuf victimes seraient des patients et non des membres du FLN. Ce massacre des malades de Beau-Fraisier [11] incite les responsables de la zone autonome d’Alger à interdire aux musulmans de se faire soigner dans les cliniques et hôpitaux européens d’Alger.

Le FLN algérois a donc été obligé de créer dans l’urgence ses propres structures médicales. Il lui fallait pallier l’absence de protection des musulmans soignés dans les hôpitaux européens. Plus tard, en mai, le commandant Thomas procède personnellement à trois perquisitions dans des villas du quartier de Beau-Fraisier. Il ne trouve que des prisonniers et des cadavres d’Européens enlevés, portant des traces de tortures. Le FLN pratiquait alors la torture sur des Européens pour obtenir des renseignements sur l’OAS. Les indications apportées par le commandant Thomas sur les trois villas perquisitionnées ne permettent en rien d’envisager que les blessures provenaient d’actes médicaux liés à des prélèvements sanguins ou que les lieux servaient à procéder à des actes médicaux.

La rumeur de prélèvements sanguins s’est ainsi focalisée sur la clinique de Beau-Fraisier, puis a concerné l’ensemble du quartier de Beau-Fraisier, en prenant prétexte de la présence de lieux de détention et d’interrogatoire du FLN ; cependant cette rumeur n’a aucune consistance concernant les prélèvements sanguins forcés d’Européens.

Échaudé par l’action de l’OAS, le FLN a préféré créer ses propres structures médicales dans d’autres quartiers moins exposés. Si Azzedine mentionne trois cliniques du FLN : dans la Casbah, à Climat-de-France et à Kouba. Y. Courrière et Si Azzedine décrivent la structure médicale algéroise du FLN. Cette structure est destinée à «secourir et soigner plus de 200 000 chômeurs et leurs familles.» Le responsable de la propagande, Oussedik Boualem, instaure ainsi une «médecine gratuite pour tous», en faisant appel à des médecins musulmans et Européens.

Dans son ouvrage, Si Azzedine [12] évoque la réorganisation de la zone autonome d’Alger, il cite parmi les principaux responsables du conseil zonal, A. Lounici, responsable du Service santé et social et M. Amrane, chargé d’établir «bien avant l’indépendance, des cartes d’identité, des cartes de donneurs de sang…». Les besoins en sang sont si importants à Alger, que le FLN considère que l’établissement de cartes de donneurs de sang est aussi important que les cartes d’identité. On peut expliquer l’importance des cartes de donneurs de sang par le fait qu’Alger connaît avant le 20 février, et surtout après le 19 mars, une recrudescence des attentats de l’OAS destinée à saboter les accords d’Evian.

Le 2 mai 1962, un attentat de l’OAS fait 65 morts et des centaines de blessés sur les docks d’Alger. Les musulmans d’Alger refusent, pour la première fois, toute aide des pompiers et des ambulanciers européens et se chargent eux-mêmes du transport et des soins de leurs blessés et de leurs morts. Du 3 au 11 mai, selon les chiffres du préfet de police Vitalis Cros, les victimes de l’OAS sont au nombre de 230. Le FLN de Si Azzedine, qui ripostait initialement aux attentats par des enlèvements de militants supposés de l’OAS, décide de répliquer par des attentats. S’accélère alors à Alger, le cycle des attentats et des représailles entre le FLN et l’OAS ; on compte pour le seul mois de mai, plus de 864 attentats de l’OAS et 80 du FLN [13]. Les victimes musulmanes sont donc très nombreuses et sont soignées exclusivement par les hôpitaux du FLN. Les besoins de poches de sang pour les transfusions sanguines sont nécessairement très importants.

témoignages

C’est à cette période que se situent les témoignages de Francine Dessaigne et de Micheline Susini [14] à Alger. F. Dessaigne évoque, à la date du 9 mai, la rumeur suivante : «On retrouve de temps en temps un cadavre exsangue. Il paraît qu’on a saigné à blanc ces malheureux pour des transfusions sanguines pratiquées dans des mystérieux hôpitaux de la Casbah. C’est tellement horrible que l’on a de la peine à le croire.»

M. Susini évoque le témoignage de sa mère, dont une de ses voisines aurait été enlevée dans le quartier du Champ-de-Manœuvre : «Elle se réveille dans une chambre où d’autres personnes, européennes, attendent.» Un musulman les examine, on la choisit et on l’emmène dans une salle d’opération. «Le personnel infirmier est arabe.» On va procéder à une transfusion, lorsque des coups de feu éclatent. «Elle reste seule avec une infirmière musulmane, celle-ci la pousse dehors par une porte dérobée, lui criant : sauve-toi, profite s’en, on allait te prendre du sang.» Elle se sauve et tombe sur une des cousines de M. Susini, Jeannine qui a épousé un gendarme, qui la reconnaît d’emblée car elles habitaient auparavant la même rue Adolphe Blasselle. J. Monneret [15] date cet événement du 26 mai 1962.

Le témoignage apporté est pour la première fois précis : on dispose de davantage de détails concernant les prélèvements de sang forcés. Sur le plan chronologique, ce témoignage se situe dans la période où le FLN a ouvert ses propres structures médicales et au moment où les affrontements entre l’OAS et le FLN sont les plus intenses. Les transfusions sanguines pour les victimes d’attentats de l’OAS sont donc importantes.

Cette date se situe également dans la période évoquée par le troisième rapport du CICR de la mission de secours du 23 mai au 13 juin du docteur Chastenay, qui confirme la pénurie de sang dans les hôpitaux du FLN tout en expliquant que «Le problème de la transfusion a été résolu par le transfert de l’équipe de (l’hôpital) Mustapha.» et l’acheminement de sérum Rhésus sur le Clos Salembier. Le témoignage de M. Susini se démarque clairement par sa précision et par la date des faits rapportés des rumeurs sans fondement rapportées par le commandant Thomas. Ce témoignage semble étayer l’hypothèse de prélèvements sanguins forcés à Alger. On peut se demander si les mesures prises par le CICR ont permis de résoudre durablement la pénurie de sang. Le rapport optimiste du docteur Chastenay semble aller dans ce sens. Si on admet le bien-fondé de ce rapport, alors la période de prélèvements sanguins forcés aurait été limitée au mois de mai et au début du mois de juin.


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Un témoignage indirect nous a été apporté par la fille d’un adjudant-chef au 19ème RG d’Hussein Dey, Auguste Causse. Ce dernier affirmait avoir trouvé un charnier composé uniquement de femmes et d’enfants [16] saignés à blanc. Il aurait alors demandé à son épouse de tuer leurs deux enfants, si le FLN venait à les intercepter. La famille Causse est partie le 12 mai, comme le montre le Journal de marches et d’opérations (JMO) du bataillon du 19ème RG, qui recense au jour le jour les activités au niveau du bataillon. Cependant en l’absence des JMO des compagnies, qui recense et décrit avec précision toutes les activités des unités effectuées sur le terrain, il est difficile de confirmer ces propos par des documents officiels [17].

 

Belcourt, Kouba, Maison-Carrée

Néanmoins, si on reprend les informations apportées par la fille de l’adjudant-chef Causse, Hussein Dey est évoqué. Ce quartier fait partie des lieux où les enlèvements sont les plus nombreux avec Belcourt, Kouba, Maison Carrée. Entre le 19 mars et le 12 mai, on compte 107 Européens disparus. Des hommes, mais aussi des femmes, des enfants et vieillards sont enlevés [18]. Plusieurs charniers de six à huit cadavres sont découverts par le 2/23e RIMa du chef de bataillon Rollet dans le secteur d’Hussein Dey : les 21 mai, 22 mai et 28 mai, soit un total de 22 cadavres. L’unité est alors mutée et remplacée par le 2/117e RI.

La Dépêche d’Alger évoque dans son édition du 23 mai la découverte de 17 cadavres à Haouch Hadda : deux Européens sont libérés, deux charniers, l’un de 8 corps, l’autre de 7 corps d’Européens. Le journal évoque «des tortures», «des corps mutilés rongés par la chaux vive» et «des blessures profondes». Les rumeurs affirment que deux autres cadavres ont été retrouvés, ce qui porterait à 17 le nombre de cadavres retrouvés. L’identité des cadavres et les raisons de la mort ne sont pas clairement évoquées, mais les termes laissent évoquer un centre d’interrogatoire du FLN. Au Frais Vallon, le 3/12e BI du commandant Thomas découvre 14 cadavres le 29 mai.

Le 5 juin à Beau-Fraisier deux compagnies du 12e BI trouvent un charnier (2 musulmans et de nombreux cadavres), mais la découverte provoque une émeute et dégénère en affrontements entre les unités de l’armée française et la force locale. Un officier français est tué, la découverte ne peut être exploitée. Le commandant Thomas est muté [19].

Dans le secteur de Hussein Dey, on trouve donc des charniers d’Européens après le 21 mai, soit une dizaine de jours après le départ de l’adjudant-chef Causse et la révélation de la découverte d’un charnier de femmes et d’enfants. La découverte de celui-ci par le 19ème RG n’a jamais été mentionnée auparavant par aucun récit. En l’absence des JMO des compagnies, il nous est impossible de prouver les propos de la fille de l’adjudant-chef. Il est pourtant intéressant de noter que les unités ou les chefs des unités qui ont découvert les charniers ont tous fait l’objet de mutation et que les découvertes n’ont pas été révélées au grand public, sauf pour le charnier du 22 mai.

