décolonisation de l'Indochine, témoignage
Indochine, passion persistante
Jeannette ULMANN
Mon livre est un témoignage et une biographie. Contrairement à des écrivains qui ont de bonnes rhétoriques, habiles et certes très renseignées et qui pourraient faire une thèse, moi c'est mon témoignage et mon vécu que je livre.
Je narre l'histoire de ma famille qui se trouve être au début de la colonisation de l'Algérie. J'évoque l'historique empereur Ham Nghi, ami de ma famille, exilé par la France d'Indochine en Algérie en I888, connu sous le nom de prince d'Annam à Alger. Je parle aussi de moi qui me trouve bien malgré moi à l'autre bout de la chaîne de la décolonisation cette fois de l'Indochine, avant celle de l'Algérie. Ma famille a donc vécu toute la colonisation et la décolonisation de ces pays. Que voulez vous de plus vrai, de plus historique ?
Certes, je ne parle pas de conquêtes dominatrices, de victoires héroïques. Je parle de ma vie en Indochine, de la décolonisation, après que mes aïeux aient colonisé. Ils furent "pieds-noirs en Algérie", ils devinrent "pieds-jaunes en Indochine".
Je suis une fille de la colonisation et l'une des dernières rapatriées, nommée par le gouvernement comme "Ayant-droit", après la perte de Dien Bien Phù. J'ai été reléguée dans le fameux CARI, puis CAFI nommé le camp des oubliés à Sainte-Livrade sur Lot (47).
L'Indochine, comme l'Algérie ne sont plus qu'un souvenir, un regret, une douleur toujours présente, mais à l'heure Française, il n'y avait pas lieu de dissocier ces trois territoires, puisqu'ils étaient liés par une seule identité, un concept, la France.
Je ne fais pas l'apologie d'une période définitivement révolue, car le colonialisme sera toujours perçu comme une infamie, non seulement par les colonisés, mais aussi pour tous ceux qui pensent que chaque peuple a le droit de disposer de sa liberté et de son autonomie, au même titre que chaque individu.
Lorsque la guerre décime votre famille, les êtres qui vous sont chers,vous avez un devoir de mémoire envers eux. J'ai fait ce livre pour mes six enfants et mes 15 petits enfants qui ne savent encore pas tous l'histoire de leur origine. Et aussi pour que les lecteurs sachent que ma vie mérite d'être narrée car elle comporte tous les ingrédients d'une vie peu ordinaire.
Xûan Lan, Jeannette Ulmann
remise de la gerbe en hommage aux morts de la guerre d'Indochine
devant la stelle au CAFI de Sainte-Livrade sur Lot (47) ; Jeannette Ulmann est
la troisième en partant de la gauche