Hussein_Dey_en_1962
quartier d'Hussein Dey à Alger en 1962

On peut même être étonné de l’absence des JMO des compagnies du 19ème RG, alors même que subsiste le JMO du bataillon. Dernier point surprenant, l’adjudant-chef Causse évoque un charnier composé de femmes et d’enfants. C’est la seule mention d’une telle découverte jusqu’à aujourd’hui. Le fait d’avoir demandé à son épouse de tuer leurs propres enfants en cas d’enlèvements par le FLN montre qu’il pensait que sa femme et ses enfants pouvaient être menacés. Deux ans après la fin de la guerre d’Algérie, le 4 mars 1964, place de Chartres en Basse Casbah d’Alger on retrouvait dans un dépôt de confection un charnier de 32 cadavres contenant des corps d’hommes, de femmes et d’enfants dans de la chaux vive [20].

 

charniers

Pour les différents charniers découverts à Hussein Dey, au Frais Vallon et à Beau-Fraisier, il nous manque les causes du décès des victimes. Sont-elles décédées à la suite de tortures, d’exécutions sommaires ou de prélèvements sanguins ? Si l’on décide de prendre en compte le témoignage de l’adjudant-chef Causse, il est le seul à évoquer explicitement la cause de la mort : «saigner à blanc», cependant il n’a laissé aucune information permettant d’aller dans ce sens. Relaye-t-il les rumeurs algéroises ou s’appuie-t-il sur des éléments objectifs pour parler de prélèvements sanguins ? En l’absence de tout rapport d’autopsie, il est difficile de confirmer ou d’infirmer les propos de l’adjudant-chef Causse. Néanmoins, le contexte géographique des enlèvements, la chronologie des charniers découverts dans les environs et la volonté des autorités de ne pas dévoiler ces charniers et même de sanctionner les auteurs des découvertes peuvent nous faire penser que ce charnier aurait bien pu exister. Mais rien ne permet d’affirmer que ce charnier soit le résultat de décès à la suite de prélèvements sanguins, en l’absence de tout autre information complémentaire.

5_beau_fraisier

 

rumeurs oranaises

«En Oranie et dans sa capitale, le phénomène des enlèvements est significatif en quantité, mais moindre qu’à Alger et dans la Mitidja.», explique J. Monneret, cela serait dû à la séparation des quartiers musulmans et Européens par des barrages [21]. La ville d’Oran connaît, comme à Alger, de nombreuses rumeurs de prélèvements sanguins effectués par le FLN. Dans son ouvrage, l’activiste de l’OAS G. Pujante évoque les prélèvements sanguins à l’occasion de l’arrestation du commando OAS Robespierre à la mi-mai : «Après une vive fusillade avec les gendarmes mobiles, ils sont appréhendés n’ayant plus de munitions et conduits non loin de là à l’école Langevin, en limite du village Nègre [Ville Nouvelle].

Ce lieu était réputé être la banque de sang des hôpitaux du FLN. Des médecins musulmans, mais aussi Européens, y saignaient à blanc leurs prisonniers et les cadavres étaient abandonnés nuitamment dans les environs.» [22] Le général Katz, responsable de la sécurité à Oran, les évoque également : «les rumeurs les plus mensongères courent la ville, propagées aussi bien par les notables que par les concierges» [23]. Un de ceux qui rapportent fidèlement les rumeurs est le RP de Laparre, arrivé de métropole, ce prêtre s’occupe du patronage d’une école dans le quartier européen de Saint Eugène à l’est d’Oran. Il décrit dans son journal [24] au jour le jour l’état d’esprit des Européens et les nombreuses rumeurs qui parcourent les quartiers européens d’Oran. Il dément cependant les informations rapportées précédemment, lorsqu’elles lui sont indiquées comme étant erronées.

 

prélèvements sanguins forcés

La première rumeur rapportée sur les prélèvements sanguins forcés par le RP de Laparre remonte au 22 avril. Il signale une clinique au quartier Victor Hugo, qui pratiquerait les prélèvements sanguins sur des Européens : «Pour se procurer du sang frais, il [le FLN] a établi des barrages sur les routes du quartier. Les automobilistes sont amenés à l’hôpital où un médecin français, sur une table d’opération les saigne totalement. Puis on va déposer leur cadavre sur la route.»

Deux informations du RP de Laparre nous permettent de douter de la crédibilité des informations rapportées. On parle d’un médecin européen qui procède à un prélèvement sanguin jusqu’à la mort du prélevé, sans aucun cas de conscience et en violation du serment d’Hippocrate. De plus, il ne semble pas logique que le FLN, à la suite des prélèvements sanguins effectués, ne cherche pas à dissimuler les cadavres et semble au contraire vouloir les exposer à la vue de tous.

Le RP de Laparre évoque ensuite le témoignage d’une femme, qui comme à Alger, dit avoir été enlevée pour être prélevée de son sang. Elle fait semblant de «mourir» lors du prélèvement, elle est déposée sur une route et apporte son témoignage. Or ce témoignage rapporté par le RP de Laparre, contrairement à celui d’Alger, recèle bien des invraisemblances : «Elle avait reconnue son propre médecin dans son assassin, le docteur Gomez, qui se trouve être aussi… secrétaire d’un secteur OAS et adjoint du docteur X., un de nos bons amis, à la clinique duquel il assure un service à certaines heures. La dame a reconnu aussi là-bas le docteur Y. [Larribère], ex-député communiste d’Oran, qui a aussi une clinique en ville, près d’ici au monument aux Morts. Enfin, elle a pu situer à peu près la clinique FLN et l’OAS a pris l’affaire en mains.»

On accuse donc un médecin européen, responsable OAS, de sympathiser avec le FLN, et de procéder à des prélèvements sanguins forcés sur une de ses compatriotes et de plus une de ses patientes ! Enfin, ce médecin n’arrive pas à distinguer un évanouissement simulé d’un décès. On est donc bien ici dans l’élucubration totale.

Un médecin, ancien député communiste, est également accusé de soigner des musulmans. Certains médecins progressistes, Européens d’Algérie ou métropolitains [25], s’étaient en effet portés volontaires pour servir dans les hôpitaux du FLN, mais affirmer qu’ils auraient cautionné des prélèvements sanguins forcés semble excessif. Un médecin européen travaillant dans une clinique du FLN aurait pu donc très bien utiliser une poche de sang sans en connaître la provenance et les méthodes utilisées pour l’obtenir. Enfin, un prélèvement sanguin ne nécessite pas obligatoirement la présence d’un médecin, un simple infirmier suffit pour mener à bien l’opération.

clinique du docteur Larribère

L’OAS s’attaque à la clinique du docteur Larribère en la détruisant par une charge explosive. Le docteur Gomez est blessé, tandis que sa clinique est incendiée par l’OAS. [26] Un tract de l’OAS du 25 avril [27] donne les raisons de l’attentat contre la clinique du docteur Larribère. Il est accusé d’aller soigner «les fellagha à l’école de Victor Hugo transformée en hôpital», et d’aider à mourir «les Français que les fellouzes réussissent à capturer.» Le tract évoque les soins qu’apporte le docteur Larribère dans le quartier musulman aux blessés considérés uniquement comme des combattants et non comme des victimes civiles musulmanes des attentats de l’OAS.

L’accusation de faire mourir les Français est vague et n’évoque pas explicitement les prélèvements sanguins. Or, cette raison est pourtant la principale motivation de l’attentat de l’OAS contre la clinique, selon le RP de Laparre et le témoignage d’un policier d’Oran [28]. Le tract de l’OAS fait également l’amalgame entre deux lieux du quartier Victor Hugo, c'est-à-dire le centre de soins de l’école qui se trouve rue de Suffren avec le centre d’interrogatoire des Européens capturés, qui se trouve rue du général Brossard [29].

On peut donc penser que ces faits, auxquels vient se rajouter l’accusation de posséder un poste émetteur récepteur, sont des prétextes destinés à justifier l’action de l’OAS. Un second tract de l’OAS du 26 avril donne d’ailleurs d’autres justifications à l’attentat contre la clinique du docteur Larribère : il est accusé d’avoir hébergé deux personnes issues des pays communistes et d’être un sympathisant communiste [30]. Il n’y a donc plus aucune accusation de l’OAS concernant les soins médicaux aux musulmans ou d’éventuels prélèvements sanguins sur des Européens. On peut donc penser que l’accusation de prélèvements sanguins était totalement mensongère ; le général Katz préfère évoquer, pour sa part, «un règlement de compte» à propos des attentats visant les cliniques des docteurs Gomez et Larribère.

banlieue du Petit-Lac

Le 27 avril, le RP de Laparre rapporte de nouvelles rumeurs [31] : «Dans la banlieue du Petit-Lac, il y aurait un camp de concentration FLN, pour tous les gens enlevés. Ceux qui ne sont pas notoirement OAS ne sont pas fusillés. On les garde soit comme otages pour d’éventuels échanges, soit pour des prises de sang, suivant les besoins de l’hôpital FLN de Victor Hugo, où sont soignés tous les musulmans de la ville. Aucun en effet ne veut plus aller à l’hôpital civil.» Les informations apportées se font plus précises : les détenus sont européens, mais ne font pas partie des activistes de l’OAS. On évoque la pratique des prélèvements sanguins. Ces caractéristiques se retrouvent également dans la lettre du légionnaire X enlevé le 8 mai à la plage des Sablettes à Arzew rapporté par le rapport militaire du 13 juillet 1962.

En revanche, il y a une nette différence, le lieu de détention sert aussi de lieu de prélèvement pour les besoins en sang de l’hôpital Victor Hugo, alors que le témoignage du légionnaire évoque deux lieux différents. On peut envisager l’hypothèse que dans le témoignage du RP de Laparre l’origine de la rumeur provient d’un des détenus du Petit-Lac libéré par les forces de l’ordre dix jours auparavant. R. Delpard rapporte en annexe de son ouvrage [32] des procès-verbaux de gendarmerie concernant des détenus libérés du Petit-Lac.

Selon le général Katz, les quartiers musulmans de Sanchidrian et Petit-Lac avaient connu des attaques de commandos de l’OAS les 16 et 17 avril. Une troisième attaque de l’OAS ayant fait une dizaine de morts, la population excédée intercepte huit véhicules européens et s’attaque aux Européens [33]. J. Monneret s’appuyant sur les archives de la gendarmerie et du Deuxième Bureau réfute l’interprétation de la vengeance du FLN à une action de l’OAS, qui n’apparaît nullement dans les rapports consultés. Les rapports évoquent l’action spontanée de militants du FLN de la dernière heure, qui veulent prouver ainsi leur fidélité à la cause de l’indépendance [34].

Par des procès-verbaux de gendarmerie, on apprend que le 17 avril, les gendarmes mobiles ont libéré pacifiquement les détenus du quartier du Petit-Lac, au nombre de treize, dont Madame Anton et ses deux enfants. Madame Anton et son fils de 11 ans racontent comment ils ont été interceptés au niveau du Petit-Lac, alors qu’ils se dirigeaient vers l’aéroport de La Sénia. Les Anton sont arrêtés et détenus au centre médical du Petit-Lac. Monsieur Anton est lynché par la foule avant d’avoir atteint le centre. Madame Anton y retrouve des Européens prisonniers, ainsi que deux Européens, qui s’occupent des soins aux blessés. Visités par des chefs FLN et des infirmières, Madame Anton et ses enfants ne subissent aucun sévice.

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L'Écho d'Oran, 21 juillet 1962, source

 

rien dans les PV de gendarmerie

Le FLN possédait un centre médical à Victor Hugo, mais également au Petit-Lac, où auraient pu être effectués des prélèvements sanguins. Cependant, les procès-verbaux de gendarmerie n’évoquent aucun prélèvement sanguin au Petit-Lac ou à Victor Hugo. G. Pujante, activiste de l’OAS, attribue la libération pacifique des prisonniers du FLN aux contacts entre Attou, chef FLN du Petit-Lac et la gendarmerie mobile dans la lutte contre l’OAS [35]. Si les propos de G. Pujante sont exacts, on peut exclure que le Petit-Lac ait pu servir de centre de prélèvement sanguin, en raison des contacts étroits entre le FLN et la gendarmerie mobile. On ne peut imaginer que la gendarmerie aurait toléré de tels actes sans intervenir, comme le montre d’ailleurs son intervention «pacifique» pour libérer les Anton et les autres prisonniers. Le témoignage rapporté par le RP Laparre ne peut pas concerner le quartier du Petit-Lac dirigé par Attou.

Le RP de Laparre évoque aussi le témoignage d’un Européen prisonnier qui s’est échappé de son lieu de détention du quartier Ville Nouvelle : «L’employé d’un ami, arrêté par un barrage FLN, a été enfermé vingt-quatre heures dans une pièce, avant-hier [le 25 avril], avec quarante cadavres. Mais un brave fellagha, ancien collègue d’une équipe sportive, l’a délivré. C’est le premier rescapé connu. Pour nos amis enlevés, on n’a que fort peu d’indices et personne ne peut ou ne veut rien faire. On suppose qu’ils ont déjà été saignés à l’hôpital FLN de Valmy. Mais pour les familles, l’incertitude est encore plus terrible que cette certitude-là. S’il y a eu tant de fusillades la nuit précédente, ce serait parce que la force locale a été à l’hôpital récupérer ses blessés musulmans et rafler en même temps les bocaux de sang de réserve.» Le rescapé aurait donc été détenu dans une sorte de morgue de l’hôpital Valmy de Ville Nouvelle, où se trouvaient 40 cadavres. S’agit-il de cadavres d’activistes de l’OAS exécutés ou de décès dus aux prélèvements sanguins ? Le RP de Laparre n’apporte aucune précision supplémentaire.

 

pénurie de sang

L’autre information rapportée par le RP de Laparre est le fait que le FLN connaîtrait une pénurie de sang, d’où la volonté de s’emparer de «bocaux de sang de réserve.» La pénurie de sang des hôpitaux FLN signalée par le RP de Laparre est expliquée par le fait que le FLN soigne désormais ses propres blessés. Le général Katz confirme qu’à partir du 26 avril, le personnel médical européen devient tellement hostile aux musulmans, qu’il est même nécessaire que les forces de l’ordre soient obligées de «transporter de l’hôpital civil (européen) d’Oran en Ville Nouvelle (quartier musulman) les blessés et les malades musulmans que les tueurs de l’OAS risquent de venir achever.»

À partir de cette date, les structures médicales européennes et algériennes sont tellement cloisonnées, qu’il est impossible pour un musulman de se faire soigner dans un hôpital européen, même en cas de pénurie de médicaments et de poches de sang. Les structures médicales du FLN, qui ont de plus en plus de mal à répondre aux soins médicaux de leurs propres blessés des quartiers musulmans d’Oran voient donc s’ajouter les blessés musulmans évacués des hôpitaux européens.

Le général Katz précise que même les blessés des forces de l’ordre, chargés de la lutte anti-OAS, ne peuvent plus être soignés dans les hôpitaux européens acquis à l’OAS. Ces derniers doivent se faire soigner «dans les hôpitaux de fortune de la Ville Nouvelle, (où) les médecins musulmans les reçoivent, bien que débordés en nombre par leurs blessés et propres malades. [36]» Le général Katz, chargé de la sécurité d’Oran, évalue le chiffre des victimes des affrontements entre l’OAS, le FLN et les forces de l’ordre entre le 19 mars et le 1er juillet, soit cent jours, à «32 membres des forces de l’ordre tués, 143 blessés, 66 Européens tués et 36 blessés, 410 Algériens tués et 487 blessés.»

Nous voyons donc bien que dans un processus similaire à celui d’Alger, des structures médicales ont été créées à Oran [37] par le FLN pour tenter de soigner par ses propres moyens les victimes des attentats de l’OAS. Les structures médicales du FLN devaient pouvoir répondre à une moyenne d’une douzaine de morts ou de blessés par jour, or celles-ci souffrent d’une pénurie de matériels médicaux, de médicaments, ainsi que de poches de sang. R. Kauffer évoque l’anecdote suivante (sans préciser le lieu Alger : ou Oran) : «dans le même temps, comble de l’absurde, des Européens brisent à l’aéroport des flacons de sang envoyés par des organismes humanitaires. [38]» Les structures médicales du FLN sont donc totalement dépassées par l’afflux de blessés musulmans et ceux des forces de l’ordre.

 

rumeurs sur les prélèvements sanguins

Ce n’est qu’à partir du 31 avril que le général Katz semble être au courant de la rumeur qui concerne les prélèvements sanguins forcés, qu’il assimile à d’autres rumeurs fantasques : «Les Européens d’Oran disent que les Arabes rendent exsangues ceux qui sont pris par eux et les laissent mourir. Leur radio assure que nous emmenons en Ville Nouvelle des personnes arrêtées pour leur prendre leur sang, nécessaire aux Musulmans.» [39]

Le général Katz ne prend pas au sérieux ces rumeurs, d’autant plus qu’elles rendent complices les forces de l’ordre des agissements du FLN. À partir du mois de mai à Oran, les rumeurs se font de plus en plus nettes pour assimiler les enlèvements à des moyens de pallier les carences en poches de sang. Cependant, les informations rapportées sont peu précises et ne permettent pas de dire formellement que les Européens enlevés sont les victimes de prélèvements sanguins.

J. Monneret révèle dans son ouvrage un bulletin de renseignement de la gendarmerie d’Arcole, située au nord-est d’Oran, daté des 3 et 4 mai. Ce document explique que les enlèvements ont deux motivations : celles de rechercher des activistes de l’OAS, et de faire des collectes de sang pour les hôpitaux du FLN. C’est le premier document officiel qui évoque cette pratique. Les prisonniers seraient détenus à Sidi Chami, à la cité Bel Air et à l’hôpital psychiatrique où auraient lieu également les prélèvements sanguins. Cependant, une note ajoutée par le supérieur hiérarchique explique que cette information n’a pas été recoupée et que la rumeur publique a amplifié l’information [40].

J.F., un Européen victime d’un enlèvement à Oran a décidé récemment d’apporter son témoignage et donne des informations complémentaires sur les prélèvements sanguins [41]. Policier métropolitain envoyé en Algérie en 1957, il se trouve à Oran en 1962. Le 8 mai 1962, il est muté en métropole. Quelques jours plus tard, après avoir organisé son déménagement, il se rend en voiture à l’aéroport de La Sénia. «Sa disparition a été signalée autour du 17 ou 18 mai.» Il ne se souvient plus de la date précise de son enlèvement.

Sur la route nationale, il est arrêté à l’entrée d’Oran par un barrage du FLN ou de l’ALN. Il est identifié comme policier, son arme et ses papiers lui sont confisqués. Ses yeux sont bandés. «Ils m’ont amené non loin de là», à proximité de la route où il a été arrêté. Il se retrouve dans une grande cour centrale et des bâtiments tout autour avec de nombreuses salles. Il pense au début que c’est une école, mais «certains ont pu me suggérer qu’il s’agissait des abattoirs d’Oran». La vue des crochets de boucherie plus tard accrédite cette idée. Il reste emprisonné une dizaine de jours dans une petite pièce.

Le FLN pense qu’en qualité de policier, il dispose de nombreux renseignements. On l’interroge chaque jour, il reçoit «des coups, des gifles» Mais il n’a pas les réponses aux questions posées. Il n’est pas seul à être dans ce cas : «J’entendais par moment des hurlements, certains proches, d’autres plus éloignés. De temps à autre dans le couloir qui passait devant ma prison, il y avait des bousculades et des cris.» J.F. est alors menacé d’être prélevé de son sang et d’être exécuté s’il ne répond pas aux questions de ses geôliers. Il voit en effet «des gens qui marchaient en titubant, pâles comme des morts, et qui criaient qu’on leur prenait tout leur sang. C’était affreux et difficilement descriptible» ; et on lui montre «des cadavres qui séchaient au soleil, certains accrochés par le cou à des crochets de boucherie.» Il reçoit de la nourriture et de l’eau ou du lait une fois à deux par jour.

Ce témoignage montre que sur un lieu de détention de prisonniers se trouve également un centre de prélèvement sanguin. Il est donc différent sur ce point de celui du légionnaire, mais se rapproche des propos du RP Laparre du 27 avril. On peut donc penser qu’il y avait deux pratiques possibles : utiliser les prisonniers présents pour pratiquer les prélèvements sanguins et ensuite acheminer les poches de sang, ou emmener un prisonnier dans des centres de soins en fonction des besoins en transfusion sanguine et y pratiquer les prélèvements.

J.F. est libéré grâce aux déclarations d’un musulman arrêté par les gardes mobiles sur la route nationale à l’entrée est, qui indique que le maire de son village est détenu à cet endroit. Les gendarmes mobiles et l’armée libèrent les détenus au début du mois de juin. «Je n’ai pas une idée du nombre que nous étions. Dans le véhicule où je suis monté, nous n’étions que trois ou quatre. Mais il y avait plusieurs véhicules, dont au moins une ambulance.» Après deux à trois jours d’hôpital militaire à Oran, il est rapatrié sanitaire dans un hôpital de métropole. Il est suivi régulièrement par des médecins, pour sa dépression nerveuse due à sa détention. Ce n’est que cinq ans plus tard, qu’il retrouve ses activités professionnelles.

 

lieu de détention et crocs de boucher

Le lieu de détention n’est pas précis, puisque le témoin avait les yeux bandés. Cependant, des informations sont apportées comme l’entrée d’Oran, la route nationale, la direction de la Sénia. On peut penser qu’il s’agisse de la route nationale n°4 sur laquelle les Anton ont été arrêtés. La détention au même endroit que les Anton à la cité du Petit-Lac, un mois après leurs libérations paraît peu probable. En revanche, les crocs de boucher peuvent nous faire penser à la cité des Quatre Chemins, où l’on trouve un abattoir et qui se trouve être à l’entrée d’Oran à proximité de la route nationale 4.

Ce lieu a été identifié par les forces de l’ordre comme un lieu de détention [42]. Dans un PV d’interrogatoire de Chouali-Chaila [43] daté du 5 mai par la gendarmerie, un homme appréhendé alors qu’il faisait des opérations de contrôle routier, explique qu’il travaille pour Attou au Petit-Lac, comme chef de la police. Il explique également qu’à la cité des Quatre Chemins une équipe du FLN procède, comme au Petit Lac, au contrôle et à l’interception de véhicules. Cette équipe dirigée par Lahcène Lahouari est installée au n°220 de la rue 7 aux Abattoirs.

Selon Chouali-Chaila : les personnes arrêtées «ont été étranglées ou égorgées par L. Lahouari, puis jetées dans la Sebkra [lac salé] du Petit-Lac.» Il lui attribue personnellement, par deux fois, une vingtaine de victimes. Il précise plus loin dans son interrogatoire qu’«une vingtaine de FSE et une dizaine de FSNA» ont été tuées par les hommes de Lahouari, soit une trentaine. Il affirme avoir vu lui-même quatre personnes égorgées aux Quatre Chemins.

Il est ensuite interrogé sur l’enlèvement de militaires français, mais il affirme tout en ignorer. Chouali-Chaila décrit l’organisation du secteur FLN au sud-est d’Oran qui dispose de deux points de contrôle au niveau des cités du Petit-Lac et des Quatre Chemins. Chouali-Chaila est chargé de contrôler les Européens au niveau du Petit-Lac. Le poste du FLN du Petit Lac, installé dans les locaux de la SAU, dépend hiérarchiquement de Victor Hugo. Selon l’historien algérien Fouad Soufi, ce groupe dirigé par Attou Mouedden et son neveu avait profité d’une rivalité entre les trois organisations du FLN et de l’ALN d’Oran pour prendre son autonomie après le 19 mars et contrôler les quartiers de Petit-Lac et de Victor Hugo [44].

Chouali-Chaila revendique l’interception d’Européens, qui sont ensuite détenus au centre médical du Petit-Lac. Ils subissent généralement un interrogatoire avec tortures, soit à la SAU du Petit-Lac, soit au quartier Victor Hugo (rue du général Brossard) ou aux Quatre Chemins. Les prisonniers peuvent être exécutés par étranglement ou égorgement dans les abattoirs de cette cité. Les cadavres sont systématiquement jetés dans la Sebkra (lac salé) du Petit-Lac. Chouali-Chaila ne nous donne aucune information sur le degré d’autonomie de Lahouari par rapport à Attou. Enfin, Chouali-Chaila ne mentionne pas la pratique de prélèvements sanguins sur les prisonniers, alors qu’il fait lui-même office d’infirmier. Le lieu précis rapporté par le RP Laparre le 27 avril pourrait être davantage celui des abattoirs des Quatre Chemins contrôlés par Lahouari plutôt que celui de la SAU du Petit-Lac dirigée par Attou.


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source : algeriefrançaise.org


alimentation nécessaire à la reconstitution du stock de sang

On retrouve des points communs entre les propos de J.F. et la lettre du légionnaire enlevé. Les lieux des enlèvements se trouvent tous deux dans la périphérie d’Oran, pour J.F. la route de la Sénia, pour le légionnaire la plage des Sablettes à Arzew. Les geôliers connaissent parfaitement l’identité des détenus (papiers du militaire ou du policier). Le fait d’avoir fait prisonniers des membres des forces de l’ordre ne semble leur poser aucun problème, comme si le FLN ou l’ALN se considéraient toujours en guerre contre la France, malgré les accords de cessez-le-feu. L’autre point commun est la nourriture : les prisonniers sont nourris avec diversité, mais frugalement et reçoivent de l’eau ou du lait, selon J.F. Ce témoignage rejoint celui du légionnaire qui indique aussi dans sa lettre : «Ils nous donnent bien à manger». Une alimentation minimale des détenus est assurée par les geôliers, ce qui est nécessaire à la reconstitution du stock de sang prélevé. Cependant tous les prisonniers ne sont pas obligatoirement prélevés de leur sang, comme le montre le témoignage de J.F., en revanche il s’agit d’un moyen de pression supplémentaire sur les prisonniers pour les faire parler.

Un autre point signalé par J.F. est le fait qu’on lui montre «des cadavres qui séchaient au soleil, certains accrochés par le cou à des crochets de boucherie.». Les propos sur des cadavres pendus à des crocs de boucher sont confirmés par la découverte de charniers d’Européens. Le journal britannique Daily Express du 9 mai 1962 révèle la nouvelle sous le titre : «L’horreur derrière des portes closes en Algérie.» La nouvelle de cette découverte macabre est même annoncée à l’Assemblée nationale par le député d’Alger Lauriol le 14 mai [45]. À la suite de l’enlèvement d’un Européen, sa sœur avait mené une enquête et avait reconnu son cadavre, vidé de son sang, à la morgue dix jours plus tôt, c'est-à-dire autour du 30 avril. Cette dernière avait alors donné le renseignement à l’armée qui avait procédé à une perquisition dans un abattoir d’un quartier algérien, où avaient été retrouvés 41 cadavres «tous saignés à blanc.» Le journal britannique parle de victimes des prélèvements sanguins.

le Daily Express et les prélèvements sanguins

Le Daily Express explique cette pratique par le fait que la religion musulmane interdit à des musulmans de donner leur sang pour une banque de sang [46]. Le sous-lieutenant Doly-Linaudière, arrivé du Constantinois à Oran le 6 mai, sympathisant OAS, défend la même interprétation sur la cause des décès en évoquant la découverte de «cadavres exsangues de trente Français accrochés par le menton à des crochets de boucherie : le FLN avait besoin de sang pour ses hôpitaux.» [47] Pourtant si l’on considère que l’information rapportée par la sœur d’une des victimes, que le cadavre du frère avait été «saigné à blanc aux poignets» ; il pourrait s’agir ici de coupures pratiquées aux poignets par un couteau pour torturer ou faire mourir d’hémorragie un prisonnier, plutôt que de prélèvements sanguins qui sont effectués au niveau de l’avant-bras. Cependant les propos de J.F. montrent que ces prisonniers ont pu être aussi victimes de prélèvements sanguins et de tortures avant leur exécution.

Il est fort probable que ce ne soit pas un charnier, mais plusieurs charniers d’européens pendus à des crochets de boucher qui aient été découverts à Oran le 7 mai, l’un de 41 cadavres, l’autre de 30 cadavres. La différence des chiffres entre le Daily express et le sous-lieutenant Doly-Linaudière est un premier indice. L’autre information provient du journal du RP de Laparre qui évoque ces découvertes et donne exactement les mêmes proportions.

À la date du 8 mai, il écrit : «On dit que les tirs d’hier soir auraient été déclenchés par la découverte en quartier musulman de deux charniers contenant quarante et trente Européens saignés. [48]» Un troisième charnier est aussi évoqué à la date du 13 mai, il parle d’une «courte et récente occupation» des abattoirs, où vingt cadavres ont été retrouvés pendus à des crochets. Les forces de l’ordre ont-elles décidées de faire des perquisitions dans les différents abattoirs de la ville occupés par des prisons du FLN ? Un tract de l’OAS du 27 avril évoquait l’occupation des abattoirs centraux par le FLN dès le 24 avril [49]. On peut penser qu’un des charniers découverts se trouvaient précisément dans les abattoirs centraux.

 

quinze points de détention d'Européens à Oran

Le rapport du 17 mai du chef d’escadron Coadic, chef du Deuxième Bureau d’Oran, publié par J. Monneret [50], identifie quinze points de détention des Européens à Oran, cependant le général Katz était hostile à toute intervention en raison du «climat général». Le chef du Deuxième Bureau explique avoir demandé le 2 mai des renseignements aux forces de l’ordre sur les endroits où les Européens pouvaient être détenus. Un premier lieu de détention est perquisitionné le 5 mai, et permet de récupérer un harki et un Européen. Quatre autres lieux sont alors perquisitionnés le 7 mai avec l’autorisation du général Katz. Le chef d’escadron Coadic en tire comme bilan : «Il est apparu d’une manière manifeste que des organismes clandestins y avaient été installés, mais avaient déménagé depuis peu. Sans doute à la suite de la perquisition du 5 mai.» On peut être surpris des mots employés pour évoquer la découverte des trois charniers d’européens pendus à des crochets de boucher par des mots bien sibyllins «d’une manière manifeste». Le rapport ne mentionne la libération d’aucun Européen entre le 7 mai et le 17 mai, date du rapport.

Un seul Européen ayant été enlevé le 14 mai est remis volontairement par le FLN aux forces de l’ordre. Les propos de J.F. s’inscrivent parfaitement dans la chronologie et la géographie des enlèvements, des prélèvements sanguins et des charniers découverts : le légionnaire X est enlevé le 8 mai, J.F. est enlevé entre le 10 et le 17 mai. Les enlèvements ont lieu dans la périphérie d’Oran. J.F. et le légionnaire sont détenus avec d’autres prisonniers. Des charniers d’Européens pendus à des crochets de boucherie ont été découverts entre les 7 et 13 mai. La Dépêche d’Algérie signale dans son édition du 18 mai que 11 Européens enlevés ont été «retrouvés par les forces de l’ordre à Oran.» L’édition indique que les noms des personnes libérées seront prochainement publiés, ce qui ne sera malheureusement pas le cas. On peut donc penser que la découverte des corps d’Européens dans les boucheries a accéléré les perquisitions, dont au moins une, a eu un résultat.

Concernant la persistance de pénurie de poche de sang à cette période, on dispose d’un témoignage d’une personne qui a failli être prélevée de son sang, comme un autre individu à Alger [51] : Virgile Renoux étant à la recherche son fils, il est emmené par des policiers musulmans dans le quartier arabe. Devant un bâtiment, des hommes en blouses blanches sortent, qui font un signe négatif aux policiers. «Il apprendra plus tard qu’il a été conduit à ce fameux hôpital clandestin où des Algériens prélevaient le sang des pieds-noirs arrêtés» S’appuyant sur deux bulletins de renseignements du 1er et du 9 juin, J. Monneret identifie le lieu à la polyclinique, rue du Figuier en Ville Nouvelle.

On pourrait cependant critiquer le témoignage de J.F. concernant les prélèvements sanguins. Il n’a pas été lui-même prélevé de son sang lors de sa détention, même si on l’a menacé de le faire ou qu’il a entendu un autre détenu dire qu’il allait être prélevé de son sang. Dans la chronologie de la révélation des prélèvements sanguins, l’enlèvement de J. F. se situe quelques jours après que la presse ait évoqué des découvertes des différents charniers. J.F. a vu des cadavres de détenus durant sa détention, mais sans avoir été le témoin direct ou la victime de prélèvements sanguins. J.F. ne fait-il pas ici relayer une rumeur des prélèvements sanguins forcés sur les Européens ? La question ayant été posée à J.F., il répond qu’il avait consulté des rapports de police faisant état «de rumeurs d’Européens ou de francophiles enlevés.

On ne savait pas ce qu’ils étaient devenus.» Il se souvient aussi qu’un cadavre d’Européen avait été découvert dans la banlieue d’Oran avant son départ d’Oran. Il croit qu’il a entendu parler pour la première fois de prélèvements sanguins, par «l’intermédiaire de ses geôliers, mais il n’est pas certain.» [52] Il ne faut alors pas exclure que les geôliers aient pu aussi utiliser cette menace pour faire pression sur J.F. et ainsi obtenir des renseignements. Le témoignage de J.F étant vague sur les prélèvements sanguins, toutes les hypothèses réfutant ou allant dans le sens de prélèvement sanguins sont à explorer.

Selon J.F., sa libération début juin serait le résultat d’une opération spontanée sur information. On peut nuancer cette interprétation, en raison du contexte général des autres perquisitions. En effet, après la découverte d’un charnier dans un abattoir (les abattoirs centraux) et la libération d’une dizaine d’Européens, la perquisition d’autres abattoirs en quartiers FLN aurait semblé logique. De plus, le PV de la gendarmerie signale les Quatre Chemins comme étant un lieu de détention et d’exécution des prisonniers.

Enfin, le bulletin de renseignement n°988 du 16 mai cite également les abattoirs de la cité des Quatre Chemins comme une «prison clandestine», il s’agit ici de la reprise de l’information transmise par la gendarmerie qui avait fait une copie du rapport de Chouali-Chaila au Deuxième Bureau et à la Commission mixte le 8 mai, comme le signale d’ailleurs la fin du PV. On peut donc se demander s’il était nécessaire aux forces de l’ordre de posséder ce renseignement supplémentaire pour pouvoir intervenir. Après les échecs des précédentes perquisitions, les forces de l’ordre ont peut-être pu préparer avec beaucoup plus de soin cette opération. L’opération conjointe des gardes mobiles et de l’armée, la présence de plusieurs véhicules, dont au moins une ambulance, montre qu’on pourrait être bien loin d’une opération spontanée.


le témoignage du légionaire J. Kemencei

Le dernier témoignage d’une personne qui évoque les prélèvements sanguins forcés sur des Européens à Oran est celui d’un légionnaire du 1er REI d’origine hongroise J. Kemencei [53] servant dans cette ville : «À la sortie de notre petite caserne, la route passait obligatoirement derrière l'hôpital. À un angle, au bas des étages et journellement, nous comptions plusieurs cadavres européens, certainement jetés hors de l'établissement. Ils étaient vidés de leur sang. Les marques de piqûres bien visibles aux coudes et surtout aux poignets – leurs geôliers prenaient leur sang directement à l'artère ! – témoignaient de l'assassinat.

Le FLN raflait même les gens bien portants, et les saignait à mort pour soigner les blessés et les malades arabes. Puis les camions de ramassage des ordures les transportaient, ces cadavres, aux décharges publiques. Les gendarmes mobiles, pourtant armés convenablement, avouaient leur impuissance faute d'ordres pour agir. Mais des CRS arrivaient tout fraîchement de métropole, pour former et instruire la future police algérienne, pendant que les Français d'Algérie se faisaient massacrer, ou prenaient rapidement la valise pour éviter le cercueil. Un comble !»

L’auteur J. Kemencei, gravement malade, est malheureusement décédé en décembre 2009, ce qui ne nous a permis d’obtenir des renseignements complémentaires sur les propos tenus dans son ouvrage concernant notamment la date précise du témoignage. La présence de corps humains jetés avec les déchets sans le moindre effort pour les dissimuler semble tout à fait invraisemblable pour retenir ce témoignage.

Si on devait cependant émettre des hypothèses, quant à la date des faits décrits par J. Kemencei, il nous faut reprendre ses propos. On a ainsi une impression d’un sentiment de totale impunité de la part du FLN, qui semble disposer de nombreux prisonniers européens. Le FLN agit au grand jour sans rien dissimuler, comme l’indique les mots : «journellement», «plusieurs cadavres d’Européens», «au bas des étages», «ramassés par des camions de ramassage des ordures», «décharges publiques». Le passage régulier d’un véhicule militaire français à proximité du charnier ne semble pas importuner le FLN, qui ne change en rien ses habitudes. J. Kemencei arrive à bord du véhicule à reconnaître les causes de la mort des Européens, puisqu’il arrive à voir distinctement les piqûres des prélèvements sanguins aux coudes et aux poignets.

En raison de l’impuissance signalée des forces de l’ordre (Légion étrangère, gendarmerie, CRS), les événements rapportés ne peuvent se situer qu’après le 3 juillet (date de l’indépendance de l’Algérie), mais plus probablement quelques jours après le 5 juillet, où de nombreux européens ont été lynchés et ont été fait prisonniers par le FLN. Trois indices vont dans ce sens : celui qui indique que les CRS formaient «la future police algérienne» et que l’armée et les gendarmes mobiles n’interviennent pas.

Sur le lieu des prélèvements sanguins repéré, J. Kemencei indique qu’il servait au dépôt de la Légion [54], qui «était situé juste derrière l'hôpital municipal, entre le Palais des sports et le cimetière, et qu'il sortait tous les jours pour acheminer le courrier (…) À la sortie de notre petite caserne, la route passait obligatoirement derrière l'hôpital.» Il y a effectivement un grand hôpital (avec un dispensaire de l’ALN) situé à l’angle de la rue Paul Doumer et du général Détrie. De l’autre côté de la rue du général Détrie en face de l’hôpital, il y a deux casernes et un dépôt. La première caserne est située à l’angle de la rue du général Détrie et de l’avenue de Valmy. Il y a une école, le souk et le cimetière juif derrière ces deux édifices. En face, de cette caserne il y a le dispensaire (de l’ALN) qui fait l’angle. La deuxième caserne qui jouxte le dépôt est au bout de la rue du général Détrie qui longe l’hôpital.

Derrière cette deuxième caserne, il y a le cimetière. On peut penser qu’il est dans cette caserne, en raison de la phrase suivante : «À la sortie de notre petite caserne, la route passait obligatoirement derrière l'hôpital. A un angle, au bas des étages et journellement, nous comptions plusieurs cadavres européens» En revanche, «le palais des sports» n’apparaît pas, qu’il confond peut-être avec le palais des Beaux Arts, rue Paul Doumer. Cet hôpital situé en Ville Nouvelle (ou Village Nègre) et à proximité des quartiers de Lamur et Médioni est bien localisé. Au sud de ces deux quartiers se trouvent la caserne de CRS et la caserne de la gendarmerie mobile. Ce témoignage de J. Kemencei sur la question des prélèvements sanguins forcés d’Européens n’est confirmé par aucun document officiel du 1er REI, certes lacunaire sur cette période. Le JMO du 1er REI [55] n’est pas exploitable, en effet entre le 30 juin et le 1er octobre 1962, le JMO s’interrompt. Le rapport sur le moral du 1er REI qui aurait été intéressant pour étudier la période est également absent [56]. De plus il n’existe, à notre connaissance, aucun témoignage de légionnaires, de policiers ou de gendarmes qui corrobore les propos de J. Kemencei.

Ainsi, malgré les hypothèses avancées, l’incertitude sur la date du témoignage et l’exhibition des cadavres d’Européens en pleine rue sont deux aspects du témoignage de J. Kemencei qui ne permettent pas de prendre en considération celui-ci pour établir l’existence de prélèvements sanguins forcés sur des Européens par le FLN.

Un territoire sans rumeurs : Tlemcen

Paradoxalement si les villes d’Oran et d’Alger connaissent des nombreuses rumeurs infondées ou troublantes dues à la concentration et aux tensions entre communautés, les campagnes ne semblent pas connaître ce phénomène. On peut expliquer l’absence de rumeurs par l’isolement et l’insécurité des campagnes, mais aussi  par le retrait des unités militaires des différents secteurs ruraux isolés et leur regroupement sur des centres plus importants, ainsi que le départ des Européens sur des villages plus importants ou en métropole. Un témoignage d’un harki recueilli par un ancien officier SAS (section administrative spécialisée) [57], qui s’occupe de ses problèmes administratifs, apporte un éclairage nouveau sur les prélèvements sanguins. Ahmed M. est harki au 128e BI en poste à Parmentier (Sidi Ali Boussidi) au sud de Sidi-Bel-Abbès. Il est enlevé près du poste par deux harkis déserteurs le 10 avril et est remis au FLN. Il est conduit en voiture après plus de deux heures de route à Hennaya situé au nord de Tlemcen. Il est regroupé avec d’anciens harkis ou moghaznis dans une ferme.

Il a du mal à évaluer le nombre de détenus, qu’il estime à une centaine, parmi eux il signale deux Européens. Les prisonniers sont utilisés à retirer des cadavres de trois puits situés aux abords de la ferme : «Je ne pouvais pas compter les cadavres, mais ils étaient très nombreux.» Il n’a pas vu de cadavres d’Européens, mais les prisonniers étaient divisés en plusieurs groupes pour accomplir cette tache ; il n’a donc pas eu accès à l’ensemble du site. Sur ce point, G. Pujante signale dans son ouvrage qu’à Sidi Hammadi à l’ouest d’Oran, on trouve des cadavres d’Européens enlevés dans des puits désaffectés [58]. Il serait donc habituel de dissimuler des cadavres dans des puits dans cette région.

Les prisonniers, au nombre d’une centaine, ne sont plus qu’une dizaine au moment de son évasion. La raison en est que le FLN pratiquait sur les prisonniers des prélèvements de sang. Ahmed M. affirme avoir été prélevé de son sang par trois fois et «en grande quantité». Le prélèvement était effectué dans l’écurie, dans un garage ou dans la salle des tortures. Il n’y avait pas de lieu spécifique. Des «civils» et des membres du FLN procédaient aux prélèvements sanguins. Les pertes élevées parmi les harkis sont expliquées par des prélèvements de sang fréquents, mais aussi «parce qu’ils n’étaient pas nourris.» D’autres décès sont dus à des tortures : des coups avec des câbles électriques, des décharges électriques avec la gégène, l’obligation de boire de l’eau jusqu’à la mort, être attaché par les pieds, la tête en bas jusqu’à ce que la mort s’en suive. Ahmed M., malgré son état de faiblesse, parvient à s’échapper et à rejoindre la frontière marocaine après trois jours de marche de nuit. Il réussit à rejoindre l’Espagne, où il affirme ne peser que 45 kg.

Si nous faisons le bilan des déclarations du harki Ahmed M., on peut constater que les descriptions concernant les exactions touchant les harkis recoupent les nombreux témoignages recueillis jusqu’alors. En revanche, il s’agit de la première fois qu’est évoquée la pratique des prélèvements sanguins forcés sur les harkis. On peut être surpris des lieux cités pour faire des prélèvements : une écurie, un garage ou une salle des tortures, qui ne sont pas les meilleurs lieux pour garantir des conditions d’hygiène optimales aux prélèvements sanguins. La fréquence des prélèvements et l’insuffisance de nourriture montrent qu’il ne s’agissait pas pour les geôliers de garder vivant le prisonnier le plus longtemps possible, mais que c’était un moyen d’accélérer la mort des détenus. Dernière point intéressant de ce témoignage, la région de Tlemcen n’avait jamais évoqué jusqu’à maintenant par les rumeurs de prélèvements sanguins, alors même que cette région comptait de nombreux Européens.

Si 6 500 Européens sur les 11 000 sont partis en métropole, selon le maire de Tlemcen à la date du 26 juin 1962, il en reste encore plus de 4 500 sur place. La région connaît aussi des enlèvements d’Européens, comme le 4 mai, où 11 Européens sont enlevés à Tlemcen [59]. Enfin, si cette région semble située en dehors des grands lieux d’affrontements entre activistes de l’OAS et le FLN, malgré le cessez-le-feu du 19 mars, la région est loin d’être calme ; en effet, G. Pujante rapporte le compte-rendu d’une réunion à Rocher Noir [60] faisant état d’affrontements entre le 1er étranger de la Légion étrangère de Sidi Bel Abbès et des unités du FLN. Le 9 juin, les affrontements se traduisent pour le FLN par 16 combattants mis hors combat (blessés ou tués).

Le FLN devait nécessairement avoir dans la région un hôpital pour soigner ses blessés de la région et avait donc dû mettre en place une banque de sang. Un mois auparavant, un bulletin de renseignement quotidien du 4 mai rapporté par G. Pujante nous apporte une information qui est loin d’être anodine, faisant état du vol à Tlemcen « de flacons stériles avec du liquide anticoagulant.» [61]. Ces flacons sont utilisés lors des prélèvements sanguins pour éviter que le sang ne se coagule. Parmi les mesures d’aides du CICR aux hôpitaux du FLN, trois lieux sont mentionnés : Alger, Oran et Tlemcen. À Tlemcen, deux médecins ont dû être envoyés par le CICR [62]. La région de Tlemcen, jamais été mentionnée par des rumeurs de prélèvements sanguins, semble être importante pour les services médicaux du FLN, comme l’indiquent les différentes sources.

Conclusion

Entre la fin avril et le début du mois de mai 1962, de nombreux enlèvements ont lieu à Alger et à Oran. Des rumeurs persistantes affirment que des Européens sont enlevés pour être vidés de leur sang. Ces rumeurs d’enlèvements apparaissent systématiquement à la suite de la création par le FLN de structures médicales pour soigner les musulmans en toute sécurité.

Ces structures sont confrontées à une pénurie de banque de sang, alors même que les besoins pour les blessés sont nombreux. Le CICR est aussi alarmé par cette situation et tente de pallier la pénurie de médicaments et de poches de sang.

Les rumeurs sur les prélèvements sanguins ont trois origines différentes.

La première origine vient des activistes de l’OAS qui l’utilisent pour discréditer les médecins européens sympathisants du FLN, montrer les violences du FLN, dénoncer la passivité des autorités françaises et justifier par là leur cause. L’OAS s’appuie pour cela sur des témoignages de rescapés, qui se sont enfuis ou sur la découverte de centres d’interrogatoire d’Européens mis en place par le FLN pour obtenir des renseignements sur l’OAS. Sur les lieux des centres de détention du FLN, on retrouve des cadavres d’Européens torturés, dont les rumeurs attribuent les traces de torture à des actes de prélèvement de sang.

Une deuxième source des rumeurs provient de personnes libérées par les forces de l’ordre ou affirmant avoir été enlevés et s’être enfuis, des civils (femmes, personne âgée) ou des membres des forces de l’ordre (un policier, un légionnaire et un harki). Ils donnent des descriptions relativement précises des prélèvements sanguins.

La troisième origine des rumeurs est constituée de personnes qui côtoient les Européens : militaires en opération, gendarmes, officiers de renseignement, prêtre d’un internat et journaliste. Informés de la découverte de charniers, ils donnent les effectifs des victimes, les lieux et évoquent les rescapés éventuels. De leur côté, les services de renseignements français et les forces de l’ordre sont assez imprécis sur les prélèvements sanguins et n’évoquent pas la découverte de cadavres ayant été prélevés de leur sang. Le document militaire évoquant l’affaire du légionnaire enlevé pour être prélevé de son sang est le seul document officiel qui étaye les rumeurs.

Enfin, en mentionnant un troisième lieu de prélèvements, jamais évoqué par les rumeurs, le témoignage d’un harki montre que les prélèvements sanguins ne concernaient pas uniquement les Européens des deux grandes agglomérations de l’Algérie, mais pouvaient également concerner d’autres régions plus reculées. Ce troisième lieu démontre que les rumeurs des milieux européens ne sont pas à l’origine de l’invention des prélèvements sanguins.

l’historien et les rumeurs

Pour l’historien, les rumeurs rapportées par les Européens sont à la fois des indices, mais aussi des obstacles pour la compréhension des faits, cependant en les croisant avec d’autres sources, il est possible de faire la distinction entre l’affabulation et l’existence de faits troublants pouvant faire penser à la possibilité de prélèvements sanguins forcés. Pourtant, en l’absence de rapports d’autopsie sur les charniers découverts, il est difficile de dire avec certitude si les victimes retrouvées sont mortes des sévices subis ou s’ils ont fait l’objet de prélèvements sanguins avant d’être exécutés.

Certains historiens de la Guerre d’Algérie pourraient justifier l’absence d’étude sur les prélèvements sanguins forcés, même pour les réfuter, en expliquant qu’il s’agit là de rumeurs nées de fantasmes transformant l’ennemi en monstre ou en vampire et qu’il est absolument inconcevable que ce type d’action ait pu être imaginé, voire mené à bien. L’historien a le devoir d’envisager toutes les hypothèses, de la rumeur comme de la réalité des prélèvements sanguins, et se doit de ne pas fermer une piste au prétexte que des actes barbares ne peuvent avoir été commis par des hommes.

En dehors de cette étude sur l’hypothèse de prélèvements sanguins en Algérie, il est avéré que dans l’histoire du XXe siècle, trois pays, dont deux en Asie, ont procédé à de telles pratiques sur des prisonniers. L’Afghanistan des Talibans les a pratiqués avec «un personnel médical arabe ou pakistanais» sur des prisonniers de guerre, conservés comme «des banques de sang vivantes» [63]. Au Cambodge, les Khmers rouges les ont également pratiqués dans la prison S 21 [64].

Enfin, au Maghreb, le Front Polisario les a pratiqués sur des prisonniers marocains lors du conflit pour l’indépendance du Sahara occidental contre le Maroc dès 1975. Il est à noter que le Front Polisario avait ses bases-arrières en Algérie. Libéré avec 400 autres prisonniers en août 2004, le capitaine Ali Najab, pilote de Mirage, formé dans les écoles militaires françaises, évoque sa détention en 2005 au Monde : «les mieux portants devaient donner leur sang pour les hôpitaux. Certains devenaient de véritables vaches à sang.» Le Monde évoque aussi les témoignages d’Hamid et d’Houcène, «pompés jusqu’à dix fois par mois» [65].

Peut-on croire à une simple coïncidence si 13 ans après la fin de la Guerre d’Algérie et les prélèvements forcés effectués sur des Européens, d’autres prélèvements sanguins forcés aient pu avoir lieu sur ce même territoire algérien, mais cette fois-ci sur des prisonniers marocains ? 

Grégor MATHIAS
auteur de
Les sections administratives spécialisées en Algérie
(1955-1962), L'Harmattan
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L’auteur de cet article tient à remercier G. Pervillé, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Toulouse-Le Mirail, pour ses conseils et ses remarques lors de la rédaction de cet article, ainsi que pour l’apport de sources évoquant les prélèvements sanguins à Oran ou Alger.

notes

1 - Jean MONNERET, La phase finale de la guerre d’Algérie, L’Harmattan, 2001, p. 134.

2 - M. GUENTARI, Organisation politico-administrative de la révolution algérienne, OPU d’Alger, 1994, volume 1, p. 292. M. FAIVRE La Croix-rouge pendant la guerre d’Algérie, Lavauzelle, 2007, p. 48-49 : trois rapports des missions de secours du CICR entre le 29 mars et le 13 juin 1962 évoquent les problèmes sanitaires et médicaux des hôpitaux du FLN à Oran et Alger.

3 - Grégor MATHIAS, «Le sang des disparus d’Algérie en mai-juin 62 - un drame oublié de la guerre d’Algérie», Outre-Mers, T. 95, n°356-357, 2e semestre 2007, p. 265-280. Ce document m’a été remis par le père J. Saavedra (1930-2009), ancien légionnaire et traducteur à la sécurité militaire. Il avait traduit la lettre du légionnaire enlevé. Son nom apparaît sur le document, comme traducteur. Il a été ensuite chargé de détruire certaines archives de la Sécurité militaire lors du déménagement du centre de la Légion étrangère de Sidi Bel Abbés à Aubagne. Il a subtilisé le document avant sa destruction et l’a conservé 40 ans en sa possession avant de me le remettre. J. Saavedra a apporté un témoignage sur son itinéraire dans l’ouvrage d’E. MONTETY, Des hommes irréguliers, Perrin, 2006, chap. 4 , «Dieu s’arrête à Sidi Bel Abbés», p. 73-87. Deux autres officiers de la Légion étrangère ayant leur nom sur le document ont été également identifiés et contactés.

4 - Maurcie FAIVRE, 2007, p. 48-49 rapport N°251-008-014 du docteur Gaillard. Selon le rapport suivant du 23 mai au 13 juin, la situation semble avoir été résolue.

5 - M. FAIVRE, 2007, p. 48-49 rapport N°251-008-014 du docteur Gaillard. Selon le rapport suivant du 23 mai au 13 juin, la situation semble avoir été résolue.

6 - Rémi KAUFFER, L’OAS, Fayard, 1986, p. 296.

7 - J.-C. PEREZ, Le sang d’Algérie, éditions du Camelot et de la jeune garde, 1991, p. 35.

8 - Pierre NORA, L’OAS parle, Julliard, 1964, p. 256-263, document 61 «Mémorandum sur les enlèvements» du commandant Thomas remis à la défense de l’ex-capitaine Murat.

9 -J. MONNERET, La phase finale de la guerre d’Algérie, thèse Paris IV-Sorbonne, 1996 évoque le parcours du commandant Thomas, un officier qui a lutté le plus longtemps possible à Alger contre le terrorisme du FLN en coordonnant ses actions avec un responsable de l’OAS.

10 - P. NORA, L’OAS parle, Julliard, 1964. Cette version sera celle présentée par le commandant Thomas devant la Cour de sûreté de l’État pour défendre le capitaine Murat, responsable des commandos Deltas à Alger et de cette attaque en particulier en 1963.

11 - Yves COURRIERE, Les feux du désespoir, Poche, 1971, p. 728 et 730.

12 - SI AZZEDINE, Et Alger ne brûla pas, Stock, 1980 p. 144, 156 et 186-189.

13 - Y. COURRIERE, 1971, p. 693 et 727-734.

14 - F. DESSAIGNE, Journal d’une mère de famille pied-noir, l’Esprit nouveau, 1962, M. SUSINI, De soleil et de larmes, R. Laffont, 1982, p. 226-227. M. Susini est l’agent de liaison et la future épouse de J.J. Susini, un des dirigeants de l’OAS à Alger

15 - J. MONNERET, La phase finale de la guerre d’Algérie, Paris IV-Sorbonne, publiée à L’Harmattan, 2001, p. 138 s’appuyant sur les archives militaires (SHAT 1.H.1789). Des officiers de renseignements rapportent les rumeurs de prélèvements sanguins avec beaucoup de prudence et en expliquant qu’ils n’en possèdent aucune preuve, selon J. Monneret.

16 - Ibid, p. 131 et 134 : des enlèvements de femmes, d’enfants et de vieillards ont lieu à Belcourt, Kouba, Hussein Dey et Maison Carrée.

17 - SHD, JMO du 19e RG 1353 n°9. Les JMO des compagnies sont déficitaires pour l’année 1962 !

18 - J. MONNERET, 2000, La phase finale de la guerre d’Algérie, 2000, L’Harmattan, p. 134-135 rapport du général de Menditte, commandant du Corps d’Armée d’Alger.

19 - Ibid, 2000, p. 182-185

20 - Ibid, p. 309.

21 - J. MONNERET, 2006, p. 24 et p. 45 : 74 enlèvements sont recensés jusqu’au début juillet.

22 - G. PUJANTE, Itinéraire Lambda, de l’Algérie de papa à l’OAS, éd. Godefroy de Bouillon 2004, p. 231-232 et p. 335. G. Pujante, activiste de l’OAS fait état dans son ouvrage de documents des différents services de renseignements, ainsi que de documents du FLN et de réunions officielles des autorités militaires françaises sur Oran en 1962.

23 -J. KATZ, L’honneur d’un général Oran 1962, L’Harmattan, 1993, p. 192, à la date du 30 avril.

24 -M. de LAPARRE, Journal d’un prêtre en Algérie, Oran 1961-1962, Page après page, 2004, 254 p

25 -Si AZZEDINE, 1980, p. 188-189. Y COURRIERE, 1971, p. 728. L’information est donnée pour Alger.

26 -A. LANTA, Algérie, ma mémoire, 1999, éditions Bouchène Saint-Denis, p. 171 évoque des médecins qui travaillent au Village Nègre [connu aussi sous le nom de Ville Nouvelle] à Oran

27 - M. de LAPARRE, 2004, p. 94 et 97 et J. KATZ, 1994, p. 178.

28 - M. de LAPARRE, 2004, p. 94 et 97 et J. KATZ, 1994, p. 178.

29 - R. VETILLARD, témoignage de J.F., entretien téléphonique le 3 juin 2009. J.F. est policier à Oran à cette période et sera enlevé et détenu par le FLN à la mi-mai 1962, puis libéré par les forces de l’ordre

30 - R. DELPARD, Les oubliés de la guerre d’Algérie, 2003, annexe 5, p. 315-323 PV de Chouali-Chaili.

31 - G. PUJANTE, 2004, p. 243 Grâce à des complicités dans la police et la sécurité militaire, l’OAS s’était emparée des listes des membres du PCA en Oranie. G. Pujante mentionne en premier lieu le docteur Larribère parmi les 1100 membres du PCA en Oranie. p. 345 la clinique du docteur Larribère est surveillée par l’OAS.

32 - M. de LAPARRE, 2004, p. 102-103.

33 - R. DELPARD, 2003, p. 323-326, PV Y. et F. Anton.

34 - J. KATZ, 1993, p. 170-171 rappelle le contexte et évoque l’agression de la famille Anton.

35 - J. MONNERET, 2006, p. 68-69.

36 - G. PUJANTE, 2004, apporte d’autres précisions sur l’affaire Anton en relatant un autre PV, celui du 1er au 15 mai relatant les propos de René Bitsch, CRS rayé des cadres, qui était chargé de faire la liaison entre la gendarmerie mobile et Attou pour la recherche de dépôts d’armes de l’OAS. R. Bitsch sera assassiné le 4 mai par l’OAS. Voir également J. MONNERET, 2006, p. 46-56.

37 - J. KATZ, 1993, p. 9 et 160 à 178.

38 - M. GUENTARI, 1994, volume 1, p. 348 cite les dispensaires FLN à Ville nouvelle, Cité Petit, Petit-Lac, Brunie, Cholet, Victor Hugo, Planteurs, Ras el Aïn, Médioni (chirurgie). M. BENABOURA, OAS, Oran dans la tourmente, Dar el Gharb, Oran, 2005, p. 145 et p. 199. Il cite les mêmes lieux tout en ajoutant la rue Tombouctou pour la chirurgie, Bendaoud (les deux en Ville nouvelle) et Sidi El Houari et révèle l’identité des huit médecins, tous musulmans, à Oran.

39 - R. KAUFFER, 1986, p. 296.

40 - J. KATZ, 1993, p. 192

41 - J. MONNERET, 2006, p. 63.

42 - R. VETILLARD, témoignage de J.F. recueilli le 2 octobre 2008 et le 3 janvier 2009. R. Vétillard est l’auteur de Sétif, mai 1945, massacres en Algérie, préface de G. Pervillé, Editions de Paris, 2008

43 - J. MONNERET, 2006, p. 60 Bulletin de renseignement n°988 du Deuxième Bureau : une prison clandestine se trouve au n°7 à la cité des Quatre chemins aux abattoirs.

44 -R. DELPARD, 2003, annexe 5, p. 315-323 PV de Chouali-Chaila, militant du FLN arrêté le 4 mai 1962 par les gendarmes français.

45 - F. SOUFI «L’histoire face à la mémoire : Oran, le 5 juillet 1962.» (p. 133-146) dans A. Oayau-Rosenman et L. Valensi, La guerre d’Algérie dans la mémoire et l’imaginaire, Ed. Bouchène, 2004.

46 - J. MONNERET, 2001, p. 455, JO du 15 mai 1962, p. 1106.

47 - R. DELPARD, 2003, p. 207.

48 - G. DOLY-LINAUDIERE, L’imposture algérienne, Filpacchi, 1992, lettre du 13 mai, p. 185.

49 - M. de LAPARRE, 2004, p. 123

50 - Ibid, p. 130 et Tracts et émissions de l’OAS zone III : «Texte de l’émission réalisée sur les ondes de la TV le 26 avril.» mentionne l’occupation des abattoirs centraux le 24 avril par le chef FLN Kadiri avec l’aide des gardes mobiles, qui en expulsent les Européens. L’endroit aurait servi par la suite de poste de commandement au chef local du FLN.

51 -J. MONNERET, 2006, p. 167-169.

52 - Ibid, p. 65-66 citant G. TERNANT, L’agonie d’Oran, p. 113.

53 - R. VETILLARD, témoignage de J.F., entretien téléphonique le 3 juin 2009.

54 - J. KEMENCEI, Légionnaire en avant, J. Grancher, 1985, éd. de la Seine, succès du livre, 1991, p. 342-345.

55 - SHD, 7.U.618, un PV de dissolution du centre d’instruction de février 1962 signale la présence d’un dépôt de la Légion étrangère à Oran.

56 - SHD, 7.U.617, JMO du 1er REI 1958-1964.

57 - SHD, 7.U.618, les rapports sur le moral du 1er REI sont déficitaires de 1957 à 1964.

58 - J. du BOUCHAUD, ancien officier SAS en Algérie, a reconstitué le parcours militaire et civil d’Ahmed B., harki de1959 à 1962, à partir de son livret militaire et de son témoignage.

59 - G. PUJANTE, 2004, p.336.

60 J. MONNERET, 2000, La phase finale de la guerre d’Algérie, p. 171 et 231.

61 - Ibid, p. 332-333 réunion du 13 juin 1962, Rocher noir, n °2124/CSFA/EM entre C. Fouchet, représentant du gouvernement français pour les Affaires algériennes, le Général Fourquet, responsable des forces de l’ordre en Algérie et Abderrahmane Farès, représentant du GPRA. Le général Fourquet interpelle A. Farès sur les enlèvements d’Européens et les combats entre 1er Régiment étranger et deux unités du FLN. A. Farès répond que les enlèvements sont une réponse aux opérations de la Légion étrangère. C. Fouchet réplique que des enlèvements ont lieu dans des secteurs où la Légion n’est pas présente. Le général Fourquet affirme que le gouvernement a donné des ordres pour résoudre le problème posé par la présence de la Légion.

62 - Ibid, p. 335.

63 - M. FAIVRE, 2007, p. 48-49.

64 - M. BARRY, Le royaume de l’insolence, Afghanistan 1504-2001, Flammarion, 2002, p. 489. M. Barry est un spécialiste de l’Afghanistan. Il est actuellement professeur à l’université de Princeton. Il a travaillé comme consultant pour la Fédération internationales des droits de l’homme, Médecins du Monde et les Nations unies.

65 - Le Monde, 11 octobre 2005 «L’enfer sahraoui».

 

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